Petit tour du continent des techniques, parfois ancestrales, pour se protéger des fortes chaleurs.
La canicule qui sévit en France ces jours-ci est un phénomène climatique familier dans de nombreux pays d’Afrique. Un continent où la climatisation s’installe peu à peu mais demeure un luxe réservé aux plus aisés. Pour résister à la chaleur, la population adapte son rythme et use de techniques éprouvées depuis des générations
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Au Burkina Faso, on se plie au cycle du soleil
Dans ce pays qui compte parmi les plus ensoleillés d’Afrique de l’Ouest, les températures avoisinent les 40 °C de mars à mai et peuvent même dépasser les 45 °C dans la région du Sahel (nord). Chacun prend son mal en patience en guettant l’arrivée du « beau temps », comme on appelle les premières pluies. Pour apprivoiser ce climat extrême, les habitants adaptent leur rythme quotidien au cycle du soleil. Au Burkina Faso, les journées commencent vers 5 ou 6 heures, afin de profiter des derniers moments de fraîcheur nocturne. Dès midi, on préfère se calfeutrer, volets fermés, dans son bureau ou à la maison pour faire une sieste après le déjeuner.
Les citadins évitent de marcher dans la fournaise des rues l’après-midi, quand l’air s’emplit d’une drôle d’odeur de goudron et de sable brûlant. Ceux qui doivent malgré tout se déplacer, le plus souvent en vélo ou à moto – les voitures climatisées restent un luxe –, s’en remettent aux vendeurs ambulants de sachets d’eau, d’éventails ou encore de mouchoirs pour s’éponger le front. Les plus aisés équipent leur domicile de l’air conditionné, les autres se contentent de ventilateurs. Mais il faut encore composer avec les coupures d’électricité et d’eau, quasi quotidiennes pendant la saison chaude et qui sont la hantise des Burkinabés.
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Au Cameroun, on dort à l’extérieur ou près de l’eau
La partie septentrionale du Cameroun est la plus exposée aux fortes chaleurs durant la saison sèche, de novembre à avril. Une période au cours de laquelle les habitants rivalisent d’ingéniosité pour échapper à la canicule à peu de frais. Dans la région de l’Extrême-Nord, le mercure peut frôler les 47 °C à l’ombre. L’accès à l’électricité demeure un luxe dans cette région parmi les plus pauvres du pays.
Pour se protéger, les habitants « n’ont pas changé leurs habitudes depuis des décennies », rapporte Daïrou Hamidou, journaliste à Equinoxe TV. Pendant la journée, abrités sous les acacias qui bordent les rues et les cours des maisons, ils se rafraîchissent à l’aide d’éventails traditionnels en plumes de canards ou en paille. Une fois la nuit tombée, ils dorment le plus souvent à l’extérieur sous des « danki », ces auvents ouverts aux quatre vents, étalant leur natte à même le sol sablonneux. Dans les villages les plus reculés, établis sur des terres désertiques, certains passent même la nuit près des points d’eau.
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Au Sénégal, on porte le boubou et on boit du thé
Dans les pays du Sahel, des siècles de nomadisme ont donné naissance à des techniques éprouvées, comme le port de vêtements amples, de couleur claire, en coton ou en lin, et le moins possible en fibres synthétiques. Au Sénégal, le boubou fait des merveilles : chaque pas crée un courant d’air qui gonfle la tenue et rafraîchit. On en superpose parfois les couches afin d’augmenter l’effet. Dans les campagnes, les habitants portent aussi un chapeau conique en paille qui évacue efficacement la chaleur, connu sous les noms de « tengade » chez les Peuls ou « gaban » chez les Bambara.
Eté comme hiver, les Sénégalais ont l’habitude de boire l’« ataya ». Ce thé vert traditionnel, véritable suc que l’on réduit sur un réchaud de charbon, est servi mousseux, en trois fois, comme le veut la coutume. Le premier « amer comme la mort », le deuxième « doux comme la vie » et le troisième « sucré comme l’amour ». Il se révèle un véritable allié pendant les périodes de canicule. Une boisson chaude en plein été peut sembler contre-intuitif, mais les nomades sahéliens savent depuis longtemps qu’un tel breuvage facilite la sudation et hydrate le corps tout en le rafraîchissant.
Aujourd’hui, la plupart des foyers sénégalais possèdent un ventilateur, parfois couvert d’une serviette humide. Mais en brousse, dans les maisons sans électricité, il est d’usage de passer les nuits de canicule en famille à l’extérieur, en installant les matelas sur la terrasse ou sur le toit.
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En Tunisie, on travaille moins longtemps
Chaque année en Tunisie, à l’aube du mois de juillet, le débat refait surface. Faut-il annuler ou maintenir la « séance unique » ? L’expression désigne une organisation particulière de la journée de travail qui remplace, du 1er juillet au 31 août, le classique 8 heures-17 heures. Systématique dans le secteur public, cette mesure est au bon vouloir des patrons du secteur privé. Dans la pratique, la majorité des entreprises s’adaptent pendant la saison estivale, comme elles le font aussi durant le ramadan.
A partir du 1er juillet, les administrations ouvrent donc leurs portes dès 7 h 30 et les ferment à 14 heures, du lundi au jeudi. Le vendredi, la journée finit même une heure plus tôt, prière hebdomadaire oblige. Ce rythme allégé ne fait pourtant pas l’unanimité. En mars 2018, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie a proposé de supprimer la séance unique pour soutenir la croissance économique et la création de richesse.
Source : Le Monde
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