A Biarritz, les organisateurs du festival ont voulu restreindre l'accès à la séance aux seuls professionnels.
Le documentaire de François Margolin et Lemine Ould Salem est menacé d'une interdiction aux moins de 18 ans avant sa sortie en salles le 27 janvier.
L'atmosphère habituellement feutrée du Festival international de programmes audiovisuels (Fipa) s'est brièvement et brutalement tendue dans la soirée du jeudi 21 janvier 2016. En cause, la décision de la direction du festival de restreindre la projection de Salafistes, le film réalisé par François Margolin et Lemine Ould Salem, aux seuls accrédités (professionnels de l'audiovisuel et journalistes) et plus au public.
« Nous avons reçu des informations contradictoires concernant l'éventuelle interdiction du film ou tout au moins son interdiction aux moins de 18 ans. Ce film contient des images violentes et, même si le festival estime que le parti pris radical des réalisateurs se doit d'être montré, il est de la responsabilité juridique du festival d'avoir une discussion sur les images qui posent problème », plaide François Sauvagnargues, le délégué général du Fipa.
Problème : cette discussion doit-elle empêcher le public de voir ce documentaire alors qu'il ne fait l'objet d'aucune interdiction à ce jour ? Sans compter qu'il est assez étrange de voir la direction d'un festival ne pas assumer sa sélection jusqu'au bout. La décision est, en tout cas, restée à juste titre en travers de la gorge du réalisateur, François Margolin, et d'une poignée de spectateurs qui ont refusé de quitter la salle et commencé à crier à la censure.
Vers une interdiction aux moins de 18 ans ?
Après une demi-heure de débat incertain entre les organisateurs du Fipa et le réalisateur, le film a finalement été projeté devant les spectateurs encore présents dans la salle. François Margolin est alors brièvement intervenu pour expliquer que ce film avait été « très compliqué à faire » et que son coréalisateur et lui-même avaient « pris des risques considérables ». « Je ne dis pas cela pour me vanter mais vu les accusations portées contre nous ces temps-ci, je préfère le dire. » Le réalisateur de Salafistes a également tenu à démentir « les rumeurs » : « Le film n'est ni censuré, ni interdit et il n'y a aucun problème juridique le concernant. Des discussions sont actuellement en cours avec le CNC (Centre national du cinéma) et le ministère de la Culture, et je pense que les choses vont s'arranger. »
Pas si sûr… Une nouvelle projection en salle ouverte au public est normalement prévue ce vendredi après-midi à 16h30, mais la direction de France Télévisions (France 3 cinéma est co-producteur du film) a demandé dans la matinée l'annulation de la projection publique du film. Après une valse à deux temps, la direction du festival a heureusement décidé de passer outre et de projeter le film moyennant deux aménagements: le floutage – avec l'accord des réalisateurs – d'une séquence de huit secondes où l'on voit l'exécution d'Ahmed Merabet, le policier tué devant les locaux de Charlie Hebdo, et un filtrage à l'entrée de la salle pour ne laisser accéder que les spectateurs âgés de plus de dix-huit ans.
Salafistes se retrouve au centre de cette polémique en raison du parti pris radical et risqué de ses réalisateurs. Le film donne à entendre le discours sans filtre des prêcheurs de l’islam intégriste. Une logorrhée glaçante, entrecoupée d'extraits de vidéos de propagande de Daech souvent violentes, sans commentaires, ni voix off. Depuis mardi dernier, le film est menacé d'une interdiction au moins de 18 ans assortie d'une obligation d'avertissement au public par la Commission de classification des films. La polémique ne fait sans doute que commencer.
Olivier MIlot
Source : Télérama
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