Mauritanie – Reportage sur la résilience à l’intérieur du pays [PHOTOS]

Soudure 2022 : Comment les coopératives glissent du maraîchage vers la culture fourragère

Avec une pluviométrique catastrophique cette année, la soudure est largement en avance dans le centre-est du pays, particulièrement dans le Hodh El Charghi. Pour pallier cette crise majeure qui s’annonce dans l’élevage, les coopératives maraîchères développent d’avantage la culture fourragère, avec l’introduction de plus en plus importante de la Maralfalfa (pennisetum sp), pâturage pérenne de haute productivité dans leurs périmètres. Le projet de « Renforcement institutionnel en Mauritanie vers la résilience agricole et pastorale Covid post Covid » (RIMRAP/COPCO), financé par l’Union européenne et mis en œuvre par l’IRAM est à l’initiative de ce soutien.  

 

Dans l’Assaba, à quelques kilomètres à peine de Barkéol, une grande surface verte dans le jaune désertique environnant : la Maralfalfa brille de tout son prisme dans le périmètre maraîcher de Disky 2.

Les femmes de la coopérative ont très vite adopté la plante, testée en juin sur leurs terres, et ont même initié une extension ces dernières semaines pour arriver à presqu’un hectare de culture. « C’est une période de l’année où normalement nous sommes bras ballants à attendre que les semences plantées portent leurs fruits vers janvier. Avec la Maralfalfa, nous avons l’opportunité de nourrir notre bétail confronté cette année à une soudure terrible déjà, et de préserver donc une quantité de lait suffisante pour nos communautés » raconte la présidente de l’association féminine « Yi Weelee », Aïssata Sow.

Les principaux avantages de la maralfalfa sont sa vitesse de pousse et son rendement important lié à sa masse. La faible nécessité en eau pour sa croissance est un élément supplémentaire de son intérêt pour les zones particulièrement arides, avec un accès limité à l’eau, comme dans le centre-est mauritanien. « La biomasse très importante de la Maralfalfa, en fait une culture fourragère adaptée pour nos agropasteurs, surtout en cette année de déficit pluviométrique intense. Avec des coupes régulières chaque 45 à 60 jours, selon le terrain et l’évolution de la plante, 12 à 18 tiges de peuvent sortir pour chaque plant » souligne Sileymane Wagne, expert agro-pastoral à l’IRAM.

Des arguments qui ont également convaincu la coopérative « El Kevia » à la périphérie de Néma, qui a déjà étendu la superficie de sa culture fourragère après à peine quelques semaines pilotes, en juin dernier.

Le projet s’insère pleinement dans le plan national de développement de l’élevage pour la période 2018-2025, qui comprend un volet approfondi sur la culture fourragère: « La production locale, bien qu’élevée, reste saisonnière et atomisée. Pendant l’hivernage la production de lait est beaucoup plus importante que celle de la saison sèche. La saisonnalité de la production laitière s’explique par l’abondance périodique des fourrages et la disponibilité de l’eau. La difficulté de couvrir les besoins alimentaires des laitières et de distribuer des rations en fonction des productions est entretenue par la faible pratique des cultures fourragères. » peut-on lire dans le chapitre sur l’élevage, notamment sur la filière laitière.

Une panacée pour les agropasteurs

Le Hodh El Charghi est la plus grande wilaya pastorale du pays. Les besoins en aliments de bétail sont énormes. La culture de la Maralfalfa peut être une réelle opportunité pour les éleveurs, et les agropasteurs. A Néma, Baba Hassan, président régional du Groupement National des Agro-Pasteurs (GNAP) insiste sur l’importance de la sensibilisation et de l’organisation, pour structurer d’avantage les éleveurs. « En période de soudure, nous percevons nos actions comme stabilisatrices du prix des intrants animaux ; l’introduction massive de la Maralfalfa dans le pays peut être objectivement une bonne perspective en ce sens, si les sites sont bien choisis aussi » recommande-t-il.

« Le glissement constaté des communautés agropastorales de notre monde rural, vers de la culture fourragère, est une preuve de la résilience adaptative de celles-ci. La soudure exceptionnellement difficile qui s’annonce, commence déjà dans le Hodh El Charghi et dans d’autres régions de la Mauritanie » commente pour sa part le délégué régional de l’élevage, Lehbib Abdel Aziz.

Mariam Diarra, présidente de la coopérative maraîchère féminine de Rahma Zamal, dans la zone rurale de Kiffa insiste aussi sur la facilité de cette culture, avec le contexte du déficit pluviométrique, qui a mis à mal les cultures maraîchères. « 

A cause du déficit pluviométrique, les pâturages sont déjà très rares. Dès le mois de juin nous avons planté la Maralfalfa sur un peu moins d’un quart d’hectare. Avec cette production, nous faisons de l’embouche auprès de nos quelques têtes de bétail. Nous avons une vache laitière qui produit 10 litres de lait par jour, que nous nous partageons entre nous pour nos enfants » raconte-t-elle. Une expérience tellement satisfaisante à ses yeux, qu’elle a doublé sa superficie de production en 3 mois.

 

 

 

 

Photos – Crédit : Mamoudou Lamine Kane

 

 

 

 

 

Mamoudou Lamine Kane

 

 

 

(Reçu à Kassataya.com le 01 décembre 2021)

 

 

 

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