Carnets de campagne (2/3)

Le candidat Mohamed Ould Abdel Aziz est à attendu à Aleg. La capitale du Brakna est en ébullition. Les axes routiers, désormais goudronnés, connaissent une intense activité : entre marcheurs et motorisés, la circulation est dense malgré la chaleur qui devient plus forte en cette fin de journée. Tout le monde converge vers le stade de la ville. «C’est notre Stade des Princes», ironise un cadre que je retrouve sur les lieux. En fait, il s’agit d’une grande clôture avec une tribune couverte recevant à peine deux cents personnes.

 

Les premiers venus ont pris place dans la tribune, laissant une tribune montée au Président-candidat et aux officiels qui ne tarderont pas à venir. Exceptionnellement, il avait fait sa prière du vendredi dans la capitale du Gorgol d’où il avait lancé sa campagne la veille. Ici il avait cherché à parler devant une foule représentative de ce qu’est la population mauritanienne. Toute la population avait fait le déplacement, ce qui donnait effectivement l’impression d’une retrouvaille mauritanienne avec ses Arabes et ses négro-africains dans toutes leurs composantes.

 

L’introduction de la coordinatrice régionale de campagne n’est pas longue, juste assez pour introduire le principal orateur qui est le candidat. Il prend la parole et fait un bilan de son mandat. Il se permet de temps en temps de lancer des attaques directes, parfois indirectes, à son opposition.

 

Sans trop insister sur la situation d’avant et sur l’héritage qu’il a eu en arrivant au pouvoir, le candidat, il a parlé des réalisations dans le domaine de la sécurité. «Personne n’a oublié la peur que faisaient régner les groupes de terroristes et de trafiquants sur le pays, les attaques dont une a été perpétrée non loin d’ici, les morts mauritaniens et étrangers, victimes de cette activité criminelle…» Le pays peut aujourd’hui s’occuper de son développement en toute quiétude car la sécurité est effective. «Grâce aux efforts entrepris, nous avons désormais une armée qui remplit pleinement son rôle et qui est sollicitée par la communauté internationale pour participer à des opérations de maintien de paix dans les zones de tension. Nous venons d’envoyer un groupe en Côte d’Ivoire et sommes approchés pour en envoyer d’autres ailleurs. C’est qu’on nous reconnait l’efficacité de nos troupes…»

 

La première partie du discours a été ensuite réservée aux acquis en matière religieuse, la tendance étant celle-là. L’impression du Saint Coran, la création d’une station spéciale en études coraniques, puis d’une chaine de télévision pour la Mahadra, cette université qui servait à disséminer un enseignement religieux authentique et modéré…

 

L’état civil modernisé permet désormais de mieux définir les politiques, de mieux connaitre les populations et donc de mieux les servir. C’est dans ce sens que de grande réformes ont été engagées pour améliorer les prestations de la justice, de l’administration qui vit pleinement l’ère de la décentralisation.

 

Les chiffres de la croissance démontrent que le pays est en plein chantier : 7,7% pour 2013, l’un des plus forts taux de la région. «L’inflation maitrisée, nous avons enregistré un excédent budgétaire sans précédent», ce qui revient d’abord à la diminution du train de vie de l’Etat signe d’une bonne gouvernance effective. Les réserves en devises atteignent plus d’un milliard de dollars pour la première fois. L’Etat n’a plus besoin de s’endetter auprès des particuliers comme c’était le cas. Grâce d’ailleurs à la création de la Caisse de dépôts et de développement (CDD), l’argent devient moins cher, ce qui le rend accessible aux faibles entrepreneurs. «Contre les voix qui sèment le doute, il y a les témoignages des institutions financières internationales qui attestent de la bonne tenue de notre économie…»

 

Quatre hôpitaux spécialisés ont été construits, 70 centres de santé de différents types en plus «de l’élaboration d’un plan national de développement du secteur de la santé, à l’élargissement de la sécurité sociale grâce à l’intervention de la CNAM, à la création de l’agence nationale Tadamoune, à la baisse du chômage qui est passée de 31% à 10% selon le BIT…»

 

Le projet d’approvisionnement en eau de la ville de Magta Lahjar est un exemple de ce qui a fait dans le domaine de l’eau. Près de huit cents kilomètres de conduites d’eau pour l’Aftout Chergui, le projet du D’har,le projet d’approvisionnement des régions du Nord, celui de Sélibabi, de Kiffa, de Guérou… partout la maitrise de l’eau et la disponibilisation de l’énergie ont été une préoccupation première.

 

97 partis dont seulement une quinzaine déclarent refuser de participer aux élections sont aujourd’hui actifs dans le pays. «Les libertés d’expression et de presse ont été renforcées dans un climat de sécurité et de stabilité parfait». C’est pourquoi «la révolution des vieillards a échoué à freiner la marche du pays».

 

1884 kilomètres de routes, en plus des aéroports et de nouveaux ports pour équiper le pays en infrastructures de base. L’assainissement bénéficie d’une grande attention. Tout comme l’agriculture qui profite largement aux populations du Brakna.

