En moins de quarante huit heures, le nouveau premier ministre, Ahmed Salem Ould Béchir a ‘’formé’’ son gouvernement. Sans grande surprise. Ceux qui s’attendaient à un grand chambardement ont été certainement déçus.
Le remaniement attendu a été juste une flopée de permutations entre anciens ministres dans des départements copiés-collés faits et défaits dans la précipitation au gré de la volonté de faire du surplace. Parmi les nouveaux il ya Djinda Ball promue à la jeunesse et sports. Pour cette native Halpoular de Kaédi, femme d’affaires et de communication qui parrainait le magazine Epok, c’est une nouvelle expérience pour cette jeune femme qui milite à l’Union Pour la République.
L’entrée la plus emblématique et peut être la plus inattendue est celle du général Ghazouani au gouvernement en tant que ministre de la défense. Pour cette fois quand même, c’en est véritablement un. Ce général très discret, compagnon de route du président Aziz et que toutes les rumeurs donnaient comme son dauphin a été muté,- pour cause de retraite, d’une position stratégique de chef général des forces armées à celle plus protocolaire de ministre de tutelle de toute l’institution militaire qui tient en otage le pays depuis quarante ans. Selon les observateurs, la nomination de Ghazouani à la défense repose la question de savoir si Aziz quittera effectivement le pouvoir en 2019 et le cas échéant qui va le remplacer à la présidence de la république.
A la veille des élections municipales, régionales et législatives, Ould Abdel Aziz avait dit à ses ministres au cours d’un conseil que ceux qui ne feront pas montre de popularité vont quitter. Or, parmi ceux qui seront restés, plusieurs ont été platement battus chez eux. C’est entre autres le cas d’Amédi Camara et d’Isselmou Ould Sid’El Moktar Ould Lehbib qui ont été battus respectivement à Kaédi et El Kediya (Tagant). La sortie sans appel de Mohamed Abdallahi Ould Oudaa, de Diallo Mamadou Bathia, de Coumba Bâ, de Mint Soueine’e et du tonitruant Mohamed Lemine Cheikh fait penser à une cynique politique de deux poids, deux mesures. Naha Mint Mouknass, présidente du deuxième parti de la majorité et nouvellement élue députée, a été envoyée au pilori. Elle n’a certainement pas demandé à être parachutée à la tête de l’un des départements les plus compliqués de la république. Le retour au gouvernement de Sidi Mohamed Ould Maham comme ministre de la culture et porte parole du gouvernement est une autre preuve que Mohamed Ould Abdel Aziz place ses hommes forts à des postes stratégiques dans la perspective de quelque chose.
Les titulaires des ministères régaliens n’ont pas changé. Les calculs des adversaires internes de l’irracontable ministre de l’économie et des finances sont tombés à l’eau. La dernière défaite de l’UPR à Arafat ne semble pas avoir impacté sur la confiance que Ould Abdel Aziz voue au très controversé Moktar Ould Diay. La fusion entre l’agriculture et l’élevage qui redeviennent ministre du développement rural replonge le pays dans les années quatre vingt. Surtout que selon un docteur vétérinaire, la séparation de ces deux secteurs a permis de faire de grosses avancées. L’éclatement du ministère de la modernisation de l’administration et de la formation professionnelle dont une partie a été rattachée à l’éducation nationale (formation professionnelle) et une autre (modernisation de l’administration) à la fonction publique, au travail et à l’emploi démontre que c’est l’improvisation et l’amateurisme qui prévalent en lieu et place de la vision stratégique sur la base de laquelle la mouture des départements sectoriels devrait être conçue. Jusque là deux postes très importants sont vacants et devraient être pourvus rapidement.
Aux commandes des forces armées et de sécurités deux noms sont avancés. On parle des généraux Mohamed Ould Meguett et Dah Ould El Mamy, respectivement patron de la direction générale de la sureté nationale et des douanes. Alors que pour la direction de l’Union Pour la République, le vice-président de l’Assemblée Nationale, Boidiel Ould Houmeid qui vient de dissoudre son parti dans celui du pouvoir serait pressenti. A quelques six mois de la présidentielle, Mohamed Ould Abdel Aziz ne semble pas encore avoir complètement muri son plan.
La recomposition de la scène politique a cependant commencé avec le sabordement de certains partis. Les formations de l’opposition (RFD, UFP et Tawassoul) n’ont pas encore repris le souffle après des élections municipales, législatives et régionales aux résultats mitigés. Mais le temps n’attend pas. Cela va sans dire. Mais cela va encore mieux en le disant.
Sneiba El Kory
Source : Le Calame (Le 31 octobre 2018)
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