Artisan de la transition démocratique en Mauritanie, cet ex-putschiste, qui se pose en farouche adversaire du régime, fourbit ses armes en vue de la prochaine présidentielle.
Au sommet de l’État mauritanien, le cousinage n’est pas matière à plaisanterie. L’un des opposants les plus bruyants au président Mohamed Ould Abdelaziz, l’ex-président de la transition Ely Ould Mohamed Vall (2005-2007), n’est autre que son cousin germain. Et ce dernier semble désormais avoir partie liée avec l’homme d’affaires en disgrâce Mohamed Ould Bouamatou, exilé au Maroc depuis 2010, et lui aussi cousin du chef de l’État. Un « Dallas » à la sauce beydane sur fond d’ambitions présidentielles.
Anciens putschistes désormais ennemis
À l’occasion du 11e anniversaire du coup d’État qui allait aboutir, le 3 août 2005, au renversement de Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya après vingt et un ans de règne, le colonel Ely Ould Mohamed Vall a livré à l’hebdomadaire Alakhbar une interview comme il les affectionne. Le leader du putsch y tire à boulets rouges sur Ould Abdelaziz, qu’il accuse de tous les maux. Entre les deux officiers, hier alliés pour déboulonner Taya – dont Ould Abdelaziz, 59 ans, a longtemps commandé le bataillon de sécurité présidentielle (Basep) et Vall, 62 ans, les services de renseignement –, le fossé est devenu infranchissable.
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Ses ambitions présidentielles anéanties par le putsch d’Ould Abdelaziz
Il faut dire que le début du mois d’août marque un autre anniversaire, qu’« Ely » n’a jamais digéré : celui du coup d’État qu’Ould Abdelaziz a conduit le 6 août 2008 contre Sidi Ould Cheikh Abdallahi, le premier civil élu à la tête de l’État depuis 1978. Un « coup d’État de trop », dixit Vall, qui était venu laminer son principal acte de gloire – une transition réussie vers un régime civil, en mars 2007 – et contrecarrer ses plans.
À Nouakchott, les ambitions présidentielles de l’intéressé sont en effet un secret de Polichinelle. Auréolé, en Mauritanie comme à l’international, de son statut d’artisan de l’alternance démocratique, Vall attendait la présidentielle initialement prévue en 2012 et cultivait ses réseaux dans l’espoir de revenir au pouvoir par la grande porte. Mais le passage en force d’Ould Abdelaziz en 2008 a réduit ce projet à néant. L’année suivante, ce dernier faisait valider son coup d’État par les urnes en s’imposant dès le premier tour avec 52,58 % des suffrages, tandis que Vall essuyait une défaite cuisante (3,81 %).
Déjà en campagne
Depuis, l’ancien directeur général de la Sûreté nationale rumine sa revanche. S’il s’est abstenu de créer son propre parti, Vall gravite dans l’orbite des principales coalitions d’une opposition dont les deux leaders historiques, Messaoud Ould Boulkheir (Alliance populaire progressiste) et Ahmed Ould Daddah (Rassemblement des forces démocratiques), seront atteints par la limite d’âge en 2019.
Se ralliant à leur stratégie de rupture, Vall avait prôné le boycott des scrutins législatif et présidentiel de 2013 et 2014, préférant se répandre, à longueur d’interviews, sur le bilan – indéfendable à ses yeux – du « petit régime putschiste » à la solde de son cousin. Restriction des libertés, bradage foncier, affairisme, élections truquées… Rien ne trouve grâce à ses yeux, pas même la capacité du régime à endiguer la menace jihadiste et qui lui a valu le satisfecit de la communauté internationale.
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Ce contempteur invétéré s’est par ailleurs rapproché du principal paria du régime, le milliardaire Mohamed Ould Bouamatou, s’affichant à ses côtés, en mars, au Forum de Crans Montana, à Dakhla. Pour certains observateurs, c’est une évidence : Vall est déjà en campagne pour la présidentielle de 2019. Avec quelques handicaps (son CV sous Taya et la concurrence d’une nouvelle génération d’opposants) et un atout symbolique : être le seul officier mauritanien à avoir renoncé de lui-même au pouvoir.
Mehdi Ba
Source : Jeune Afrique
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