A l’occasion du 5eme anniversaire de la création du Mouvement Pour la Refondation (MPR), le président, Dr Kane Hamidou Baba a présenté un rapport moral dont voici la teneur.
Camarades membres du Comité Permanent,
Camarades membres du Bureau Exécutif,
Je voudrais avant tout saluer les cadres et militants de notre Parti qui viennent de l’intérieur du pays, de keur Macene à Ould Yenge, de Kiffa à Bassikounou et les remercier chaleureusement pour leur présence significative à cette session extraordinaire du Bureau Exécutif de notre Parti, le MPR. Bienvenue chers camarades.
Cette session marque le 5ème anniversaire de la création du MPR et se tient sept mois après la restructuration du Parti en date du 31 mars 2014. Ce 5ème anniversaire du Parti se déroule au moment où certains de nos camarades qui nous ont toujours accompagnés ont été rappelés à Dieu, je pense en particulier à Haby Sall, Ba Seydou Djoubguel et plus récemment encore à Baidy Niang de OLO OLOGO. Je vous demande de réciter la Fatiha pour eux. wo ina lilaah wo ina Eleyhi wo rajioune. Vous me permettrez également de vous transmettre les salutations militantes de notre ami Sidi O/ Kleib, 1er Vice-Président du Parti, qui est malade depuis quelques jours et qui souhaite pleins succès à nos travaux. Nous lui souhaitons aussi un prompt rétablissement.
Chers camarades, la restructuration du parti, faite sur la base d’un mandat que vous m’aviez donné, a été faite 4 mois après le boycott des élections législatives et municipales de novembre 2013. Il vous souvient qu’un débat avait suivi cette décision et au terme d’une évaluation sans complaisance, le comité permanent et le Bureau Exécutif sortants avait estimé que dans les conditions de l’époque, il fallait privilégier les intérêts nationaux plutôt que les intérêts étroits d’un parti. C’est ainsi que notre non-participation aux élections législatives et municipales faute de dialogue sérieux, faute de transparence et sur fond d’état civil discriminatoire, a été par la suite largement compris au regard de la gestion opaque et chaotique des élections de 2013. Et pourtant, il vous souvient qu’à l’époque, nous avions lancé notre initiative de Feuille de route pour un compromis national. Bien que cette initiative avait rencontré un intérêt certain auprès de l’opposition et de certaines chancelleries, le pouvoir en place, après avoir fait semblant de l’encourager, s’était finalement recroquevillé sur l’axe de la gestion unilatérale de son processus électoral. La suite des évènements, avec la posture prise par le pouvoir dans son semblant de dialogue pour les présidentielles n’était qu’une répétition de la bêtise commise lors des élections précédentes. Les mêmes causes produisent les mêmes effets. Nous avions donc boycottés les élections présidentielles, parce qu’aucun élément nouveau ne s’était produit entre novembre 2013 (date des législatives) et juin 2014 (date de la présidentielle) ! Au contraire, le déroulement des législatives et municipales nous avaient conforté dans le fait que les conditions n’étaient point réunies pour des élections présidentielles crédibles et consensuelles. D’ailleurs, d’autres forces politiques qui avaient pris part aux premières élections se sont réalignées sur la position de boycott lors de la présidentielle du 21 juin 2014.
Chers camarades,
Avant ces élections présidentielles, l’élément nouveau à noter, c’est la création le 1er mars 2014, à l’issue de ses assises, du Forum National pour la Démocratie et l’Unité (FNDU). Pour la première fois dans l’histoire politique de notre pays, on assiste à un vaste rassemblement regroupant 17 partis politiques, les principales centrales syndicales du pays, des organisations de la société civile, ainsi que d’éminentes personnalités indépendantes. Ce Forum est né du constat de notre recul démocratique et du délitement de notre unité nationale, c’est pourquoi il porte bien son nom : Forum pour la démocratie et l’unité. Votre Parti, le MPR a pris toute sa place dans la création et la mise en œuvre des objectifs du Forum.
Confronté, avant tout, à la nécessité d’un boycott actif des présidentielles, le Forum a organisé une marche gigantesque à Nouakchott, le 4 juin et une seconde marche à Nouadhibou, le 18 juin. Bien que les missions envoyées à l’intérieur du pays furent tardives et ne touchèrent pas toutes les localités, il est connu que le taux de participation fut extrêmement bas, malgré la mobilisation et la surenchère des moubadarates et des soutiens du candidat Mohamed O/ Abdel Aziz.
