Vu du Burkina Faso – La fin de l’opération Barkhane au Sahel, c’est “la fin d’un leurre”

Neuf ans après l’envoi de troupes françaises au Mali pour contrer l’avancée des jihadistes et alors que la guerre est loin d’être gagnée, le 10 juin, Emmanuel Macron a annoncé la fin de l’opération Barkhane. Désormais, une prise de conscience urgente s’impose aux leaders africains, estime le site burkinabé Wakat Séra. 

En attendant un enterrement de première classe, ou une inhumation dans l’intimité familiale, la force Barkhane vient, après une lente agonie, de pousser son dernier soupir [cette opération militaire a remplacé en 2014 l’opération Serval lancée deux ans plus tôt au Mali pour combattre les groupes terroristes dans le nord du pays]. C’est le plus simplement du monde, au détour d’une conférence de presse, qu’Emmanuel Macron a annoncé sa mort, après sept années de lutte contre le cancer du terrorisme qui a touché le Sahel africain.

La force française, forte de ses 5 100 hommes, dont 50 ont été avalés par le sable chaud du Sahel, aura affronté le danger des canons des djihadistes au quotidien, mais aura surtout souffert de ce sentiment anti-français qui n’a cessé d’enfler, au point de constituer un gros caillou dans les rangers des “Macron boys”.

Mais la force Barkhane a pris un autre plomb dans l’aile : la majorité des Français la désavoue, parce que budgétivore et dévoreuse des “enfants de la patrie”, à des milliers de kilomètres de la France. Qui plus est, la France s’était embarquée seule dans l’aventure. Pourtant, le combat de Barkhane sur le terrain porte le double sceau de l’appui aux pays sahéliens quotidiennement endeuillés par les assauts des djihadistes, malandrins et trafiquants de grand chemin.

 

Un nouveau putsch au Mali comme déclencheur

 

Compte tenu du désaccord manifeste des Français, maintenir cette force, en tout cas dans son format actuel, devenait suicidaire pour Emmanuel Macron pour une raison toute simple : la douzième élection présidentielle de la cinquième République, c’est pour avril 2022 ! C’est dans peu de temps et l’actuel locataire de l’Élysée qui est loin d’avoir toutes les faveurs des pronostics est conscient que l’opinion publique, ça compte en France. Il n’a donc aucun intérêt à s’attirer la foudre d’un électorat qu’il doit conquérir ou reconquérir !

De même, le deuxième coup d’État en seulement neuf mois au Mali [fin mai, le colonel Assimi GoÏta a renversé le président de la transition malienne], qui a provoqué l’ire d’Emmanuel Macron sur fond de rivalité russo-française, est du vrai pain bénit pour l’Élysée. Paris saisit cette opportunité pour sortir Barkhane des sables mouvants du Sahel dans lesquels la France s’empêtrait.

C’est comme le remake de ce film de guerre réalisé par les États-Unis en Afghanistan à l’époque. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, Barkhane est sur le point d’abandonner le Sahel avec “ses” terroristes comme les GI’s sont partis sans gloire de Kaboul et des montagnes afghanes, abandonnant les Afghans avec leurs Talibans !

 

Une responsabilité africaine

 

Mais la France ne quitte pas militairement le Sahel. Elle y est, et y restera avec ses partenaires américain et européens [la France sera désormais engagée au Sahel au sein d’une coalition internationale, en appui aux armées locales]. Avec la fin de Barkhane, c’est la fin d’une époque et d‘un leurre, celui qui faisait croire que la guerre contre le terrorisme était en train de se gagner.

Quant à ces dirigeants africains, ils feignent toujours, pour des intérêts personnels et très égoïstes, d’ignorer que la sécurité et la défense de leurs pays respectifs constituent des domaines hautement de souveraineté. Prennent-ils seulement conscience que les terroristes seront plus que jamais maîtres de ces zones, dont celle dite des “Trois frontières” que partagent le Mali, le Burkina Faso et le Niger ?

Certes, les armées nationales pourraient jouer les épouvantails, mais sont-elles seulement équipées convenablement pour faire face à l’hydre terroriste ? Qui plus est, comment se débrouillera le renseignement, talon d’Achille des forces armées des pays du G5 Sahel ? À moins que “l’alliance internationale” évoquée par Emmanuel Macron, au lieu de se lancer dans une nouvelle aventure, apporte une réponse concrète à la survie des pays écumés par les terroristes, en renforçant le G5 Sahel.

En tout cas, il est temps que les Africains, prennent leurs responsabilités et replient les bras qui tiennent la sébile, que ce soit en direction de la France, de la Russie, de la Chine ou des États-Unis.

Morin Yamongbe
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