La fillette syrienne Bana Al-Abed, devenue célèbre pour ses tweets de l'enfer quotidien d'Alep en Syrie, a été évacuée de la ville avec sa famille à la faveur de l'accord de cessez-le-feu, ont indiqué des ONG lundi.
L'ONG humanitaire islamique turque IHH a annoncé sur son compte Twitter que Bana Al-Abed, âgée de sept ans, "a été évacuée ce matin d'Alep avec sa famille" et publié une photo montrant la fillette, bonnet sur la tête, avec l'un de ses employés.
"Elle faisait partie du premier groupe qui a été évacué ce matin et qui se trouve à présent dans la région de Rashidin", dans la campagne d'Alep, a précisé à l'AFP un porte-parole d'IHH.
Ahmad Tarakji, chef de l'ONG médicale Syrian American Medical Society (SAMS) a lui aussi annoncé sur Twitter, photo à l'appui, l'évacuation de la fillette et son arrivée "avec de nombreux autres enfants" dans la campagne d'Alep.
Depuis septembre, Bana Al-Abed (@AlabedBana) tweetait avec sa mère des tranches de vie d'Alep est assiégé et bombardé par l'aviation du régime appuyée par la Russie. Son compte est suivi par plus de 323.000 personnes.
Dans l'un de ses derniers tweets, dimanche, elle implorait le président turc Recep Tayyip Erdogan et son ministre des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu de faire en sorte que l'accord de cessez-le-feu parrainé par la Turquie et la Russie fonctionne pour que les habitants des quartiers rebelles puissent être évacués. "Nous sommes tellement fatigués", avait-elle écrit.
M. Cavusoglu lui a répondu sur Twitter, assurant que "les difficultés sur le terrain ne vont pas nous dissuader". "Sois assurée que nous faisons tout pour te sortir, toi et des milliers d'autres, vers un lieu sûr".
Syrie: des milliers de personnes évacuées d'Alep, vote attendu à l'ONU
Plus de 3.000 personnes ont pu quitter lundi le secteur rebelle assiégé d'Alep avant le vote d'une résolution de l'ONU qui permettrait de superviser ces évacuations, une lueur d'espoir pour des milliers de Syriens menacés par la faim et le froid.
Les évacuations avaient débuté jeudi après un accord entre la Russie et la Turquie mais avaient été suspendues le lendemain par le régime syrien. Leur reprise n'a pas été officiellement annoncée lundi mais les convois de bus circulaient en continu.
Environ 3.000 personnes sont arrivées en matinée en territoire rebelle, à l'ouest de la deuxième ville de Syrie, dans deux convois de chacun une vingtaine de bus, selon Ahmad al-Dbis, chef d'une unité de médecins et de volontaires qui coordonnent les évacuations.
Il a expliqué avoir vu, dès l'aube, des familles emmitouflées dans plusieurs couches de manteaux descendre des bus et se rassembler à même le sol sur un terrain sale, pendant que des travailleurs humanitaires distribuaient des bouteilles d'eau.
Ces gens "avaient dû attendre plus de 16 heures" à un check-point du régime sans pouvoir sortir des véhicules, a indiqué Ahmad al-Dbis. "Ils n'avaient pas mangé, n'avaient rien à boire, les enfants avaient pris froid et ils n'avaient pas même pu aller aux toilettes".
Environ 350 personnes avaient déjà été évacuées dimanche soir vers cette même localité de Khan al-Assal, d'après M. Dbis.
"Les gens que nous accueillons ont vécu l'enfer, le niveau de traumatisme qu'ils ont subi est impossible à décrire ou à comprendre", a expliqué à l'AFP Casey Harrity de l'ONG internationale Mercy Corps.
Parmi les milliers de personnes évacuées lundi d'Alep se trouve la jeune Bana al-Abed, 7 ans, devenue célèbre pour ses tweets -suivis par plus de 300.000 personnes- sur l'enfer quotidien d'Alep.
D'après l'ONG turque IHH, la jeune fille et sa famille devraient être accueillies dans un camp de déplacés de la province d'Idleb (nord-ouest), contrôlée en quasi-totalité par les insurgés et voisine de celle l'Alep.
Grave incident
Parallèlement aux évacuations de lundi matin, 500 personnes ont pu quitter deux localités chiites prorégime assiégées par les rebelles dans la province d'Idleb, d'après l'Observatoire syrien des droits de l'homme.
Dimanche soir, alors que la reprise des évacuations semblaient toute proche, une vingtaine de bus s'apprêtaient à entrer dans ces localités de Foua et Kafraya quand ils ont été attaqués et incendiés par des hommes armés issus de la mouvance jihadiste.
Un chauffeur a trouvé la mort et ce grave incident avait encore retardé les évacuations des insurgés et des civils du réduit rebelle d'Alep, prévues parallèlement à une opération similaire dans les deux villages chiites.
L'accord d'évacuation réciproque semblait toutefois remis sur les rails lundi matin.
Selon un responsable rebelle, il prévoit également l'évacuation de centaines de personnes de Zabadani et Madaya, deux villes rebelles assiégées par le régime près de la frontière libanaise.
Il resterait environ 40.000 civils, et entre 1.500 et 5.000 combattants avec leurs familles, dans le réduit rebelle d'Alep selon l'ONU.
Le régime de Bachar al-Assad est parvenu à reconquérir la quasi totalité du secteur que les rebelles contrôlaient depuis 2012 dans cette ville après une violente offensive aérienne et terrestre d'un mois, doublée d'un siège hermétique depuis juillet.
Une fois les évacuations terminées à Alep, le régime syrien devrait proclamer la reprise totale de la ville, signant sa plus importante victoire dans la guerre sanglante qui déchire le pays depuis 2011 et a fait plus de 310.000 morts.
'Vote unanime'
A New York, le Conseil de sécurité de l'ONU doit se prononcer sur un nouveau projet de résolution visant à garantir le bon déroulement des évacuations des civils et rebelles de la métropole du nord de la Syrie.
A l'issue de longues consultations à huis clos dimanche, les 15 membres du Conseil de sécurité sont parvenus à un compromis pour amender un texte présenté par la France et auquel la Russie menaçait d'opposer un veto.
L'ambassadeur russe Vitali Tchourkine a estimé qu'il s'agissait "d'un bon texte".
Moscou -grand allié de Damas- a toujours opposé son veto aux résolutions concernant la Syrie mais l'ambassadrice américaine Samantha Power a cette fois dit s'attendre à un "vote unanime".
La dernière mouture du projet, obtenue par l'AFP, "demande à l'ONU et à d'autres institutions pertinentes de superviser de manière adéquate et neutre et de surveiller directement les évacuations des quartiers est d'Alep".
La situation à Alep est par ailleurs au centre lundi d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe au Caire.
Le lendemain, les ministres des Affaires étrangères et de la Défense de Russie et d'Iran, alliés du régime, et de Turquie, qui soutient l'opposition, doivent se retrouver à Moscou pour des discussions tripartites sur la Syrie.
Source : AFP via La Libre.be (Belgique)
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