De fait, ni son investiture auquel n’ont assisté que les « obligés géographiques » de la sous-région, ni la formation de son gouvernement n’ont réussi à convaincre de sa légitimité. Quant aux institutions parlementaires (Assemblée nationale et Sénat), elles tournent à vide, sans prise sur les dures réalités économiques, sociales et politiques que traverse le pays. Les 2/3 des sénateurs auraient dû être remplacés en 2011 et en 2013, conformément à la constitution, mais Mohamed Ould Abdel Aziz ne regardait que vers juin 2014 !
Chers camarades, le Forum national pour la démocratie et l’unité après avoir franchi avec succès l’étape de la dé crédibilisation des élections, s’est attelé à renforcer ses capacités d’action. C’est ainsi qu’au cours des trois derniers mois, nous avons préparé un programme assorti d’une charte et d’un plan d’action. Votre Parti accueille les réunions du Forum et les nouvelles structures dirigeantes seront bientôt mises en place.
Chers camarades, outre le fait que nos partenaires de L’Alliance Patriotique (ADIL, Renouveau et MPR) ont pris une part décisive à toutes les étapes du Forum, nous avons engagé une réflexion sur la nécessité de regrouper certaines formations politiques afin de créer une coalition, à terme, un parti unifié susceptible de représenter une alternative et de redonner espoir au peuple mauritanien. Vous êtes invités à vous prononcer sur ce point. Les arguments qui militent en faveur de ce regroupement me paraissent plus importants que les inconvénients. Je rappelle d’abord que l’acte fondateur du MPR est de réaliser l’intégration nationale et la démocratie dans la justice sociale. L’émiettement du paysage politique ne contribue pas à cela. L’intégration nationale constitue le mécanisme par lequel nous voulons renforcer l’unité du pays, or tous les partis, pris isolément, peinent à refléter nos réalités sociales et culturelles. Par ailleurs, la meilleure manière de nous donner une chance d’appliquer notre programme réside dans la démocratie, or seule une coalition électorale forte peut remporter des élections nationales. Ce qui est vrai pour les autres pays, l’est pour la Mauritanie. Enfin, ce regroupement permettra de réaffirmer et d’amplifier notre attachement à la justice sociale, par la lutte contre les atteintes aux droits de l’Homme.
Chers camarades, à la base des maux dont nous souffrons, on trouve ce sentiment largement partagé d’exclusion. Exclusion sociale, exclusion, économique et politique. Malheureusement, ce sentiment d’exclusion à la fois structurelle (pratiques et séquelles esclavagistes, discriminations ethniques, préjugés de castes) ; et conjoncturelle (considérations régionales, tribales et claniques), constitue le principal risque qui mine la paix sociale et hypothèque dangereusement l’unité nationale et la cohésion sociale.
Parce que la menace principale, pour notre pays, réside dans la forme d’exclusion structurelle, nous avons engagé depuis quelques mois des discussions avec d’autres formations politiques et groupes sociaux qui partagent ce diagnostic afin de rechercher des solutions consensuelles à travers des mécanismes pour renforcer l’unité nationale dans la justice sociale. Le processus suit son cours et devrait conduire graduellement vers un débat national impliquant l’ensemble des forces vives de nos communautés nationales. Le MPR reste fermement attaché à la mise en œuvre d’un Nouveau Pacte de Confiance, qui passe par le dialogue. Nous l’avons déjà dit, pour nous, le dialogue n’est pas seulement une nécessité, mais il doit être vécu comme une nouvelle forme de civilisation.
Face aujourd’hui à la montée des revendications « identitaires » (manifestes, associations et/ou Collectifs Haratine, Pulaar, Soninké Wolof, Bambara, etc.) et qui traduisent le malaise de la société globale, le pouvoir ferait une grave erreur en y voyant l’expression d’un extrémisme, mais la classe politique également, y compris et surtout l’opposition démocratique ! Il faut se rendre à l’évidence, en plus de nos héritages pré-coloniaux, nous sommes confrontés aux questions nationales et sociales face à la problématique de l’Etat-nation tel que nous l’avons hérité du colonialisme. Çà ne marche pas ! En Afrique, l’Etat ne peut être que multinational, c’est-à-dire, un Etat qui reconnait et assume sa diversité culturelle, prône l’égalité en droits et en devoirs vis-à-vis de toutes ses communautés et de tous ses citoyens. L’Etat ne peut être fort, que lorsqu’il est juste. Notre Parti, entend organiser une journée de réflexion sur cette problématique des questions nationales et sociales dans le cadre d’un Etat unitaire.
