Editorial : 60 ans d’indépendance dans la dépendance

L’accession de la Mauritanie à la souveraineté internationale, le 28 novembre 1960 est en soi un événement de taille. Soixante après il convient de se demander qu’est-ce que cette indépendance octroyée par la France a apporté au pays des hommes bleus ? Pas grand-chose  serait-on tenté de dire.

Cette séquence de l’histoire de notre pays se divise en deux grandes étapes. La première qui s’étale de 1960 à 1978 est considérée à juste titre comme l’âge d’or d’un Etat mauritanien sorti du néant grâce à la volonté inébranlable d’un groupe de pionniers et de bâtisseurs devant l’éternel, un groupe dirigé par le père de la nation, Me Mokhtar Ould Dadah. En effet malgré le maigre héritage laissé par la France, un héritage qui se réduit à la potion congrue Mokhtar et ses hommes ont réussi à bâtir un Etat qui s’est imposé dans le concert des Nations.

Et pourtant cela est loin d’être évident et relève plutôt de l’exploit. Le contexte international était loin d’être favorable et les revendications marocaines sur la Mauritanie n’étaient pas pour arranger les choses et faciliter la tâche aux dirigeants de l’époque. En effet la Mauritanie avait sur le dos tous les pays arabes et le 23 août 1960, les Etats de la Ligue Arabe avaient adopté une résolution soulignant « que la Mauritanie faisait partie intégrante du Maroc ».

Mais les pionniers en patriotes convaincus ont su relever tous les défis inhérents à la création d’un Etat moderne et l’édification de la capitale Nouakchott en est un exemple vivant.

Bien vrai que le bilan économique durant cette période ne fut pas terrible mais les mauritaniens vivaient plus ou moins bien des produits de l’agriculture et de l’élevage. Par ailleurs l’aide alimentaire internationale constituait un appoint appréciable et cette aide n’était pas détournée comme cela est souvent le cas aujourd’hui et arrivait jusqu’aux populations.

La guerre du Sahara a constitué un grand handicap pour l’économie ainsi que les velléités de Me Mokhtar Ould Dadah de desserrer l’étau de la tutelle de la France avec la nationalisation de la MIFERMA et la création de l’Ouguiya.

Quoiqu’il en soi, les mauritaniens dans leur grande majorité considèrent que cette période est la meilleure aussi bien dans le domaine de la gouvernance que dans celui du bien-être général de la population.

1978-2020 : Putschs, Révolutions de Palais, simulacre de démocratie et mauvaise gouvernance

L’avenir de la Mauritanie a basculé le 10 juillet 1978 date du premier coup d’état militaire, le premier d’une longue série de putschs et autres révolutions de palais qui ont émaillé l’histoire du pays qui figure en bonne place sur ce plan dans le Guinness des records.

L’installation de l’armée au pouvoir a signé le glas de l’évolution et du développement du pays. Cela s’est traduit par un pilotage à vue qui a annihilé tout progrès. L’économie a été mise en coupe réglée et l’unité nationale mise à rude épreuve. Bref tous les ingrédients d’un cocktail explosif qui d’ailleurs a explosé par moments (événements de 1989, Passif humanitaire…) menaçant à chaque fois à un glissement vers l’inconnu.

La démocratie importée et imposée en 1991 n’a fait que compliquer les choses. Ce fut juste un échappatoire pour les officiers qui se sont appropriés le pouvoir. Désormais il leur suffisait de remplacer le treillis par la costume et le tour était joué. Et la mascarade se poursuit encore en 2020 et elle semble être la panacée.

Et pendant ce temps le peuple mauritanien crève de faim et de misère. Ses immenses richesses sont bradées et la corruption bat son plein. Les rapports internationaux et nationaux pleuvent et se ressemblent. Et le dernier rapport de la Commission d’Enquête Parlementaire a mis en exergue l’ampleur du pillage des ressources nationales. Et le comble c’est que ces pillards sont connus de tous et sont intouchables. D’ailleurs ils occupent des postes et narguent la communauté nationale.

Ne crie-t-on pas sur tous les toîts que le régime actuel du président Ghazwani est venu pour réconcilier la Mauritanie avec elle-même et sortir le pays de la mauvaise passe dans laquelle il se trouve ?

Les mauritaniens commencent à désespérer et le sursis est en passe d’expirer. Ils en ont assez d’assister au même cirque, à la méthode Aziz. Ils ont hâte de voir la méthode Ghazwani sur laquelle tous les espoirs sont fondés.

Soixante ans après la Mauritanie qui a les côtes les plus poissonneuses du monde ne produit même pas un petit pot de sardines.

Le fer mauritanien avec sa grande teneur est toujours bradé à l’Etat brut. Il en est de même pour l’or qui est à la merci de Kinross.

Les immenses étendues arables sont laissées en jachère et même pour avoir des légumes ou des fruits il va falloir les importer.

On ne produit quasiment rien et notre économie est totalement extravertie.

Le temps est venu pour la Mauritanie de faire son introspection quitte même à adopter un remède de cheval pour sortir des ténèbres et enclencher un véritable décollage économique fondé sur ses énormes potentialités. La balle est dans le camp du président Ghazwani.

Bakari Guèye

Source : Initiatives News  

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