 

A la fin de son discours, le candidat a rappelé que le vrai enjeu c’est le taux de participation avant d’appeler ses soutiens à venir massivement voter le 21 juin prochain.

 

 

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CARNETS DE CAMPAGNE (3)

 

Aïoun reçoit le candidat Mohamed Ould Abdel Aziz. La capitale du Hodh el Gharbi connait l’effervescence des grands moments. De tous les départements, affluent notables et dignitaires politiques. La région est acquise à Ould Abdel Aziz et elle entend en donner la preuve.

 

Quelques deux semaines avant, un groupe de grands acteurs politiques de la région dirigé par Mohamed Ould Rzeizim, ancien ministre de l’intérieur et ancien ambassadeur à Addis-Abeba et Ezza Mint Hammam, ancienne députée du département, ce groupe a décidé de quitter Adil pour soutenir le candidat Ould Abdel Aziz. Ce qui a été un grand coup. Surtout que les débauchages de personnalités symboliques ne s’est pas arrêté là. Les premiers responsables du RFD locaux ont aussi décidé de prendre le même chemin. Parmi eux Bah Ould Cheikhna Ould Mohamed Laghdaf, un nom bien connu et pesant lourd dans la symbolique de la politique locale et nationale. Le sénateur et le maire élus sous les bannières de Hatem ont déjà rejoint le camp du pouvoir. De quoi faire le plein pour la présente campagne où chacun des acteurs a retrouvé son groupe d’antan et où la situation est redevenue ce qu’elle était d’avant, avec les mêmes alliances, les mêmes factions unies cette fois-ci pour une seul cause.

 

L’ambiance est bonne et ça se voit quand le candidat prend la parole. Il se permet quelques pointes d’humour dans une ville où le sens de l’humour est un atout considérable pour embarquer les foules. C’est ce que le candidat va réussir en se libérant des contraintes du discours traditionnel faisant le bilan par chiffres. Quelques sujets porteurs qui permettent de faire réagir la foule avec des ovations des plus fortes (standing-ovations plusieurs fois).

 

D’abord l’attaque contre l’un des leaders de l’opposition d’aujourd’hui, «celui qui a causé la faillite d’Air Mauritanie» et qui se targue aujourd’hui de demander des comptes et de faire des leçons de morale politique. «Vous le connaissez, tout le monde le connait, je n’ai pas besoin de citer un non…» Mais la foule scandait déjà le nom de l’ancien Premier ministre de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, le président de Adil Yahya Ould Ahmed Waqf. Et quand il parle de «ceux qui étaient des Walis ici et qui ont distribué les places publiques et dont le mauvais souvenir est toujours présent dans vos esprits», ce sont plusieurs noms qui fusent : les Walis qui ont sévi ici sont nombreux et militent tous aujourd’hui dans l’opposition comme ténors.

 

Ensuite la sortie sur l’émiettement de la société. «Chacun veut parler au nom d’un groupe alors que personne ne l’a mandaté. Souvent pour arriver à un dessein personnel. Il y a ceux qui parlent au nom des esclaves, au nom des forgerons, des chérifs, des guerriers, des marabouts, des noirs, des blancs, des basanés, de ceux qui ont les cheveux crépus, de ceux qui les ont lisses… parler au nom d’une faction est devenu un fond de commerce pour les élites perdantes. Ils viennent me voir pour me dire que leurs communautés sont exclus et marginalisées, qu’elles subissent l’arbitraire, je finis par croire que le plus opprimé de tous, c’est bien le Président de la République qui est obligé d’entendre jusqu’au bout ces balivernes qui e convainquent plus et qui sont dangereuses pour l’unité nationale. Notre choix est celui de préserver la liberté d’expression qui ne peut être source de mal, mais c’est à vous de refuser à ces gens de profiter de leurs discours sectaires, d’empêcher la prime à la mauvaise foi…»

 

Enfin cette sortie contre l’appel au boycott. «Maintenant qu’ils ont perdu leur pari sur la révolution, qu’ils savent que l’échec sera au rendez-vous pour toute leurs tentatives d’imposer une gérontocratie ici, ils décident de prôner le boycott pour déstabiliser la marche du pays vers un mieux-être politique et économique. Quand, comme pendant les législatives et municipales, le taux de participation sera bon, ils auront perdu leur dernier pari, celui de jeter l’opprobre sur la démocratie. C’est pourquoi je vous appelle à venir massivement faire échouer leur funeste projet comme vous l’avez fait par le passé».

 

Après le discours, le candidat s’est permis un bain de foule alors que ses soutiens se dispersaient dans la bonne humeur. Le soir, il se plia à la tradition d’une soirée et de multiples rencontres avec les notables et les dignitaires locaux. L’occasion de recueillir par lui-même les engagements à le soutenir et faire probablement quelques engagements pour l’avenir.

 

 

Mohamed Fall Oumeir

 

Source :  Vu De Mauritanie

 

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