Au cours de la restructuration, nous avions également pris la décision de renouveler l’ensemble des structures de base, comités, sections et coordinations. Il reste entendu que les structures actuelles assurent la transition en attendant les futures instances; et ceci, d’autant plus que les activités que nous avions programmées, dont la campagne de réimplantation ont été retardées. Les raisons tiennent essentiellement à la période des élections présidentielles, suivie du ramadan et des vacances, mais aussi à l’existence des initiatives collectives en cours, dont on attend les développements ; et dans une certaine mesure, au manque de moyens pour toucher le plus grand nombre de localités. Vous êtes invités à vous prononcer sur l’opportunité de la réimplantation.
Camarades,
Notre session extraordinaire du Bureau Exécutif se tient dans un contexte particulier, toujours marqué par une crise de confiance entre l’opposition et le pouvoir. A cela s’ajoute, que nous payerons pendant les mois, peut-être les années à venir, les errements d’un régime qui n’a pas su engager les vraies réformes qu’attendait le pays. Et pourtant, entre 2011 et 2013, nous avons bénéficié d’un cumul de rentes exceptionnelles provenant des secteurs minier et halieutique, ainsi que de dons généreusement offerts par certains partenaires bilatéraux, Arabie Saoudite et Libye notamment. Mais, les capacités redistributives de l’économie sont quasi nulles, par manque de vision. Les investissements réalisés sont globalement impertinents, faiblement productifs, sans prise sur le chômage, en particulier celui des jeunes. L’année 2015, apparaît déjà comme celle de tous les dangers. En effet, ni les ressources tirées de la vente du fer et de l’or, ni celles provenant de l’UE ne seront au rendez-vous, avec en prime un déficit hydrique inquiétant aggravant les conditions de vie des populations vivant en milieu rural. Il va sans dire, que l’insécurité dans les villes, qui a déjà connu un pic durant l’année 2014, ira en s’aggravant.
Mes chers camarades, ces sombres perspectives sont accentuées par les menaces qui pèsent sur nous et au Sahel, avec la question du terrorisme, la propagation de nouvelles maladies (EBOLA) et qui appellent une réponse collective, tant au niveau national que régional et international.
Seule, une bonne politique intérieure, passant par un dialogue plus que nécessaire, peut permettre à notre pays d’éviter d’aller droit vers une catastrophe.
Même si nos efforts n’ont pas été récompensés, nous avons toujours exprimé notre disponibilité au dialogue, mais le MPR n’entend s’engager dans un dialogue sérieux qu’avec ses partenaires du FNDU.
Chers camarades, la situation du Mali constitue toujours pour nous une source de préoccupation majeure. Nous souhaitons à ce pays, frère et voisin, de retrouver la paix, la stabilité et son intégrité territoriale dans le respect de sa diversité. D’autres foyers de tension existent en Afrique et dans le Monde Arabe (RCA, Palestine, Syrie, Iraq) rendant tous notre environnement plus dangereux et plus incertain.
Ce tableau apocalyptique est cependant atténué par trois évènements qui viennent de se produire et qui constituent une lueur d’espoir, quant aux avancées démocratiques et aux progrès des causes justes. Il s’agit en premier lieu de la chute d’un régime autocratique au Burkina Faso et qui a échoué dans sa tentative de réviser une constitution à des fins personnelles. Nous saluons la combativité du peuple Burkinabé et espérons que ce qui vient de se passer aux pays des Hommes intègres servira de leçons aux autocrates en Afrique. C’est le lieu également de se féliciter des élections législatives qui viennent de se dérouler en Tunisie et dont les résultats ne sont contestés par aucune des parties. Enfin, la décision prise par le Gouvernement Suédois de reconnaitre la Palestine en tant qu’Etat indépendant est un acte de justice dont nous espérons qu’il inspirera d’autres puissances, particulièrement occidentales, plus promptes à soutenir les agressions israéliennes qu’ à compatir avec le peuple palestinien martyrisé.
Chers camarades, militantes et militants,
La présente session extraordinaire du BE qui coïncide avec le 5ème anniversaire du Parti, constitue une occasion de revisiter le chemin parcouru et de poser un jalon important pour faire partager les idéaux du MPR et pour consentir aux sacrifices nécessaires pour rendre possibles nos aspirations, qui sont aussi celles de tous les mauritaniens épris de justice, de paix et de démocratie.
VIVE LA REFONDATION, POUR QUE VIVE LA MAURITANIE !
Nouakchott, le 02/11/2014
Dr KANE Hamidou Baba
Source : Agence Tawary
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