Mauritanie : Samba Thiam tance Ahmed Ould Sidi Baba

Au moment où le retour de l’ancien président Ould Taya en Mauritanie profile à l’horizon c’est la sortie médiatique d’un de ses anciens ministres avec sa contribution sur la question nationale qui continue de susciter des polémiques au sein de l’opposition mauritanienne. Parmi les plus pertinentes celles du président des FPC dont les propos résonnent en lui par leur ton comme en écho à ceux de 86.

Ce n’est pas une vue de l’esprit. Le chef de tribu et ancien ministre a occupé d’importantes responsabilités politiques sous le régime de Ould Taya. En 86 les FLAM ( Forces de libération africaine de Mauritanie) publièrent le Manifeste du négro mauritanien opprimé. Une critique contre le racisme d’Etat pour la première fois présentée à l’opinion nationale et internationale. Les dirigeants sont arrêtés jugés rapidement avant d’être transférés à la prison de Oualata d’où quatre combattants de la liberté ne reviendront jamais. Parmi les survivants Samba Thiam qui va choisir dans un premier temps l’exil aux Etats-Unis avant dans un second temps de revenir au bercail en 2013. Le chef historique du premier mouvement de libération africaine en Mauritanie se souvient encore de la réponse de l’ancien ministre à un journaliste de RFI sur la situation agitée qui pointait les militants Flamistes comme des jeunes en mal de notoriété.

C’est un passé lointain mais vivant aujourd’hui dans l’esprit de Ibrahima Moctar Sarr président de l’AJD-MR deux fois candidats malheureux aux présidentielles et Samba Thiam président des FPC dont le combat contre le pouvoir a traversé les frontières du pays. En proposant des solutions pour sortir le pays de la difficile cohabitation Ahmed Ould Sidi Baba apparaît comme un repenti rattrapé par l’histoire. Sa contribution rejoint les thèses maintes fois défendues par les deux chefs charismatiques afro-mauritaniens sur la scène nationale. Malgré cette convergence de vue sur certains points il n’en demeure pas moins une divergence sur d’autres points. Par exemple Samba Thiam relève une contradiction entre tantôt ce que l’ancien ministre propose comme solution une nation, l’unité nationale et tantôt cette même nation à construire à forger ou tantôt reconnue comme vivante. C’est toute l’ambiguïté de l’Etat-Nation en fait qui n’existe pas en Mauritanie plus exactement depuis l’avènement des militaires au pouvoir en 78. Une construction avait été amorcée après les indépendances en 1960 par le père de la nation feu Mokhtar Ould Daddah.

L’enseignant Samba Thiam sait de quoi il parle. Même l’argument de la religion utilisé à bon escient ne tient pas la route puisque l’islam est utilisé pour imposer la langue arabe comme instrument de domination culturelle sur les autres composantes nationales. D’autres faiblesses d’argumentations tournent autour de l’indépendance de justice. C’est le talon d’Achille de tous les gouvernements successifs depuis 78. Les locataires du palais de Nouakchott ont fait de la justice leur chasse-garder pour l’instrumentaliser à des fins politiques. Pas d’exception à la règle pour Ould Ghazouani.

Cette absence de critique même sur la diversité et l’accaparement des terres agricoles du sud au profit des investisseurs arabes, les séquelles de l’esclavage utilisées par les différents régimes comme fonds de commerce, le racisme d’Etat à ciel ouvert au sein de l’armée et dans toute l’administration sont autant de zones d’ombre soulignées par le président des FPC qui reste dubitatif quant à l’esprit de renouveau auquel Ould Sidi Baba appelle de tous ces vœux sous le régime de Ould Ghazouani.

Cherif Kane

Coordinateur journaliste

 

(Reçu à Kassataya 16 novembre 2019)

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