Barack Obama semble avoir entendu le reproche qu’on lui fait de ne pas s’intéresser à l’Afrique autant que le régime de son prédécesseur Georges Bush. En effet, après sa visite au Ghana en juillet 2009, où il a martelé l’idée selon laquelle l’Afrique a besoin d’institutions fortes plutôt que l’hommes forts, il projette de tenir à Washington un sommet Etats-Unis / Afrique, les 5 et 6 août 2014, autour des thèmes de la gouvernance, de la sécurité et des futures générations.
Les populations africaines peuvent nourrir beaucoup d’espoirs
Tous les chefs d’Etat africains y ont été conviés à l’exception de ceux du Zimbabwé, du Soudan et de l’Erythrée considérés comme des pestiférés aux yeux des Etats-Unis à cause de leur gouvernance exécrable. Les questions qui seront abordées lors de ce grand rendez-vous inédit, comme l’on peut le constater, sont au cœur même des préoccupations des peuples d’Afrique. L’on ne peut donc que s’en réjouir d’avance et saluer l’initiative tout en souhaitant que la montagne n’accouche pas d’une souris. Déjà, les populations africaines qui sont éprises de démocratie et qui en sont sevrées, peuvent nourrir beaucoup d’espoirs sur cette rencontre si l’on s’en tient aux propos de la vice-secrétaire d’Etat américaine en charge de l’Afrique, Linda Thomas Greenfield, concernant ce sommet. En effet, celle-ci a tenu, lors d’un point de presse avec des journalistes africains, à véritablement mettre mal à l’aise certains chefs d’Etat face à Barack Obama, les 5 et 6 août prochains à Washington. Particulièrement aux présidents africains qui sont tentés de réviser la loi fondamentale de leur pays pour se maintenir au pouvoir, elle a rappelé que la position américaine sur la question n’a pas varié d’un iota depuis les déclarations de John Kerry à Kinshasa en mai 2014. A cette occasion, l’on se souvient, le patron de la diplomatie américaine avait laissé entendre que son pays était contre les tripatouillages de Constitutions qui permettent aux présidents sortants de briguer un mandat supplémentaire. De ce point de vue, l’on peut imaginer facilement l’inconfort dans lequel se trouveront certains chefs d’Etat lorsque Barack Obama abordera les questions liées à la gouvernance politique qui est un des thèmes qui figurent à l’ordre du jour de ce rendez-vous USA-Afrique. Si les présidents qui nourrissent des velléités de tripatouiller leur Constitution avaient la possibilité d’esquiver le sommet à venir de Washington, ils n’hésiteraient certainement pas à s’y essayer. Mais comme il s’agit de la grande Amérique, ils savent les conséquences auxquelles ils pourraient s’exposer en ne faisant pas le déplacement de Washington les 5 et 6 août prochains. Ils feront donc contre mauvaise fortune bon cœur en honorant l’invitation de « l’homme le plus fort du monde », quitte à se faire tout petit au fond de la classe pour éviter les regards.
Les Africains sont les otages d’autocrates maquillés en démocrates
Pendant que les présidents véritablement démocrates seront détendus face au locataire de la Maison Blanche, les tripatouilleurs de Constitutions devant l’Eternel vivront un enfer pendant les 48 heures que durera le sommet. Mais personne ne doit les plaindre outre mesure, car par leurs pratiques franchement exécrables de la démocratie et par leur rapport vicieux au pouvoir, ils donnent des verges aux autres pour les fouetter. Malheureusement, ils renvoient au reste du monde l’image d’une Afrique qui refuse de grandir et qui se complaît dans des pratiques bouffonnes et arrière-gardistes qui l’exposent à la risée des autres.
Que l’on n’aille surtout pas accuser Washington de s’ingérer dans les affaires intérieures des pays africains. En effet, les USA ont la responsabilité morale, peut-on dire, de ne pas rester indifférents face aux cris de détresse des Africains dont la plupart sont en réalité des otages entre les mains d’autocrates maquillés en démocrates. L’Amérique doit d’autant plus avoir cette posture qu’elle investit beaucoup d’argent en Afrique dans des programmes spéciaux de développement sur lesquels aucun tripatouilleur de Constitution ne peut cracher. Barack Obama est dans son bon droit de brandir le fouet en interpellant les gouvernants africains afin qu’ils ne trichent pas avec la démocratie, sans laquelle il est pratiquement impossible de construire dans la durée. C’est pourquoi d’ailleurs l’interpellation américaine doit non seulement s’adresser aux présidents sortants qui veulent tripatouiller la Constitution de leur pays pour s’accrocher au pouvoir, mais aussi à tous ceux qui ont mis en place des Constitutions taillées sur mesure en termes notamment de mandats illimités qui n’offrent, de ce fait, aucune possibilité d’alternance.
Pousdem PICKOU
Source : Le Pays Le 10 juillet 2014 (Burkina Faso)
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