Sanglant raid djihadiste à Ouagadougou

Epargné jusque-là par les djihadistes qui semaient la terreur au Mali et au Niger voisins, le Burkina Faso vient de subir sa première attaque meurtrière, au cœur de sa capitale Ouagadougou.

Dans la soirée du vendredi 15 janvier, un commando armé d’hommes « enturbannés  », selon plusieurs témoins, disant agir au nom d’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) a pris d’assaut un hôtel de luxe, le Splendid, et mitraillé la terrasse d’un bar voisin très fréquenté.

Lire aussi : L’attaque d’AQMI à Ouagadougou : la fin de l’exception burkinabé face au terrorisme

Samedi matin, le ministre de l’intérieur Simon Compaoré, affirmant que des combats, impliquant les forces de sécurité burkinabées appuyées par des forces spéciales françaises, étaient toujours en cours dans un hôtel voisin, annonçait que « 126 personnes, dont au moins 33 blessées, ont été libérées. Trois djihadistes, un Arabe et deux Négro-africains, ont été tués ». Aucune estimation précise n’était disponible, mais le bilan définitif s’annonce très lourd avec déjà « une vingtaine de morts et de très nombreux blessés », selon le directeur du principal hôpital de la ville.

Les assaillants – au nombre de trois ou quatre selon les premiers témoignages – ont fait irruption sur l’une des principales artères de la capitale burkinabée aux alentours de 19 h 30. Un témoin interrogé par Le Monde a raconté que trois hommes encagoulés se sont introduits en début de soirée dans l’enceinte de l’Hôtel Splendid. Le nombre exact de personnes présentes lors de l’attaque n’a pas été communiqué, mais, selon nos informations, le lieu devait être bondé   : une réception de l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) s’y déroulait. Le ministre de la fonction publique se trouvait dans l’établissement. Il a pu être libéré.

Tirs nourris et détonations

Avant d’entrer dans l’Hôtel Splendid situé sur l’avenue commerçante Kwame-Nkrumah, le commando a tiré à l’arme automatique sur la terrasse du bar Cappuccino, très fréquenté par des expatriés. Selon le ministre de l’intérieur, Simon Compaoré, «  les sapeurs pompiers ont vu une dizaine de cadavres sur la terrasse du Cappuccino  ». «  C’est horrible, les gens étaient couchés et il y avait du sang partout. Ils tiraient sur les gens à bout portant  », a expliqué à l’AFP Yannick Sawadogo, un des rescapés. «   On les entendait parler et ils marchaient autour des gens et tiraient encore sur des personnes qui n’étaient pas mortes. Et quand ils sont sortis, ils ont mis le feu  », a-t-il ajouté.

« Les gens étaient couchés et il y avait du sang partout. Ils tiraient sur les gens à bout portant  »

Le Splendid, qui compte 147 chambres, est fréquemment utilisé par des Occidentaux et par du personnel des agences onusiennes. Des contrôles de sécurité étaient en place à l’entrée, mais ils n’ont pu empêcher l’irruption des assaillants, quand des tirs nourris et des détonations ont éclaté.

AQMI a revendiqué la responsabilité de cette attaque menée par l’une de ses «  filiales  », le groupe djihadiste Al-Mourabitoune, dirigé par l’Algérien Mokhtar Belmokhtar qui, en novembre 2015, avait mené une attaque similaire contre un autre établissement hôtelier de luxe dans la capitale du Mali, Bamako. Vingt et une personnes avaient été tuées dans cette prise d’otages.

Dans un message audio diffusé par Al-Qaida via l’application de messagerie sécurisée Telegram, un homme s’exprimant en arabe et se présentant comme l’un des assaillants affirmait avoir tué « de nombreux croisés ». Dans le courant de la nuit, 63 personnes, trente «  saines et sauves  » et 33 blessées, avaient pu s’échapper de l’hôtel, selon le ministre de la communication, Rémi Dandjinou.

Soutien militaire français

Le communiqué diffusé durant la nuit par AQMI justifiait cette attaque comme «  un acte de vengeance contre la France et l’Occident infidèles et pour mobiliser la jeunesse de l’Oumma [la communauté musulmane] pour le djihad  ». Le président François Hollande a condamné une attaque «  odieuse et lâche  » et confirmé la participation de forces françaises pour déloger les assaillants de l’hôtel. Des militaires français sont en effet stationnés dans la banlieue de Ouagadougou dans le cadre de l’opération « Barkhane » destinée à lutter contre le terrorisme dans le Sahel.

Sur son compte Twitter, le tout nouveau ministre burkinabé des affaires étrangères Alpha Barry avait également annoncé durant la nuit que l’assaut avait été «  lancé par [des] forces burkinabées et [des] forces spéciales françaises venues de Gao au Mali  ». Selon l’agence Associated Press citant une source anonyme au Pentagone, des militaires américains participeraient également à l’opération – 75 militaires américains stationnent actuellement dans le pays. «  La France a réclamé un soutien immédiat ISR [surveillance aérienne, souvent assurée par des drones] et nous sommes en train de le mettre en œuvre  », a détaillé ce responsable de la défense.

Un QG a été établi à proximité de l’établissement afin de coordonner les opérations. L’électricité aux abords du lieu a été coupée. Aux premières heures de samedi, plusieurs personnes ont affirmé que le hall de l’hôtel était en feu et que des cris pouvaient être entendus. L’origine des flammes n’était pas connue à ce stade. Le couvre-feu, mis en place dans le pays à la mi-septembre à la suite d’un coup d’Etat, a été étendu de 23  heures à 6 heures du matin.

Christophe Châtelot

 

 

Source : Le Monde

 

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