Disparition de Diary Sow : « Elle est partie de son plein gré, il n’y a rien d’autre à ajouter »

L’étudiante sénégalaise, disparue depuis le 4 janvier, a fait savoir qu’elle allait bien, tout en prévenant qu’il ne fallait pas chercher d’« explication rationnelle » à son acte.

Diary Sow « va bien », selon son parrain, Serigne Mbaye Thiam, le ministre de l’eau et de l’assainissement du Sénégal. Cette jeune étudiante de 20 ans, en deuxième année de classe préparatoire scientifique au lycée parisien Louis-le-Grand, n’avait plus donné signe de vie depuis le 4 janvier.

Depuis, la disparition de la « meilleure élève » du Sénégal avait bouleversé son pays et d’autres nations africaines. En France, les services consulaires, sur ordre direct du président sénégalais Macky Sall, et la diaspora se sont mobilisés comme jamais pour tenter de la retrouver. Une enquête pour « disparition inquiétante de majeur » a été confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) de la police judiciaire parisienne. Celle-ci privilégiait, depuis quelques jours, la piste d’une disparition volontaire, ce qui semble bien être le cas.

En effet, jeudi 21 janvier au soir, Serigne Mbaye Thiam a publié sur son compte Twitter, avec l’accord de la famille, des extraits d’une lettre qu’il a reçue de Diary Sow et dans laquelle elle « brise le silence » après plusieurs échanges ces derniers jours. Dans cette missive adressée à cet ancien ministre de l’éducation nationale – et dont le contenu est pour le moins mystérieux –, Diary Sow assure être « partie librement ». « Je ne me cache pas. Je ne fuis pas. Considère cela comme une sorte de répit salutaire dans ma vie, écrit-elle. Si je ne m’étais pas manifestée jusqu’à présent, c’est pour la simple raison que j’étais dans l’impossibilité de le faire. »

 

Une « petite pause pour retrouver mes esprits »

 

La jeune femme ne donne pas plus d’explication sur les raisons de son départ. Elle fait comprendre qu’elle a eu un « désir irrépressible, irraisonné et si profondément irrationnel » de faire une « petite pause, pour retrouver mes esprits ». Ce désir n’aurait rien avoir avec la difficulté de ses études.

Issue d’une famille modeste de Malikounda, près de Mbour (ouest), titulaire d’une bourse d’excellence, elle affirme n’avoir pas « disjoncté » à cause de la pression de la prépa comme d’autres boursiers ont pu souffrir des sacrifices consentis pour intégrer les prestigieuses écoles françaises. « Il ne s’agit ni de surmenage, ni de folie, ni de désir de liberté. (…) Je n’aurais jamais cru que mon nom allait alimenter autant de débats, qu’autant de gens allaient s’inquiéter », précise-t-elle.

 

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Diary Sow se dit « en sécurité » et affirme être « terriblement, profondément désolée ». « Ceux qui cherchent une explication rationnelle à mon acte seront déçus, puisqu’il n’y en a aucune, écrit-elle. Contrairement à ce que les gens semblent penser, aux paroles qu’on me prête, je ne renonce pas à ma vie d’avant. Je ne suis pas désolée d’être partie, je suis désolée des gênes occasionnées par mon départ et des gens que j’ai fait souffrir. »

Ces nouvelles données par l’étudiante suscitent l’incompréhension de certains, tout en rassurant ceux qui s’étaient le plus inquiétés. « Nous sommes soulagés pour sa famille, pour le peuple sénégalais et pour les étudiants qui se sont fortement mobilisés », réagit Marie-Louise Ndong, chargée du suivi des boursiers d’excellence au sein du Service de gestion des étudiants sénégalais à l’étranger (SGEE), rattaché à l’ambassade du Sénégal à Paris.

 

« Il faut lui donner le temps de revenir »

 

« Elle est partie de son plein gré, il n’y a rien d’autre à ajouter. Je lui souhaite le meilleur et tout ce qu’elle veut dans sa vie », ajoute Thierno Laye Fall, le président de la Fédération des étudiants et stagiaires sénégalais de France (Fessef). L’étudiante a aussi eu une « prise de contact » avec la police judiciaire, a annoncé l’AFP et elle est « libre de ses mouvements et [de ses] choix », a précisé cette source proche du dossier.

 

Il y a quelques jours encore, en apprenant que la piste criminelle était écartée et que Diary Sow aurait volontairement pris le large, certains diplomates des services consulaires et des étudiants sénégalais se sont demandé s’ils n’étaient pas allés trop loin dans la mobilisation pour la retrouver.

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« Cela a dû lui faire peur », avait souligné l’un d’eux. Ces derniers temps, la ligne était de moins parler à la presse et cesser les actions médiatiques « pour faire retomber la pression » et « l’aider à revenir sans qu’elle se fasse lyncher sur les réseaux sociaux ». « On ne regrette rien de ce qui a été fait. Cet acte de solidarité devait exister. Nos actions ont permis d’avoir des éléments indiquant un départ volontaire », explique Thierno Laye Fall.

Désormais, un seul message est martelé : laissez Diary Sow « tranquille ». « Il faut arrêter les spéculations et les rumeurs. Il faut lui donner le temps de revenir. Si elle veut nous expliquer la raison de son départ, elle le fera, mais elle n’est pas obligée de le faire », argue Mme Ndong. « Vos encouragements ont aidé Diary à surmonter cette période difficile, a commenté le ministre Serigne Mbaye Thiam. A présent, elle a besoin de sérénité. Elle écrira certainement. » Sans doute, même si beaucoup vont continuer à se demander où se trouve Diary Sow.

Mustapha Kessous

Source : Le Monde

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