Harcèlement sexuel en Mauritanie : libérez la parole des femmes Par Binta Baba SY et Mohamed DJIGO

À l’approche de la Journée de la Femme, il est important de mettre en lumière un fléau qui gangrène  notre société. Souvent on entend parler dans les médias des cas de harcèlement sexuel que subissent bon nombre de femmes dans les pays arabes.

 

Alors qu’en Mauritanie ce sujet est tabou et personne n'en parle, n'empêche, cette pratique touche aussi notre pays sauf que chez nous, il est normal qu’une femme qui marche tranquillement dans la rue se fasse harceler sans que cela ne choque personne. 

Combien de femmes subissent cette pratique au quotidien sans broncher et combien d’entre elles sont harcelées au travail par leurs chefs de service, directeurs,… et se taisent par peur de perdre leur boulot ? Je pense qu’une définition de harcèlement sexuel s’impose pour mieux comprendre ce phénomène, il est donc important de savoir ce que dit la loi de notre pays sur le sujet. 

Le harcèlement sexuel est « un enchaînement d'agissements hostiles dont la répétition affaiblit psychologiquement la victime, dont le but est d’obtenir une relation sexuelle avec la victime ».

La loi française mortifiée est allée plus loin dans la définition, elle étend  « le harcèlement sexuel aux cas de harcèlement moral à base de sexisme (déjà prévus par la loi). Le harcèlement sexuel désigne alors une situation dans laquelle une ou plusieurs personnes sont soumises de manière répétée à des propos ou pratiques visant à les réduire à leur identité sexuelle ». Les cas principalement visés sont des employés soumis aux « fantaisies » de leurs collègues ou supérieurs.

Il désigne aussi les sollicitations de faveurs sexuelles au travail sous peine de sanction.

Mais alors que dit la loi mauritanienne sur le sujet ?

Autant dire que cela revient à chercher une aiguille dans une botte de foin car le harcèlement sexuel n’est pas explicitement mentionné dans le code pénal, il condamne les infractions sexuelles dans son article 309 mais, le harcèlement sexuel qui est les prémices d’un passage à l’acte de violence n’y est pas. On le retrouve dans l’ordonnance portant protection pénale de l'enfant (OPPE), dans son article 25, qui punit de deux mois á huit mois d'emprisonnement et de 100.000 à 140.000 ouguiyas d'amende « le fait de harceler un enfant en usant d'ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, par une personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ».

Il est important d’éduquer la société sur certaines comportements par des campagnes de sensibilisation sur le sujet, faire comprendre qu’il n’est pas normal de harceler une femme sous prétexte qu’elle est habillée d’un pantalon ou d’une jupe car comme le dit l’expression bien connue, « l’habit ne fait pas le moine» ; il faut arrêter avec ces idées reçues qui font du mal à notre société et agir maintenant pour mettre en place des lois et des outils de protection pour ces femmes:

  •  Mise en place d’une loi qui punit le harcèlement sexuel
  • Formation des policiers dans les commissariats sur l’accueil des victimes
  • Mise en place de cellules d’aide pour les victimes

Le harcèlement sexuel est le premier pas vers les violences faites aux femmes ; pour combattre les problèmes d’agression sexuelle dont sont objet les jeunes filles et les femmes dans notre pays, il faut éduquer et informer pour que dans la conscience collective la femme soit traitée avec respect et qu’elle  puisse jouir des libertés élémentaires comme celle de marcher dans la rue sans se faire siffler ou insulter.

Le premier pas de ce long processus est la libération de la parole des victimes : arrêtons de les traiter comme des coupables. Si à chaque fois qu’une femme se fait harceler dans la rue, on pense que cette personne peut être ma fille, ma femme, ma mère, on agira comme il se doit.

 

Binta Baba Sy

Binta42000@gmail.com

Lima, Pérou

Mohamed DJIGO

djigo1@hotmail.com

 

(Reçu à Kassataya le 6 mars 2015)

 

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