Exit l’opposition démocratique : Le pouvoir prospecterait des chemins « particuliers » visant à contourner l’opposition regroupée au sein du Forum, quitte à créer ex-nihilo et dans l’urgence de son agenda, une opposition standardisée qui pourrait donner une image duale de son futur monologue.
Telle est l’impression que se fait la majorité des observateurs face à cette coalition nouvellement formée autour du transfuge et ex-vice président du RFD, Bilal Ould Werzeg. Même l’objectif non déclaré de cette boulimique volonté du pouvoir à organiser son dialogue, cacherait mal des intentions inavouées, tel un prolongement du mandat présidentiel qui arrivera à terme à l’an 2019.
Prévu le 10 octobre dernier, reporté une première fois dix jours plus tard, puis dix-sept jours encore beaucoup plus tard, c’est-à-dire le 7 novembre 2015, le dialogue politique envisagé par le pouvoir en place semble buter sur l’intransigeance de l’opposition dans ses deux composantes, la radicale et la modérée, à accepter les conditions d’un scénario politique de fin de crise ficelé sans son assentiment. Une impasse dans laquelle une partie de la société civile semble vouloir s’engouffrer pour jouer aux intermédiaires, dans une tentative d’imiter l’exemple tunisien.
En effet, l’initiative présidée par le Bâtonnier de l’ordre national des avocats, Me Cheikh Ould Hindi, et qui regroupe un certain nombre d’acteurs de la société civile mauritanienne, cherche à jouer aux facilitateurs d’un dialogue politique qui a du mal à s’installer entre l’opposition et la majorité au pouvoir. « Notre initiative est née d’une idée lancée par le Centre arabo-africain pour la communication et le développement. Elle est le fruit de plusieurs rencontres et d’échanges qui ont permis à des syndicats, à des associations socioprofessionnelles indépendantes, au réseau des acteurs non étatiques, à des organisations des droits de l’homme, à des associations de femmes et de jeunes, à formuler le vœu de réunir les divers protagonistes de la scène politique autour de la table du dialogue et de la concertation nationale pour extirper note pays des crises multiformes dans lesquelles il se débat » a indiqué Me Cheikh Ould Hindi. Il a invité pour l’occasion, toutes les parties antagoniques à taire leurs dissensions pour s’entendre sur l’essentiel, loin de toute inimitié ou animosité politique. L’initiative souhaite, avec le concours des leaders politiques dépasser les écueils qui empêchent jusque-là des retrouvailles nationales, demandant à chaque partie de faire le sacrifice de ses exigences non consensuelles pour parvenir à un débat national serein qui prenne en compte l’aspiration du peuple mauritanien.
Cette démarche semble cependant avoir peu de chance d’être suivie, eu égard aux manœuvres que les deux camps de la crise, l’opposition et le pouvoir, mènent sur le terrain. En effet, le pouvoir chercherait à se créer dans le laps de temps qui reste pour le futur dialogue, sa propre opposition montée de toutes pièces à partir de quelques transfuges de l’opposition qu’il était parvenu à embarquer lors des journées préparatoires pour le dialogue national inclusif organisé en septembre dernier au Palais des Congrès. Ce noyau formé par l’ex-président du RFD, Bilal Ould Werzeg et l’ex-député du même parti, Mah Mint Semete et Mohamed Ould Ghadour entre autres, prône le dialogue avec le pouvoir sans aucune condition ni préalable, contrairement aux exigences formulées par l’opposition radicale, le FNDU (forum national pour la démocratie et l’unité) appuyé dans ce combat par l’ancienne opposition dite modérée, la CUPAD, formée par les partis APP de Messaoud Ould Boulkheïr, El Wiam de Boidiel Ould Houmeid et Sawab d’Abdessalam Ould Horma, jusque-là pourtant proche du pouvoir.
Dans un communiqué publié hier, mercredi 21 octobre 2015, cette nouvelle coalition appelée « Coalition citoyenne pour sauver la Mauritanie » a déclaré avoir mené en interne plusieurs consultations qui ont abouti à sa volonté d’engager le dialogue avec le pouvoir.
Le dialogue politique inclusif et consensuel, c’est aussi pour le FNDU, la seule issue pour régler les problèmes du pays. Cette profession de foi a été rappelée lors d’une rencontre organisée mardi 20 octobre 2015 par le Chef de file de l’opposition démocratique, El Hassen Ould Mohamed. Selon lui, la Mauritanie vit sous une crise asphyxiante qui paralyse l’ensemble des programmes et projets de développement et que la seule solution pour en sortir, c’est le dialogue politique sérieux entre toute la classe politique. Pour lui, le pays se trouve devant deux choix, ou parvenir à un accord consensuel ou continuer à s’enfoncer dans l’unilatéralisme au risque d’aggraver la crise sociale. Il a particulièrement chargé le gouvernement pour son manque de toute volonté à apaiser le climat politique. Les dissensions au sein de l’opposition n’ont pas été absentes du débat, car certains intervenants ont appelé les différents fragments de l’opposition à s’unir et à taire leurs divergences.
Une étude plus complète sur la cartographie politique de la Mauritanie à l’aune de la crise actuelle vient d’être dressée dans ce cadre par le Centre Sahara pour les études et la consultation. Cette étude s’est intéressée d’abord au pouvoir en place sous le titre « le pouvoir et l’angoisse de fin de mandat » puis à l’opposition. Selon l’étude, le pouvoir ferait face à quatre scénarios : la révision constitutionnelle, des élections présidentielles anticipées, le changement de régime politique vers un régime de type parlementaire, ou la grande surprise, le renoncement du président Mohamed Ould Abdel à briguer plus de deux mandats et son éloignement du pouvoir en 2019.
Concernant l’opposition, elle est diagnostiquée à la lumière du thème suivant : « l’opposition et la stérilité du combat ». Là aussi, l’étude prévoit trois scénarios face auxquels est confrontée l’opposition, ou bien elle rejoint le dialogue prévu le 7 novembre prochain, ou bien elle le boycott, ou bien elle se fragmente de nouveau.
Cheikh Aïdara
Source : L’Authentic.info
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