Ce mardi est publié un rapport sur la disparition des espèces. Encore un, peut-on penser. Mais la presse insiste, la dernière étude du WWF est un cri d’alarme, rappelant que la sauvegarde de la biodiversité est aussi vitale que celle du climat.
«Planète vivante» est un rapport que le Fonds mondial pour la nature, le WWF, publie tous les deux ans. Et sa douzième et dernière édition, publiée aujourd’hui, est terriblement inquiétante – «60% des animaux sauvages ont disparu en quarante-quatre ans» titre sèchement Le Figaro. «Si la population humaine déclinait dans les mêmes proportions cela signifierait vider de leurs habitants l’Amérique du Nord, l’Amérique du Sud, l’Afrique, l’Europe, la Chine et l’Océanie. Voilà l’ampleur de ce que nous avons commis», explicite Mike Barrett, directeur exécutif du WWF dans The Guardian. Une extinction de masse, commise par l’homme.
Pour son rapport, le WWF utilise les données provenant du suivi de 16 704 populations de vertébrés – mammifères, oiseaux, poissons, reptiles et amphibiens, représentant 4000 espèces. Il y a quatre ans, le déclin de la biodiversité était de 52%, il est donc passé à 60%. «La vérité choquante est que la destruction de la nature continue, à un rythme soutenu. Or la nature sauvage et les écosystèmes sont vitaux pour l’être humain, continue The Guardian, citant le professeur Bob Watson. La destruction de la nature est aussi dangereuse que le changement climatique.»
Les activités humaines en cause
«Le recul des effectifs est en moyenne de respectivement 23% et 31% dans les zones néarctique (Amérique du Nord) et paléarctique (Europe, nord de l’Afrique, nord de l’Asie et Moyen-Orient), précise Le Monde. Il atteint 56% dans la région afrotropicale (Afrique subsaharienne) et grimpe à 64% dans le bassin indo-pacifique (Inde, Indonésie et Australie), pour culminer à 89% dans l’aire néotropicale (Amérique du Sud et Amérique centrale). Au-delà du sort d’espèces emblématiques, comme les éléphants d’Afrique, les orangs-outans de Bornéo ou les manchots Adélie, que le rapport cite en exemple, c’est l’ensemble de la vie sauvage qui dépérit sous toutes les latitudes.»
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«Explication première, la perte des habitats, avec l’agriculture intensive, l’extraction minière, l’urbanisation… qui poussent à la déforestation, à l’épuisement ou à l’artificialisation des sols», détaille l’AFP dans une longue dépêche très complète, reprise par plusieurs médias.
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«Mondialement, seuls 25% des sols sont exempts de l’empreinte de l’homme; en 2050 ce ne sera plus que 10%, selon les scientifiques de l’IPBES (le «GIEC de la biodiversité»). S’ajoutent à cela surpêche, braconnage, pollutions, espèces invasives, maladies, dérèglement climatique…» N’en jetez plus. Un rapport «damnant», selon CNN. Qui a aussi noté dans le rapport ce chiffre effarant de 90% des oiseaux de mer dans l’estomac desquels on retrouve du plastique – contre 5% en 1960…
Une question vitale comme celle du climat
En Inde, en Irlande, partout, l’ensemble de la presse s’affole et se retrouve sur la gravité des chiffres. Trop tard ou pas? «Le WWF réclame un accord global pour la nature comme celui pour le climat, rappelle Time Magazine, et rappelle que nous sommes la première génération à avoir une claire vision des choses, et peut-être aussi la dernière qui puisse faire quelque chose.» «La question du vivant doit être inscrite à l’agenda des décideurs politiques», martèle Pascal Canfin, directeur général France de l’ONG au panda, interrogé dans Le Parisien.
«Plusieurs échéances prochaines pourraient permettre d’agir en ce sens: la 7e conférence de la Plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), au printemps 2019 en France, le congrès mondial de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), en 2020 à Marseille, ou la 15e conférence mondiale sur la biodiversité, en 2020 aussi, à Pékin», explique Le Monde.
Chiffrer la biodiversité
Une bonne piste, pour mobiliser les politiques? Toute la presse revient aussi sur un autre chiffre présent dans le rapport, qui tente d’évaluer financièrement les services rendus à l’humanité par la nature – la pollinisation assurée par les insectes et les oiseaux par exemple, dont dépend un tiers de la production alimentaire: la «valeur» de la biodiversité serait de 125 000 milliards de dollars par an (110 000 milliards d’euros), soit environ 1,5 fois le produit intérieur brut mondial. «Si nous devions payer pour ces services, notre modèle économique serait en faillite», observe Pascal Canfin, toujours dans Le Monde. Le rapport rappelle aussi que cinquante ans d’efforts de conservation ont permis de beaux succès, avec la sauvegarde d’espèces comme certains tigres, les mainates, les grizzlys ou certaines espèces d’aigles et de thons.
Sur les réseaux sociaux, en tout cas, on s’écharpe sec. «Personne ne veut parler de la solution la plus simple – arrêter de faire des enfants», pour @tris2050 sur Twitter. «Ce n’est pas la faute de l’humanité en général mais celle des capitalistes» corrige toujours sur Twitter @justiciaparahoy. «99% des animaux qui ont vécu sur la Terre sont éteints mais ce n’est pas nous qui les avons tués, c’est la Nature – il y a juste en ce moment une espèce plus dangereuse que les autres qui accélère le processus», répond aussi @aquatickeve2013.
Catherine Frammery
Source : Le Temps (Suisse)
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