Pour la première fois depuis 1949, aucun écrivain ne sera récompensé cette année.
La médecine lundi, la physique mardi, la chimie mercredi, la paix vendredi et l’économie lundi prochain… La saison des prix Nobel débute cette semaine, mais pour la première fois depuis 70 ans, vous ne verrez pas de prix Nobel de littérature. Depuis des mois, l’Académie suédoise fait face à un scandale d’agressions sexuelles qui l’ont plongée dans une importante crise. Hasard du calendrier, cette semaine de récompenses s’ouvre alors que le Français Jean-Claude Arnault, l’homme par qui la polémique est arrivée, a été condamné, lundi 1er octobre, à deux ans de prison pour viol.
Un Français a déclenché un scandale sexuel
C’est un article paru dans le quotidien suédois Dagens Nyheter en novembre 2017 qui a mis le feu aux poudres. En plein mouvement #MeToo, le journal publie une enquête sur Jean-Claude Arnault, figure majeure du monde culturel suédois, qui entretient des liens étroits avec l’institution chargée de remettre le Nobel de littérature. Surnommé « Jean-Kladd » (« Jean Crade » en français), ce Français, marié à l’académicienne Katarina Frostenson et installé à Stockholm depuis les années 1970, est accusé de viol et d’agressions sexuelles par 18 femmes. Les faits s’étalent de 1996 à 2017.
Ces accusations ont secoué l’Académie suédoise, qui a fini par rompre ses liens avec l’homme de 71 ans. En effet, « il est apparu que des membres de l’Académie, des filles d’académiciens, des épouses d’académiciens et des membres du personnel de la chancellerie de l’Académie ont subi une intimité non désirée ou des comportements inappropriés de cet homme », selon un communiqué.
Dans un premier temps, tous ses membres ont nié être au courant des agissements de Jean-Claude Arnault. Mais un rapport interne, commandé après les révélations, a prouvé le contraire, mettant en lumière les comportements d’un Jean-Claude Arnault « intouchable ». Selon la BBC (en anglais), les agressions auraient eu lieu dans des endroits appartenant à l’Académie suédoise, dont le Forum-Nutidsplats för kultur, un haut lieu culturel de Stockholm.
L’Académie suédoise ne peut plus voter
Au début de l’année, dans la foulée de ces fracassantes révélations, plusieurs membres de l’Académie, qui ne peuvent pas démissionner, ont abandonné leur fauteuil. Parmi eux, la femme de Jean-Claude Arnault et la secrétaire perpétuelle en exercice. Au total, sept des 18 « Sages » ont déserté l’Académie suédoise.
« Les membres actifs de l’Académie suédoise sont pleinement conscients du fait que la crise de confiance actuelle les oblige à un travail de réforme long et énergique », a commenté Anders Olsson, le secrétaire perpétuel de l’Académie par intérim, dans un communiqué publié en mai. « Nous jugeons indispensable de nous donner du temps pour restaurer la confiance avant la désignation du prochain lauréat », a-t-il ajouté.
L’Académie est désormais en crise. Après les démissions, il ne reste plus, aujourd’hui, que 11 membres. Or, les statuts de l’institution imposent la présence de 12 élus pour pouvoir en élire d’autres. Seul le roi de Suède, Charles XVI Gustave, peut changer les règles de cette institution, dont il est le protecteur. L’Académie se retrouve donc dans l’incapacité de désigner un lauréat.
Le Nobel de littérature 2018 sera révélé en 2019
En pleine crise, l’Académie suédoise a donc préféré reporter l’annonce du prix Nobel de littérature 2018, qui « sera désigné et annoncé en même temps que le lauréat 2019 ». Depuis la création de la plus haute distinction littéraire du monde en 1901, un tel report a seulement eu lieu cinq fois. Et le dernier remontait à 1949.
Mais pour compenser cette absence, la journaliste et écrivaine Alexandra Pascalidou a créé la « Nouvelle Académie« . Cette ONG suédoise a reçu le soutien de nombreux écrivains, journalistes et intellectuels. Pour désigner un lauréat, elle a entamé un long processus en consultant d’abord les libraires suédois. Ces derniers ont proposé une liste de 155 auteurs parmi lesquels ont été retenus les 47 plus cités, explique le HuffPost.
Ceux-ci ont été départagés par les internautes, qui ont élu quatre finalistes : la romancière française Maryse Condé, l’écrivain britannique Neil Gaiman, l’auteure vietnamienne Kim Thùy et le Japonais Haruki Murakami. Ce dernier a refusé la nomination préférant fuir la notoriété. Le lauréat de ce « Nouveau prix de littérature » sera révélé le 12 octobre.
Source : France Info
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