S’en prendre à la France est aujourd’hui, comme hier, un cage de patriotisme dans les anciennes colonies. Défier un président français est un geste de courage.
Après tout, nous n’allons pas rester les bras croisés pendant que ces gens-là exploitent notre sous-sol. Ça n’est plus acceptable. Non, et non ! Que nous apporte la France ? Rien ! Le discours du premier ministre malien fustigeant la présence de l’armée française dans son pays a été très bien perçu par les Africains. Il a été bien applaudi. Et ce sont ces applaudissements qui sont inquiétants. Nous savons tous, même si nous avons peine à le reconnaître, que n’eut été la présence de l’armée française, les jihadistes auraient marché sur Bamako. Et nous n’y avons pas encore échappé. Le Mali est un pays phare.
De par sa grande histoire, tout africain est un morceau malien. Notre devoir est de ne pas le laisser s’effondrer. Et pour cela, il est juste nécessaire de redéfinir la présence française. Nos pays ont été gouvernés par des hommes incapables qui n’ont jamais su à quoi sert une armée. Qui se sont attelés à s’enrichir, à se faire bonne réputation pour leur village et autres. Ce n’est pas de la faute de la France si l’armée malienne était inexistante. Et pourquoi les autres pays africains ne viennent-ils pas défendre le Mali ?
Il faut que nous nous posions les bonnes questions. Nous n’allons pas passer toute notre vie à culpabiliser les autres. Du règlement du problème malien dépend la stabilité de toute la région. Le premier ministre malien, dont on dit qu’il est un professionnel de la politique, menace de s’allier avec les Russes. Pardon avec des mercenaires russes. Nous savons que c’est l’état russe est à la manœuvre. Ça et là on nous dit que les Russes ont stabilisé la République centrafricaine, qu’ils sont plus fiables que les Français, qui ne cherchent qu’à exploiter l’or du Mali. Il faut quand même être d’une naïveté native pour penser que les Français sont au Mali pour regarder les beaux couchers de soleil sur le fleuve Niger. De jeunes soldats français sont morts, ils étaient les espoirs de leur famille. Ils laissent derrière eux des orphelins. Croire que tout ça, c’est pour rien…
Il est vrai que le Mali fut, dans un passé lointain, au temps du président Modibo Keïta, un allié de l’union soviétique. C’était l’époque où l’on croyait encore au socialisme scientifique; cette chimère ! Mais nous ne connaissons pas les Russes. Nous n’avons rien de commun avec eux. Qu’avons-nous de commun avec les Français ? La langue, pardi !
La sortie du premier ministre malien a certes donné des bouffées de patriotisme ou nationalisme à certains, mais elle est loin d’être réaliste. Nos relations avec la France sont en plein changement. Le paternalisme s’estompe petit à petit.
Les jeunes africains expriment leur mécontentement, disent des choses que leurs aînés n’auraient jamais osé dire. Oui, le monde bouge. Nous ne voulons pas de mercenaires ou de troupes russes à nos frontières. Surtout pas ! Les Français et les Russes sont des Blancs. Au lieu de remplacer des Blancs par des Blancs, nous devons garder les Blancs que nous connaissons tout en ayant le courage de pointer nos insatisfactions.
Mamadou Sakho
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