Nouakchott a accueilli un sommet régional visant à à renforcer les pouvoirs juridiques de l’Union africaine (UA), notamment pour régler les conflits. Les Etats membres tardent à mettre leurs engagements en application et cela nuit «aux libertés fondamentales», s’alarme Roger Nkodo Dang, le premier vice-président du Parlement panafricain dans une interview avec Le Courrier du Sahara.
INTERVIEW La réunion parlementaire régionale de Nouakchott s’est achevée vendredi 26 septembre sur une simple recommandation: il est demandé aux pays membres de l’UA, selon le communiqué final, de veiller à ce que leur pouvoir exécutif élabore régulièrement des rapports sur l’état de mise en œuvre des engagements relatifs aux instruments juridiques et décisionnels de l’Union Africaine.
Dès l’ouverture de la rencontre mercredi, le représentant du Parlement panafricain, son premier vice-président Roger Nkodo Dang (photo ci-dessous ©Le Courrier du Sahara), avait dénoncé la «lenteur inquiétante» du processus de ratification et d’internalisation des principaux instruments juridiques de l’Union. Une lenteur qui, selon lui, «sape la crédibilité des institutions africaines et empêche des millions de citoyens africains de jouir des libertés fondamentales et des droits humains élémentaires.»
Monsieur Nkodo Dang, selon vous, qu’est ce qui explique «la lenteur» dans la ratification des décisions des Etats membres de l’UA ?
La Conférence des chefs d’Etats et des gouvernements de l’Union africaine prend beaucoup de décisions. Les Etats les signent librement. Mais on a l’impression que le problème se pose au niveau de la ratification. On peut croire qu’il s’agit de lenteurs. Ce sont des questions qui relèvent de la souveraineté des Etats. Cela dépend aussi des modes de ratification dans chaque Etat. Toutefois, je crois qu’une fois qu’un pays a librement signé un accord, le problème de ratification ne devrait pas se poser pour permettre justement à cet accord de se mettre en place.
Quels sont les décisions et accords les plus concernés?
Il y a la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance et la Charte africaine de la fonction publique et des valeurs partagées et de l’administration. Cela concerne aussi un certain nombre de décisions de l’Union africaine, comme celle de Maputo où les chefs d’Etat se sont accordés à consacrer 10% du budget national à l’agriculture et 15% à la Santé. Toutes ces décisions n’ont pas été appliquées. Si l’Afrique demeure le continent de la faim, c’est parce que certaines de ces décisions n’ont pas été mises en place par les Etats membres.
Le processus est complexe, vous l’admettez?
C’est certain. Il faut non seulement ratifier mais aussi internaliser ces accords dans chaque Etat afin qu’ils aient une valeur juridique interne. Il y a deux démarches à suivre. Il faut rappeler que dans l’architecture juridique, c’est la norme internationale qui prime. Mais compte tenu du fait qu’il y a une procédure pour en arriver là, les Etats doivent faciliter ces procédures. Car la plupart des conflits que nous traversons pourraient être réglés avec les chartes de l’Union Africaine, notamment la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance et la Charte africaine de la corruption. La plupart de ces conflits sont internes et sont liés à la mauvaise gouvernance et à des conflits post-électoraux. Nous devons donc tout faire pour éviter et prévenir ces conflits avant que l’extérieur ne vienne le faire à notre place.
Est-ce que la réunion de Nouakchott aura vraiment contribué à faire avancer ces problèmes?
Les participants doivent prolonger la réunion, une fois rentrés dans leur pays, en faisant la promotion des instruments qui n’ont pas été encore ratifiés par leur Etat. Ce sont les parlementaires au niveau national et deux du Parlement Panafricain qui doivent se mobiliser afin que ces instruments soient ratifiés et internalisés. C’est une réunion très importante et j’estime qu’un coup d’envoi a été donné. Mais il ne faut pas que tout cela s’arrête dans un salon de Nouakchott. Non! Nous irons au-delà afin que les pays d’Afrique centrale et du nord puissent se mettent résolument au travail.
Pourquoi avoir choisi de donner ce «coup d’envoi» depuis Nouakchott?
Son Excellence Mohamed Ould Abdel Aziz est le président en exercice de l’Union Africaine. Il a présidé le dernier sommet de l’Union africaine au cours duquel le protocole relatif au Parlement Panafricain a été adopté. Il est donc tout à fait normal que nous venions ici et nous le remercions de l’accueil qu’il nous a réservé. Il faut maintenant que la Mauritanie soit parmi les premiers pays à ratifier ce traité. Nous pensons que cela se fera vu la détermination du chef de l’Etat mauritanien à faire avancer les choses au niveau du continent africain.
Source : Le Courrier du Sahara (Le 26 septembre 2014)
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