Ce n’est pas que la photo ne sied pas au président de la République Macky Sall ; ce n’est pas que ce chef de l’Etat n’est pas photogénique, mais c’est plutôt parce que les costumes (dont on l’affuble dans certains pays étranger où il se trouve en visite) font jaser ; ils provoquent le fou-rire ici au Sénégal.
C’était en Inde, ce fut au Kenya (le président Sall y est photographié et filmé habillé en guerrier massai), ce sera…
Déjà qu’au Sénégal, au beau milieu de l’avarie d’un tuyau du lac de Guiers alimentant en eau Dakar et environs, le président Sall, en tenue de combat et descendant d’un hélicoptère militaire, offrit une image équivoque aux yeux de ceux qui se demandaient la pertinence d’un tel accoutrement et d’un décorum tout martial. Et ce n’est pas tout puisqu’il y a cette séquence d’une visite au Pakistan immortalisant le chef de l’Etat du Sénégal tenant fermement un pistolet et pointant on ne sait quelle cible. Les experts en interprétation de l’image et de la sémiologie y sont allés de leurs théories.
Et pourtant, Sall n’innove en rien, n’a rien fait que n’aient déjà fait ses devanciers d’ici et d’ailleurs de se faire offrir une tenue traditionnelle du pays d’accueil et de l’étrenner sur le champ et de se faire applaudir. Ce n’est pourtant pas que le président Sall dépare ces tenues… Où est alors le problème ? Il est dans la subjectivité de ceux-là qui trouvent à redire de cet habillement de circonstance qu’un protocole de l’hôte impose ou suggère au visiteur. Il nous semble que c’est la première dans l’histoire présidentielle du Sénégal qu’on rit à chaque fois que le président de la République reçoit, à l’étranger, l’honneur d’être habillé du costume du pays-hôte.
Les adversaires du président Sall en profitent pour tourner en bourrique ce dernier ou accoler à ces photos une légende négative. Ajoutons-y les détournements du sens de certaines photos qui, d’anodines se voient tournées au sens le plus des plus connotés. Par exemple, voir un président belliqueux, violent dans son maniement mimé d’une arme à feu. Il est vrai que la tenue de combat fut d’une pertinence discutable dans la visite du chef de l’Etat sur le chantier de colmatage d’un tuyau d’adduction d’eau vitale pour l’alimentation en eau de la capitale. Il n’y avait rien qui justifiât que le président de la République fût habillé comme un chef de guerre. Heureusement qu’il était en costume de bonne coupe lors de sa visite des tranchées de l’armée sénégalaise en opération en Casamance où sévit depuis bientôt trente-quatre dans une guerre sans quartier.
Finalement, ou en général, les photos ont le sens que ceux qui les regardent veulent leur donner. On en arrivera à cette conclusion en parcourant le site www.lesensdesimages.com où on peut lire d’intéressantes interprétations bien expertes de clichés de célèbres reporters comme Robert Capa, Henri, Cartier-Bresson, Marc Riboud (décédé il y a quelques jours)…
Les services photo et de la communication (au cas où ces deux compétences ne seraient pas regroupées en une) de la présidence de la République du Sénégal doivent désormais être vigilants ; analyser les photos, les peser et soupeser, faire le tour, se demander si la diffusion de telle photo ne ferait pas un effet boomerang. Il est certes impossible de ne rien diffuser, il est tout aussi difficile de rattraper les dégâts.
Le 7 septembre dernier, s’est éteint à Dakar, le grand journaliste Bara Diouf, ancien directeur général fondateur du quotidien gouvernemental Le Soleil qu’il dirigea d’une main ferme, mais professionnelle. A la levée du corps, le 8 septembre, il y a eu des journalistes de toutes (vraiment de toutes ) les générations, des personnalités d’Etat comme le président de l’Assemblée nationale Moustapha Niasse, (qui a révélé avoir été des fondateurs de ce journal dans le bureau du président Senghor), l’ancien ministre d’Etat Djibo Kâ…, l’ancien ministre malien de la Communication, Hamadoun Touré, ancien du Soleil, lui aussi, le successeur direct de Bara Diouf au Soleil Alioune Dramé, actuel directeur de la Communication, l’actuel Dg du Soleil, Cheikh Thiam, et bien d’autres et bien d’autres…
Une des qualités que devra retenir tout journaliste comme tout lecteur du Soleil, c’est la plume d’un orfèvre de l’éditorial (le genre rédactionnel du grand patron). Même ses contempteurs en étaient séduits. Et cela est très important : même s’ils ont pour vous une aversion, faites-en sorte qu’il admette que vous avez du talent à revendre. C’est cette leçon que Bara Diouf laisse à tout journaliste.
AVIS D’INEXPERT PAR JEAN MEÏSSA DIOP
Source : Enquête Plus
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com