Les Mauritaniens sont appelés aux urnes ce samedi 21 juin à l’occasion d’une élection présidentielle boycottée par une quinzaine de partis d’opposition. Près de 3000 bureaux de vote ont été installés dans le pays pour accueillir les plus de 1 million 300 mille personnes inscrites sur les listes électorales.
Son visage est omniprésent. D’immenses portraits à sa gloire ont été dressés sur les principaux axes routiers de Nouakchott, laissant peu de place aux pancartes des quatre autres concurrents. Aucun doute, le grandissime favori de cette élection est bien le président sortant, Mohamed Ould Abdel Aziz. Un premier sondage dans le pays, réalisé du 8 au 16 juin par le Centre Mauritanien des Etudes et Recherches Stratégiques (CMERS), un institut réputé proche du pouvoir, le donne même vainqueur dès le premier tour avec 64.4%.
Un sondage controversé
Ce sondage controversé a provoqué une réaction amère des adversaires de Ould Abdel Aziz.«Je n’ai pas de commentaire à faire à ce sujet. Ce sondage n’engage que ceux qui l’ont réalisé», tonne Diop Amadou Tijane, le directeur de campagne de Biram Dah Abeid, le prix des Nation Unis pour les droits de l’homme 2013 et président de l’ONG anti-esclavagiste, IRA-Mauritanie. «Il n’existe pas d’institut de sondage en Mauritanie. Ils veulent seulement influencer les électeurs», s’agace le candidat Boydiel Ould Houmeid, leader du parti El-Wiam. «Laissez les rêver. Nous attendons les résultats» a pour sa part lancé le candidat du parti AJD/MR, Ibrahima Moctar Sarr.
L’enjeu : le taux de participation
Le taux de participation est le principal enjeu de cette élection boycottée par 17 partis de l’opposition radicale qui ont organisé une contre-campagne électorale. Ils estiment que les conditions de transparence ne sont pas réunies pour garantir une élection crédible. Dans son dernier meeting jeudi soir à Nouakchott, le président Mohamed Ould Abdel Aziz a exhorté la population à «barrer la route à cette opposition qui entrave la marche du pays vers le progrès et qui «n’a de souci que de nouer des alliances avec ceux qui veulent du mal à la Mauritanie.»
Sur ce fond de polémique et de tension, l’Union européenne n’a pas envoyé de mission d’observation. L’UE, qui évoque une contrainte de temps, se contente d’envoyer deux experts électoraux, comme lors des élections législatives et municipales de novembre-décembre 2013. Celles-ci avaient également été boycottées par une dizaine de partis de l’opposition radicale.
Il y aura en revanche une cinquantaine d’observateurs de l’Union Africaine, une mission de la Ligue Arabe, de l’OIF et des représentants d’ONG africaines comme la RADO du Sénégal, a fait savoir la Commission Electorale Nationale Indépendante.
Pour sa part, l'Observatoire National pour la Surveillance des Elections (ONSEL) a annoncé en conférence de presse jeudi avoir déployé 712 observateurs nationaux (297 à Nouakchott et 415 autres à l'intérieur du pays), a rapporté l’Agence d’Information privée Alakhbar.
La CENI : «Nous avons surmonté les difficultés»
La commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) est chargée d’organiser et de superviser le vote. L’institution électorale avait reconnu ses carences lors des élections législatives et municipales de novembre-décembre 2013. «Nous avons tiré les leçons», a déclaré son directeur de la communication, Abdoulaye Diarra, à la Radio Future Media du Sénégal. «Nous avons surmonté les difficultés et accru l’effort de formation de notre personnel qui a été mis en place trois mois avant l’élection pour s’habituer et s’acclimater aux opérations électorales (…) Les outils qui permettent d’enregistrer les informations sur le vote ont été simplifiés et sont utilisables de façon rapide et fluide par l’ensemble du personnel», a-t-il déclaré au cours de cet entretien.
La cohabitation, au cœur des préoccupations
Quant aux Mauritaniens interrogés par le Courrier du Sahara, ils citent comme priorités l’éducation, la santé et l’emploi. Pour Mohamed, gérant d’une boutique au centre-ville de Nouakchott, l’essentiel réside dans «le respect des droits, le partage du pouvoir politique et économique entre les différentes communautés du pays (Ndlr: Maure, Peule, Soninké Wolof).»
La cohabitation sociale occupe une place fondamentale dans le programme de plusieurs des candidats en lice. «L’unité du pays est menacée et l’on assiste à la montée du tribalisme», a estimé Boydiel Ould Houmeid au cours de sa campagne. «La question de la cohabitation est frontale», a pour sa part déclaré Ibrahima Moctar Sarr qui veut «un débat national qui réunira toutes les communautés du pays pour régler ce problème de cohabitation». De son côté, Biram Ould Dah Abeid affirme combattre «l’apartheid institutionnalisée en Mauritanie et qui martyrise les négro-mauritaniens et les harratins.»
Source : Le Courrier du Sahara
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