Vu du Burkina Faso – Sommet UE-UA : à quand une relation d’égal à égal ?

Courrier internationalCes 17 et 18 février se tient à Bruxelles un sommet Union européenne-Union africaine. Le journal burkinabé Wakat Séra plaide pour un changement radical de paradigme dans les relations entre les deux continents qui, sous l’étiquette de “partenariat”, demeurent bien trop verticales.

Un sommet de plus ou un sommet plus ? La question se pose maintenant plus que jamais ! Non seulement la multitude de ces rencontres ont été de grosses montagnes qui accouchent invariablement de petites souris, mais elles ne servent qu’à affirmer, et confirmer, le statut dominant de ces nations dites grandes, comme celles de l’Europe, sur les petits pays, dont ceux de l’Afrique.

Raouts très prisés par les têtes couronnées, ces réunions où le champagne coule à flots sur le foie gras sont pourtant censées se pencher sur diverses préoccupations de l’heure, allant de la menace constante des conséquences graves du changement climatique à la lutte contre le Covid-19, en passant par le cimetière à ciel ouvert qu’est devenue la Méditerranée pour les migrants à l’assaut de la citadelle Europe, en quête d’un illusoire mieux-être.

La verticalité des relations

 

 

Les questions politiques, militaires et économiques sont également au menu de ceux qui nous dirigent, bien que marquées du sceau indélébile de la discrimination aux dépens de ces nations productrices et fournisseuses de matières premières mais éternelles consommatrices de produits finis, et pour qui l’Europe, les États-Unis et la Chine décident toujours.

De plus, ces sommets entre l’Union européenne (UE) et l’Union africaine (UA) usent et abusent du dictionnaire du partenariat, mais en réalité sont de véritables outils de promotion de la verticalité des relations entre un continent noir où tendre la sébile est le sport le mieux pratiqué et une Europe qui s’est érigée en Mère Teresa.

Dans cette logique où la main qui demande est toujours au-dessous de celle qui donne, comment parler de partenariat ? Un changement véritable de paradigmes sera donc des plus porteurs pour l’avenir, et ce sommet UEUA, qui se tient après celui déjà lointain de 2017 à Abidjan, en Côte d’Ivoire, pourrait servir de point de départ historique à la nouvelle aventure “Afrique et Europe”.

Cette évolution doit s’imposer d’abord aux Africains, qui doivent intégrer pour de bon, comme l’a dit feu le professeur et homme politique burkinabé Joseph Ki-Zerbo, qu’“on ne développe pas”, mais “on se développe”, ensuite pour les Européens, pour qui le partenariat gagnant-gagnant avec l’Afrique doit passer de l’effet de mode à la réalité. L’option doit aller à des relations saines entre les deux continents rapprochés par des liens historiques de colonisation, d’indépendances… dans la dépendance, et de coopération.

 

Une occasion à saisir

 

Si ces mutations vers des relations plus équilibrées ne s’opèrent pas, l’Europe ira de surprise en désillusion. Car les Africains d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier, et la percée sur le continent de puissances comme la Russie et la Chine ne s’en trouvera que renforcée. Russes et Chinois qui ne profitent que de cette accumulation de frustrations provoquée surtout par ce complexe de la supériorité du Blanc sur le Noir. Notion inculquée depuis le bas âge qui conduit même les enfants à préférer une poupée blanche, symbole de la beauté et de la pureté, à une poupée noire, couleur sale, laide et assimilée à Satan.

Certes, ce sommet UEUA risque de faire, en toute logique, la part belle à la lutte contre le terrorisme. Car la menace est réelle et, sans sécurité, aucune action de développement ne peut être entreprise. Mais le départ de Barkhane du Mali pour mieux rester au Sahel, que ce soit avec le Niger, le Burkina Faso, la Mauritanie ou le Tchad comme base, et l’enterrement probable de Takuba, mort-né sur les rives du Djoliba, doivent servir de tremplin pour réorganiser la lutte contre le terrorisme en Afrique.

Les terroristes d’Afrique de l’Ouest et les chebabs de la Somalie doivent trembler face à de nouvelles stratégies plus affinées, et menées de concert, entre armées nationales et forces européennes. Mais aussi et surtout, ce sommet de Bruxelles doit penser développement du continent noir, même si l’autre a dit que “les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts” [Charles de Gaulle].

L’occasion est peut-être la bonne pour Emmanuel Macron de redonner de nouvelles couleurs africaines, reconnues chatoyantes, à ce partenariat UEUA, pour donner une nouvelle vie à des continents finalement très dépendants, l’un de l’autre.

Ainsi, ce sommet UEUA sera plus, et pas un de plus.

Morin
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