Rentrée politique : Quelles perspectives?

Les Mauritaniens attendent, depuis quelques jours, le retour du président de la République Mohamed ould Abdel Aziz, parti passer quelques jours  de vacances, dans un Tiris, particulièrement verdoyant cette semaine grâce à une bonne pluviométrie. Des vacances qui ressemblent fort à un deuil, suite au tragique accident qui a emporté  son fils et  deux  journalistes  de sa fondation Rahma.

Surmontant sa tristesse, le président de la République aura certainement mis à profit ce repos  pour avancer quelques pions, échafauder, loin  des indiscrétions  et  des bruits du Palais gris, quelques scénarii pour marquer la rentrée politiques 2016. Selon diverses indiscrétions concordantes, il aurait même tenu une réunion avec les chefs de corps des forces armées et de sécurité. De quoi  ont-ils parlé ? Mystère !

En tout cas, impatients  de savoir  par quel  bout le Raïs va entamer la nouvelle année, les  Mauritaniens  spéculent à tout va. Beaucoup parient sur quelques touches ou retouches à son gouvernement. On imagine le stress – pour ne pas dire  la trouille – qui frappe certains membres de celui-là, inquiets de leur sort. Une chose est sûre, l’immobilisme auquel on assiste ne peut pas durer : l’année 2016 s’annonçant très difficile, le Président devra  vite  trouver le moyen d’impulser une dynamique à l’action gouvernementale, anticiper les  lourdes conséquences des prévisions généralement pessimistes des économistes. Cela passera-t-il nécessairement par un changement d’attelage gouvernemental ? Rien n’est moins sûr. Ce qui est, par contre, certain, c’est que le discours  d’autosatisfaction du Premier ministre, il y a quelques jours, devant le Parlement, ne présage rien de bon. Yahya ould Hademine  ne semble percevoir aucune des difficultés qui attendent les Mauritaniens en cette année 2016. La baisse des recettes minières, principales ressources financières du pays, et l’augmentation de la TVA sur divers produits vont peser lourdement sur le bas peuple. Une situation qui ne manquera, certainement pas, d’occasionner, de surcroît, une pression sur les recettes que l’Etat se hâte de combler par une  pression fiscale accrue qui frappe, déjà, plusieurs  entreprises de la place, avec un fort risque de  troubles sociaux. Les dockers du PANPA viennent, d’ailleurs, d’en donner le coup d’envoi, en  menaçant d’aller en grève.  Les prix des produits de première nécessité flambent depuis quelques jours  et rien n’est avancé, dans la déclaration du Premier ministre, pour rassurer les populations.

Mauvais exemple

Si la situation économique est loin d‘être rose, la politique reste, pour sa part, complètement bloquée, depuis l’échec de la dernière tentative de reprise des pourparlers,  entre le pouvoir et  le FNDU. La rencontre tant attendue, entre une délégation de celui-ci et le monsieur Dialogue de  celui-là, le docteur Moulaye ould Mohamed Lagdhaf,  s’est soldée par un énième bide. Le pouvoir  refusant toujours de se prononcer, par écrit, sur la vision du FNDU remise, au gouvernement, en Septembre dernier. Même si le Premier ministre a laissé entendre, dans son discours, que notre démocratie serait « renforcée par la promotion de la culture du dialogue et du pluralisme politique », ce qui, du reste, ne signifie pas grand-chose,  l’horizon demeure bouché. Soit dit en passant, opposition et pouvoir y ont, chacun, sa part de responsabilité. Interrogé sur l’avenir du dialogue en cette année nouvelle, un  responsable de l’opposition affirme cependant que « tout dépend du gouvernement à qui revient l’initiative de débloquer la situation ». Le fera-t-il ? On attend la sortie du Président  ou les décisions du premier Conseil des ministres de la rentrée.

En tout cas, le pays a vraiment  besoin de sortir de cette situation de ni paix, ni guerre. Les différents camps doivent œuvrer à briser le mur de méfiance et aller de l’avant, pour ancrer davantage notre démocratie. Assez tergiversé ! Depuis 2008, on n’a pas réussi à tenir le moindre dialogue inclusif et sincère, alors que nous avons largement les moyens d’y arriver. Intellectuels de la diaspora, imams et érudits, qui ont surtout brillé, jusqu’ici, par leur silence, peuvent et  doivent s’impliquer pour pousser les acteurs politiques à sortir de l’impasse. Toutes les chances ne sont pas épuisées.  La Mauritanie aurait ainsi bien besoin de l’expertise d’un Ahmedou ould Abdallah, ancien ministre, ancien ambassadeur et représentant des Nations Unies ; d’un El Ghassem Wane, depuis peu aux Nations Unies,  de  Kane Mouhamadou, représentant de l’UA au Soudan, d’un Abdessalam ould Mohamed Salah, représentant de la FAO au Liban, avec tant d’autres intellectuels  et sages, pour résoudre, en interne,  ses divergences  politiques. Le président de la République qui  prêche et vante les vertus du dialogue se doit de lui donner, au moins, une chance d’exister. L’excès de velléités détruit notre capacité naturelle à négocier et trouver des solutions apaisantes : c’est bien là le pire exemple que peut donner un président de la République au peuple qu’il est censé représenter, en totalité, au-dessus des partis… alors même que l’amoncellement des difficultés pousse chacun à se replier sur lui-même, son clan, son ethnie, sa classe sociale… 

DL

 

Source : Le Calame

 

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