Le torchon brûle entre la Mauritanie et le Maroc

Abdelilah Benkirane est attendu, ce mardi 27 décembre, à Nouakchott. Le Premier ministre marocain se rend en Mauritanie sur ordre du roi Mohamed VI pour tenter d’éteindre un incendie provoqué par la sortie médiatique de Hamid Chabat, secrétaire général du parti Istiqlal.

Déjà passablement tendues en raison du dossier du Sahara occidental, les relations entre la Mauritanie et le Maroc risquent de se détériorer davantage. Au lendemain d’une déclaration incendiaire de Hamid Chabat, secrétaire général du parti marocain Istiqlal, qualifiant la Mauritanie de « province marocaine », le parti au pouvoir dans la République islamique réagit vigoureusement, ce mardi 27 décembre.

L’affaire prend des tournures de crise diplomatique : la Mauritanie menace d’autoriser une ambassade la RASD à Nouakchott.

« Atteinte à la souveraineté et à l’indépendance »

Le dirigeant du parti historique marocain s’est fendu d’une déclaration hasardeuse au sujet du voisin : « La Mauritanie est une terre marocaine et les enclaves du Maroc s’étendent de Sebta au fleuve Sénégal ».

Il n’en fallait pas plus pour provoquer une réaction outragée de la République islamique : le parti du président mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz, l’Union pour la république (UPR) qualifie les propos marocains « d’atteinte à la souveraineté et à l’indépendance. »

Dans un communiqué, l’UPR va plus loin : « Ceux qui sont familiers avec l’histoire savent que nous sommes le tout, et eux la partie, et que nous sommes les bâtisseurs de Marrakech et les vainqueurs de Sagrajas. »

Ce n’est pas tout. Le parti présidentiel parle de « tentative d’exporter les crises et les échecs partisans interne » et exige que « tous les leaders de l’Istiqlal et les élites du Maroc (…) présente[nt] des excuses à la population mauritanienne. »

Maroc : tensions au sommet

Rapidement, les autorités marocaines ont tenté de calmer le jeu. Tour à tour, le Palais royal et le ministère marocain des Affaires étrangères (Maec) ont recadré le leader du parti Istiqlal. « Le Maroc déclare officiellement son respect total des frontières connues et reconnues, par le droit international, de la République islamique de Mauritanie et son intégrité territoriale », indique un communiqué officiel.

Surtout, le Maroc estime que « ces déclarations portent atteinte aux relations avec un pays voisin frère et démontrent une méconnaissance profonde des orientations de la diplomatie marocaine, tracées par sa Majesté, lesquelles prônent le bon voisinage, la solidarité et la coopération avec la Mauritanie sœur. »

Plus ferme encore, le département du ministre marocain Salaheddine Mezouar « rejette vigoureusement » les déclarations « dangereuses et irresponsables » du secrétaire général Hamid Chebat, dont le parti est en négociation pour entrer au gouvernement.

Qu’à cela ne tienne. Le parti répond à Mezouar : « L’Istiqlal n’a pas de leçon de patriotisme à recevoir d’un ministre des Affaires étrangères. » Le communiqué de la direction assimile l’intervention du ministre à une interférence « dans les positions exprimées par les partis politiques. » Istiqlal défend ensuite son secrétaire général, affirmant que ses propos ont été sortis de leur contexte et qu’ils se rapportaient à l’histoire « et non à la période actuelle. »

Cette passe d’arme entre un ministre et un parti en voie d’intégrer une coalition gouvernementale dénote d’une tension au sommet de l’État.

Une ambassade de la RASD à Nouakchott ?

Pire, ces rétropédalages en série n’ont pas suffi à calmer les Mauritaniens. En effet, un diplomate de la République islamique indique que le pays pourrait décider « d’autoriser une ambassade de la République arabe sahraouie démocratique à Nouakchott si les médias et les politiques marocains continuent de provoquer notre pays », selon le média local Al Akhbar.

« Le drapeau sahraoui pourrait bien flotter dans le ciel mauritanien », conclut la même source. La Mauritanie se dit excédée par une série de « provocations » marocaines et pourrait ainsi décider d’autoriser l’ouverture d’une ambassade sahraouie en représailles.

Le Sahara occidental en toile de fond, le ministre marocain vise l’Algérie

L’ombre du Sahara occidental plane sur cette affaire. Et pour cause : la Mauritanie et le Maroc entretiennent déjà des relations tendues depuis plusieurs semaines. Les autorités marocaines accusent notamment les mauritaniens de soutenir le Front Polisario.

Dans sa réaction, le parti de l’UPR y fait directement référence : ce « n’est pas la meilleure façon de traiter les dossiers épineux et ne mènera pas à la résolution du conflit au Sahara occidental », tonne-t-il.

Pour sa part, le ministre marocain des Affaires étrangères évoque la question de l’intégrité territoriale de son pays. Surtout, le département de Salaheddine Mezouar vise indirectement l’Algérie : « Malheureusement, par ce genre de déclarations, qui manquent manifestement de retenue et de maturité, le secrétaire général du parti de l’Istiqlal verse dans la même logique des ennemis de l’intégrité territoriale du Royaume et qui combattent son retour légitime à sa famille institutionnelle africaine. »

 

Tewfik Abdelbari

 

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Source : TSA (Algérie)

 

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