Un prix pour la répudiation de l’arabisation : Le visa de circulation francophone!

Le Maroc a tranché : le français sera langue d'enseignement des matières techniques et scientifiques.

Cela revêt une importance idéologique capitale en un pays où le secteur de l'éducation est sinistré du fait de valses idéologiques et surtout politiques incessantes entre arabisation et francisation depuis l'indépendance.

Éviter le néocolonialisme mental

Un tel choix est périlleux en termes psychologiques; il aggrave même le néocolonialisme mental qui menace les pays du Maghreb livrés, plus que jamais, aux forces capitalistes d'un néolibéralisme triomphant, voulant en faire juste de juteux marchés. En remportant la bataille de l'enseignement, la France doit donc en payer le prix, faut-il que le Maroc l'exige! Le fait-il? Le fera-t-il? L'éthique et la logique l'exigent.

D'abord, cette dernière, car la ficelle du prétexte est grosse: s'il y a bien une langue appropriée à la science et à la technique, c'est l'anglais et non le français! Pourquoi alors faire le choix d'un idiome désormais dépassé, aux titres de noblesse s'illustrant plus dans le domaine des humanités que de la technologie? Et en cela, le français est à ranger à la même enseigne que l'arabe! Le choix est idéologique, on le comprend bien, et le passé colonial n'y est pas pour peu de chose. C'est justement en se référant à de tels liens que le Maroc a le devoir de faire payer à la France le prix de ce choix a haute teneur politique.

L'ethique le mande et le commande; car un peuple qui renie sa langue maternelle (c'est le cas de l'amazigh) ou n'encourage pas sa revitalisation (c'est valable pour l'arabe) est comme un arbre qui n'a plus de racines; fatalement il meurt! Ce n'est pas le français qui sauvera le Marocain, mais son enracinement dans ses traditions et sa culture d'abord, à la fois berbères et arabes, afin de pouvoir s'ouvrir en position de force aux autres cultures, en tirer sainement profit. C'est ce qu'on appelle un enracinement dynamique.

Le prix à payer pour le choix du français

L'acte éminemment politique et idéologique des autorités marocaines implique un autre de la part de la France et qui lui est intimement lié. C'est l'instauration de la libre circulation en faveur des jeunes appelés à user du français afin de les y encourager tout en les préservant subtilement des sirènes terroristes.

On pourrait dire que le visa est une question qui ne relève plus du ressort des autorités françaises, étant l'affaire réservée des instances européennes; ce serait assurément alors insulter l'intelligence des Marocains! On sait, en effet, que lorsque l'intérêt national prime, il n'y a plus de prééminence européenne. Hier, la ruée des Tunisiens sur les côtés italiennes et aujourd'hui la crise des réfugiés l'ont amplement démontré. Cette dernière crise a même bel et bien attesté qu'il n'y a pas de tabou du visa lorsqu'il y va de questions majeures.

Or, le détournement des jeunes Marocains des sirènes terroristes est un impératif catégorique qui implique de leur octroyer la libre circulation. Alors, comment s'y prendre? Par le biais de la francophonie! La France et le Maroc sont membres éminents du mouvement qui veut, bien à tort, se cantonner dans le domaine culturel, soit donc au service de la seule France. N'est-il pas temps de lui donner une dimension essentielle qui soit politique, et ce au travers de la création d'un visa biométrique de libre circulation en faveur des ressortissants membres?

On pourrait conditionner l'octroi d'un tel visa aux pays actifs aussi bien dans la défense du français auprès de leur population que dans l'action incessante pour instaurer chez eux la démocratie. C'est bien le cas du Maroc. Alors, les autorités du royaume oseront-elles demander à la France le prix du stratégique passage de l'arabe au français dans l'enseignement? Assurément, c'est un droit qui ne doit pas être négociable et qui ne saurait être refusé par la France, aujourd'hui honorée. Qu'elle le soit donc en partenaire et non en nouveau colonisateur, culturel et mental cette fois-ci!

Farhat Othman

Juriste, politiste, chercheur en sociologie et ancien diplomate

 

 

Source : Al HuffPost Maghreb

 

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