Zone grise – En Centrafrique, les mercenaires russes accusés d’exactions

Ils combattent les rebelles aux côtés des forces armées du régime, mais sont devenus la terreur des civils. Viols collectifs, arrestations arbitraires, exécution de civils… Les méthodes sanguinaires des mercenaires russes ont fait des centaines de victimes. Le président Touadéra va-t-il se séparer de ses alliés pour protéger son peuple ? s’interroge Le Pays.

Ils sont officiellement considérés comme des “instructeurs”, mais d’aucuns les présentent comme des mercenaires”. Il s’agit de Russes qui combattent depuis 2018 aux côtés des forces armées centrafricaines, qui faisaient face à une coalition de rebelles armés. Perçus au départ comme des sauveurs, ces “mercenaires russes” défraient la chronique tant ils font l’objet de graves accusations, selon plusieurs rapports onusiens.

“Exécutions sommaires massives, détentions arbitraires, tortures pendant les interrogatoires, disparitions forcées, déplacements forcés de populations civiles, violations du droit à la santé, attaques croissantes contre des acteurs humanitaires, viols collectifs.” Ce sont, entre autres, les exactions dont se seraient rendus coupables ceux auxquels le président centrafricain, Faustin-Archange Touadéra, a fait appel pour réduire la voilure des rebelles qui menaçaient de descendre jusqu’à Bangui.

Des sauveurs devenus “pire que les rebelles”

 

Depuis lors, la population centrafricaine vit la peur au ventre, consciente qu’elle peut, à tout moment, rencontrer le chemin de ces “spécialistes de la mort” dont on dit qu’ils sont disséminés à travers le territoire national, souvent même présents aux postes de contrôles et autres endroits stratégiques.

 

C’est le cas, par exemple, de cette jeune fille qui dit avoir été victime d’un viol collectif durant toute une nuit, de la part de mercenaires russes qui l’ont enjointe de garder le silence sous peine de représailles. On oublie volontiers les cas de saccages, de pillages et d’occupation de bâtiments publics sur fond de déportations. Tant et si bien que l’on se demande si les Centrafricains sont aujourd’hui plus en sécurité qu’ils ne l’étaient au moment des incursions des rebelles.

Alliés du pouvoir

 

On dit souvent qu’entre deux maux il faut choisir le moindre. Mais dans le cas d’espèce, les Centrafricains n’ont aucun choix à faire dans la mesure où les “instructeurs russes” qui étaient censés les protéger sont en train de faire autant sinon pire que les rebelles qui, eux, procédaient à de simples menaces, taxations et arrestations. Alors, question : le président Touadéra va-t-il laisser ses compatriotes continuer à souffrir le martyre ou va-t-il prendre le risque de se séparer des mercenaires russes qui l’aident à sécuriser son pouvoir ?

 

En tout cas, tout porte à croire que ce n’est pas demain la veille que les Russes partiront de la Centrafrique, et cela au regard de la campagne de communication active engagée par des autorités pour soutenir leur action sur le terrain. Toutefois, il faut savoir raison garder. Car, à l’allure où vont les choses, il faut craindre qu’à force d’exactions sur les populations les mercenaires russes ne finissent par rendre sympathiques les rebelles qui, pour la plupart, sont des Centrafricains. C’est donc un couteau à double tranchant que les autorités banguissoises se doivent de manipuler avec dextérité au risque de se couper les doigts.

Boundi Ouoba
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“La peur à la vue d’un homme blanc en tenue militaire”

 

Ils disent être seulement 535 et assurent ne pas combattre. Pourtant, sur place, on estime que ces mercenaires russes sont jusqu’à quatre fois plus nombreux, et on les accuse d’un usage excessif de la force. Une enquête de RFI, reprise par de nombreux médias africains, dévoile les dessous de méthodes brutales et le muselage des victimes par la menace de représailles.

Ces hommes de Moscou sont, depuis 2018, de fidèles alliés de l’armée centrafricaine dans la lutte contre la progression des groupes rebelles, qui mènent des offensives contre le pouvoir central depuis la guerre civile (2013-2014). RFI a eu accès à des documents internes des Nations unies dont les conclusions sont édifiantes. Ils révèlent que les victimes d’exactions de ces hommes se comptent par centaines.

On recense au moins “26 exécutions extrajudiciaires, 5 viols ainsi que 27 cas d’arrestations arbitraires”. Lorsqu’ils ouvrent le feu, les militaires russes ne font pas la différence entre les civils et les rebelles. Cet habitant de Bambari raconte à RFIle jour où ils ont surgi dans une mosquée : “L’imam a dit : ‘Couchez-vous ! Couchez-vous !’ Puis les Russes ont commencé à tirer n’importe où. J’étais dépassé. Il y avait des femmes et des enfants.” S’ils avaient un temps revêtu les habits de sauveurs aux yeux de la population, ils sont devenus des prédateurs. “Je pensais que les Russes étaient là pour nous secourir”, lance cette femme de 24 ans, victime d’un viol collectif par trois d’entre eux. Aujourd’hui, “elle dit ressentir de la peur à la seule vue d’un homme blanc en tenue militaire”, raconte RFI. Autant d’informations démenties par l’ambassade de Russie en Centrafrique, qui déplore “la propagation de fausses nouvelles”.

Source : Courrier international

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