Entre pêche illégale et traite d’êtres humains, les eaux internationales constituent un espace de non-droit que les institutions ont toutes les peines à réguler.
Les océans de la planète ont toujours fait rêver. Espaces de liberté et d’aventure, ils attirent les explorateurs et exploratrices du monde entier. Mais derrière cette image de petits paradis bleus se cachent des secrets bien plus sombres. Car sur Terre, il existe encore des lieux où le droit international est bafoué et où règne la loi du plus fort, et la haute mer en fait partie.
Celle-ci représente plus de 60% des mers et océans du globe et n’est placée sous la juridiction d’aucun État. Elle commence au-delà de la limite extérieure des zones économiques exclusives (ZEE), située à 200 milles nautiques des côtes.
En haute mer, «c’est le Far West», affirme Lamya Essemlali, présidente de Sea Shepherd France: «Ce sont des zones où il y a des enjeux économiques importants. Cela attire les convoitises», précise-t-elle.
La tragédie des océans? «Le flou juridique qui les entoure», répond Ian Urbina, ancien grand reporter au New York Times et auteur de La Jungle des océans. «Ils appartiennent à tout le monde et ils n’appartiennent à personne, expose-t-il. Parce qu’ils appartiennent à tout le monde, personne ne veut prendre la responsabilité de les protéger.»
En perpétuel mouvement
La pêche illégale est l’un des fléaux des espaces maritimes. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la consommation annuelle moyenne de poisson était en 2016 de plus de 20 kilos par personne, le double d’il y a cinquante ans.
Face à ce juteux marché, la pêche «INN» (illégale, non autorisée ou non déclarée) représente 20% à 30% des activités dans le secteur, soit un chiffre d’affaires estimé entre 10 et 20 milliards de dollars par an.
«Si vous envisagez de commettre un crime, vous allez étudier deux facteurs: puis-je gagner de l’argent et puis-je le faire impunément? Vous pouvez gagner beaucoup d’argent avec les poissons, et vous pouvez le faire en toute impunité», résume Ian Urbina.
«On n’a pas le droit de tout faire en haute mer, tempère Julia Tasse, chercheuse à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). Il faut que cela reste dans le cadre de la convention des droits de l’homme, du droit international et des conventions qui le sous-tendent.»
Pour espérer réguler ces activités, plusieurs organismes ont été créés. «Il existe des organisations régionales de gestion de la pêche, qui regroupent plusieurs États et tentent de poser un cadre aux activités de pêche dans une région donnée», détaille la chercheuse.
Julia Tasse reconnaît néanmoins que la législation est complexe à mettre en place, «notamment parce que l’océan est un espace mouvant. Les poissons se déplacent; des espèces à fort intérêt connaissent des mouvements de migration. Par exemple, pour le thon, des organisations dépendant de la FAO essaient d’estimer les stocks et d’avoir un suivi des pêches de thon sur des zones beaucoup plus larges que les organisations régionales des pêches, comme l’océan Atlantique ou l’océan Indien».
Source : Slate (France)
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