Tournée présidentielle : Quartier libre ! On tabasse les populations !

Loin d’être une visite normale, comme celles qui l’ont précédé dans les deux Hodhs et en Assaba, la tournée du président Mohamed Abdel Aziz dans le Brakna et le Trarza a pris l’allure d’une vendetta, où des éléments de la garde présidentielle en tenues civiles et milices privées enturbannées ont ravi la vedette.

 

Filés au faciès, des jeunes ont été arrêtés et embastillés, des femmes terrorisées, alors que le cortège présidentiel évoluait au milieu d’une scène surréaliste, tout droit sortie d’une séquence de la célèbre série Matrix.

« Heureusement ! » C’est le OUF que venait d’exhumer les partisans de Hamady Soma Ba dit Balas, président du parti Arc-en-cercle, qui venait d’être libéré après des heures de garde-à-vue au commissariat de Dar El Barka dans le Brakna. Il payait pour avoir osé porter main forte aux populations locales, menacées d’expulsion de leurs terres ancestrales. Celles-ci sont en voie d’être confisquées par l’Etat au profit d’investisseurs étrangers arabes qui comptent y développer de grandes fermes agricoles.
 

Mais la joie de Balas sera de courte durée. Têtu comme seuls savent l’être les combattants des causes justes, il sera arrêté de nouveau au Trarza, pour s’être aventuré dans le village de Tiambène. Les habitants, victimes d’une expropriation foncière portant sur des champs de manguiers, étaient entrés en rébellion contre l’Etat mauritanien qui avait attribué le champ à une Noria du régime. Treize femmes du village, opposées a cette usurpation de domaine communautaire sont devant le tribunal régional de Rosso. Elles sont accusées d’avoir cueilli les fruits du champ contesté. Pour l’empêcher d’exprimer sa solidarité, Balas sera de nouveau arrêté par la gendarmerie locale puis remis au commissariat de police de Tékane. Il a été relâché après près d’une journée et demie de garde-à-vue sans manger. Ce qui risquait, selon ses partisans, de mettre sa santé en danger, lui qui développe un diabète.

Plus pitoyable, cette sortie du parti UFP qui se démarque de l’IRA, comme si le pouvoir faisait la différence entre les deux. Le parti de Mohamed Maouloud dénonçait l’arrestation de quelques uns de ses militants au cours du passage du président Aziz dans la localité de Dar El Barka, soulignant qu’ils « n’appartiennent pas à IRA ». Il s’agit de Sidi Ould Yali, Isselmou Ould Jidou, Bah Ould Jidou et Cheikh Taher Dia. Pourtant, ce dernier affirme émarger à l’UPR, parti Etat et non à l’UFP. Au lieu de condamner toutes les arrestations arbitraires qui ont visé plusieurs personnes dans le Brakna, le Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU), cette opposition « Tigre en papier » qui gesticule plus qu’elle n’agit, semble ne s’intéresser qu’à sa coterie, en dénonçant les arrestations et répressions en son sein sans égard pour les autres victimes de l’arbitraire.

C’est surtout sur le mouvement IRA et ses militants que s’abattra la main répressive de la garde présidentielle et des milices formées sur place pour terroriser les fauteurs de troubles. Les jeunes de Rosso seront traqués au faciès, battus à plate-couture avant de se faire convoyés vers des lieux inconnus. D’autres sont capturés dans les maisons, en l’absence de tout respect des procédures. Un militant d’IRA, particulièrement emporté, osa ainsi insulter le président Aziz en face. Il fut aussitôt neutralisé, balancé dans une Toyota puis convoyé vers une mystérieuse destination. Les partisans d’IRA ont dénombré plus d’une quinzaine d’arrestations dans leurs rangs. Celles-ci auraient été opérées par des personnes en tenue civile.

Evoluant en totale illégalité, les autorités administratives du Trarza auraient ainsi mobilisé une milice de 400 jeunes, dont une grande partie de repris de justice, pour traquer tous les opposants à la visite présidentielle. Un tel scénario a été utilisé en 2012 contre les jeunes militants du « Mouvement du 25 février » qui demandaient le départ du président Aziz dans le sillage du « Printemps Arabe ».

Ainsi, en faisant appel à des forces parallèles irrégulières, l’administration locale montrait toute son impuissance à travailler dans la légalité pour faire maintenir l’ordre. En réalité, elle montrait à quel point la visite du président Aziz semblait impopulaire. Car si pour aller à la rencontre de ces concitoyens, un président de la République doit s’entourer d’une aussi imposante armada militaire, des questions doivent se poser, selon l’avis de Vadel Ould Bilal, un opposant de la ville. Ainsi, certains hommes politiques se sont érigés en « chef de gang. Certains parlent déjà de la « Milice de Dramane » du nom de l’ancien ministre du Commerce, dont les forces auraient été rappelées à la rescousse, pour reprendre du service contre les militants d’IRA.

Aux dernières nouvelles, tous les détenus du mouvement antiesclavagiste au niveau de la police, au nombre de 18, auraient été libérés sauf le bloggeur, Mohamed Ould Vall. Il resterait une douzaine au niveau de la gendarmerie et une dizaine aux mains de la garde. Il semble que le procureur de la République de Rosso a déjà déposé en prison douze militants du mouvement, dont trois hommes incarcérés à Rosso et neuf femmes convoyées vers la prison des femmes de Sebkha à Nouakchott. Ce groupe aurait été arrêté dans la localité de Chabene relevant de la commune de Jidrel Mohguen.

Tout porteur de banderole aux slogans critiques était ainsi saisi et sa pancarte confisquée. Il en fut ainsi pour un groupe d’habitants de Tivirit, localité située à quelques kilomètres de Nouakchott sur la route de l’Espoir. Ils réclamaient le déplacement du site d’enfouissement des ordures qui étaient devenu un véritable dépotoir à ciel ouvert depuis le départ de la société française Pizzorno qui était chargée de la collecte et de l’enfouissement des ordures ménagères de Nouakchott.

Même les journalistes n’auraient échappé au pogrom car il est question d’une caméra confisquée alors que son propriétaire tentait d’immortaliser l’insulte directe adressée par un militant d’IRA au président Mohamed Abdel Aziz. Un autre journaliste perdra lui aussi sa caméra alors qu’il filmait une chaude altercation entre un des fils de l’Emir du Trarza et un groupe de jeunes partisans du président du Sénat, Mohcen Ould El Haj.

Mais la guerre du Trarza ne fut pas seulement militaire et sécuritaire. Une armée d’animateurs de sites électroniques, pour ne pas dire journalistes, ont été les bras armées médiatiques du pouvoir. Reportages mensongers, amalgames, mauvaises informations, insultes et diffamations contre tout opposant, ont alimenté pendant des jours leurs fils d’actualité tronqués.

MOMS / Envoyé Spécial

 

Source : L'Authentic.Info

 

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