Culture : T’Ganiss (taquinage) Mauritanien est-il harcèlement sexuel ?

Le T’Ganiss est un pan de la culture Mauritanienne qui encourageait et valorisait la femme. Aujourd’hui , il se voit menacé de disparition par la double invasion de l’intégrisme religieux excessif et le mimétisme aveugle de l’occident. En fait, chez nous, ne pas taquiner les femmes est jugé par ces dernières comme mépris et manque d’égard à leur endroit.

Souvent des femmes mariées ou fiancées menacent, (fâchées), d’interrompre la relation avec l’autre, parce qu’il ne la taquine pas assez ou du tout. Dans l’entendement général, Taquiner une femme (T’Ganiss) c’est «la soutenir, la réconforter, la sortir des pesanteurs physiques et morales du quotidien ». Quelle est la frontière entre notre « T’Ganiss » (drague ailleurs) et harcèlement sexuel ?Pour mieux apporter un jugement, voici quelques techniques du « Taquinage », les plus utilisées .

EL Winssa (causerie) 1.1) chez les célibataires : Les femmes et hommes se retrouvent généralement autour d’une musique, thé, jeu de sable ou autre distraction…Ils sont séparés par un espace, chacun de son coté. Les échanges ne sont que verbaux …Les hommes adressent aux femmes des « provocations sentimentales ». Soit sous forme de mots au sens figurés ou à double sens ;

Des anecdotes qui font rire ou suscitent une réaction spontanée ; Un clin d’œil, un Gav (quatrain) poétique ou une boutade ; En général au cours de cette Winssa apparaissent des « couples » d’émetteurs –récepteurs. L’homme saura laquelle des filles est attentive à ses « envois » et vice- versa. Le lien est noué…

1.2) Chez Les mariés : Le mari doit de temps à autre parler sentimentalement (et pas seulement la nuit) à sa femme : compliments, histoires à faire rire, échanges poétiques, câlins et caresses en cachette aux enfants présents etc.

Meddeu Teksar Oud (casser une brindille) : Là c’est plus vivant. Au cours de la Winsa et en plus, les hommes se permettent de casser entre leurs doigts, une brindille ou tout autre objet et en jettent un morceau vers leur préférée. Si ce morceau atteint la cible c’est tant mieux. La fille le rejette rapidement ou le laisse sur son voile suivant son sentiment à l’endroit  du jeteur…Certaines filles osent parfois prendre le morceau jeté, le passer sur leurs lèvres et le renvoyer. Le message est clair.

Charmitt El Meswak (s’offrir un cure-dent). Durant les après midi, les jeunes gens sortent à l’Ouest des tentes (Charg Lekhyam) et marchent au milieu des arbres et verdure. Si une fille demande à un jeune de lui arracher un cure-dent, c’est une façon de se le réserver. Ainsi, Lui, s’il joue le jeu, il doit Yechram (arracher) le cure dent et le casser en deux, pour elle et lui. Et c’est une façon subtile de commencer une histoire. Le reste du groupe les considère comme amoureux.

Tebraa (échanges poétiques) : Les femmes y expriment leurs sentiments plus que les hommes .Exemple 1 : A3reivou Lemdelli—Makhalladhkar yehjelli ( la mèche qui lui tombe sur le front—me fait oublier tous les autres hommes). Ici, la fille avoue et déclare avoir un amant à ses copines mais aussi avertit les autres  hommes qui tenteraient la séduire….Ou encore ,exemple 2 : Mendarti Yekane—-Rag Elmahchar Vih Soubiane ( est ce que le jour du jugement dernier—peut on avoir un fiancé). Là la fille « pleure » son amant décédé…

E6owriv (se déplacer à reculons) : C’est un cran au dessus des précédents. C’est ce petit jeu qui consiste à amener la jeune fille à quitter l’assemblée (be etka7iz) à reculons …jusqu’ à se mettre à l’écart du groupe. (ye6arav bihé) la prendre en aparté, sans non plus quitter le groupe. Les 2  jeunes gens cherchant ainsi à se dire ou se faire  du « sérieux » : Tenir un doigt, le pincer etc. Parfois le jeune « tenteur  » remet à sa « candidate  » un petit cadeau apporté de la ville : Une bague ou le7lawé (des bonbons).

Echemetti (Pan du voile) : Parfois, le « tenteur »  attrape un pan de voile d’une fille et /ou marche un bout de chemin juste derrière elle et s’amuse à  « freiner » par moment sa marche,  en posant à chaque fois, son pied sur son Echemetti (pan inferieur du voile) qui traine par terre. Manière de lui signifier  qu’il aime sa compagnie.

Temlass (tâter) : Plus, ils se familiarisent, les fiancés  se rapprochent les uns des autres mais toujours au sein de groupes pour que tout le monde entende ou voit ce qui se passe. Le jeune homme en profite souvent pour « tester » le sentiment d’une fille à son égard ou apprécier la beauté de sa corpulence, en lui tâtant furtivement une partie du corps. Généralement placer la paume de la main (Temlass), à la va-vite, sur les fesses ou le bas ventre …

Etehmass (chatouiller) : C’est le jeu consistant à chatouiller sa partenaire  en public,en lui touchant d’un doigt le bas des cotes ou les plis du ventre  . Les filles non mariées doivent faire semblant d’être très chatouilleuses et  s’offusquer en  répétant : ehné ! ehné ! (arrête, arrête) tout en s’adonnant avec joie à  ce caprice.
Lewi Dhraa (tourner le bras) : Cette phase est la plus osée. Les hommes n’hésitent pas, dans certains groupes familiers, à exprimer leur virilité masculine ,intelligence, courage, force physique, malice, galanterie etc. e attirant en aparté, celle des filles qui consent, mais pas loin de l’assistance qui doit tout voir (pas forcément entendre) .

Et là, Quelques câlins à la dérobée et le  « Lewi Dhraa (tourner le bras) ». L’homme tient le poignet de la fille et d’un tournant du bras, simule la renverser sur son dos tout en poursuivant de tâter le reste de son corps avec son autre main. . Les femmes apprécient beaucoup « ce combat sans méchanceté » dans lequel, elles exposent leurs mille et une astuces féminines de séduction ….

Ceci dit, le T’Ganiss Mauritanien est-il considéré : Harcèlement sexuel ? …Si oui .n’est on pas entrain de priver les femmes et les hommes de leur droit à l’amour ?

 

El Valih Ould El Valiha

 

Source : Adrar Info (Mauritanie)

 

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