Médias – Au Cameroun, un journaliste tué, l’armée à nouveau accusée

Les autorités camerounaises n’ont pour l’instant pas réagi à l’annonce de la mort de Samuel Wazizi. Accusé de complicité avec les séparatistes anglophones, le journaliste avait été arrêté par l’armée il y a dix mois. Certaines sources affirment qu’il a succombé à des tortures.

4 minutes 44 après le début de son journal, le présentateur du journal de 20 heures d’Equinoxe TV annonce la nouvelle mardi 2 juin : “Après la détention au secret de ce journaliste et l’absence totale de nouvelle, Equinoxe TV révèle en exclusivité que Samuel Wazizi est mort. Selon des sources proches de la haute hiérarchie militaire, à la suite de son arrestation à Buea, il a subi des sévices à tel point que son état de santé s’est dégradé.

Trois jours plus tard, face à l’ampleur de la polémique, le journal Essingan, pourtant proche du pouvoir, titre sur “la vérité étranglée”.

Cela faisait plus de dix mois que personne n’avait eu de nouvelle de ce journaliste qui travaillait pour la chaîne de télévision régionale Chillen Media Television (CMTV). Samuel Wazizi avait été arrêté en août 2019 et accusé “d’intelligence avec les miliciens séparatistes qui mènent depuis quatre ans une guerre pour l’indépendance des régions anglophones du pays”, rappelle Actu Cameroun. Depuis, ni sa famille ni ses avocats n’avaient eu accès à lui. L’inquiétude est devenue plus forte encore lorsque, le 28 mai dernier, il n’a pas été présenté devant la justice qui le convoquait.

Un conflit devenu zone grise

 Une du journal camerounais The Voice, le 5 juin 2020
Une du journal camerounais The Voice, le 5 juin 2020

 

 

Bavure ou meurtre ? Les conditions de la mort de ce reporter restent obscures. Si des sources haut placées ont confirmé à des médias camerounais et à Reporters Sans Frontières la mort de Samuel Wazizi, officiellement il n’y a toujours aucun commentaire. “Yaoundé toujours muet sur la mort du journaliste Samuel Wazizi”, titre ainsi Actu Cameroun, déplorant “un silence de cimetière”.

Une attitude qui semble difficile à tenir encore longtemps face à la vague d’indignation dans le pays. Tel que le note The Voice, des organisations des droits de l’homme aux opposants politiques, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour réclamer la lumière sur cette affaire.

L’embarras est palpable alors que les rares échos de la guerre que livre le Cameroun dans ses régions anglophones mettent régulièrement en cause les agissements de l’armée. En février dernier, 23 civils avaient été retrouvés morts calcinés à Ntumbo, dans le Nord-Ouest. Après avoir nié leur implication, les autorités avaient été contraintes de reconnaître la culpabilité de militaires, face à l’émotion et aux preuves du massacre.

Anna Sylvestre-Treiner

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page