Voici Mettou, le film sur les hratines abandonné par Abderrahmane Sissako pour rejoindre la présidence…

Voilà pourquoi le pouvoir avait de quoi s’inquiéter. De passage à Montréal, Sissako annonça dans la lignée de son film engagé Bamako contre la politique du FMI et de la Banque Mondiale en Afrique, qu’il voulait faire un film sur la présence chinoise en Afrique, ( premier allié économique et militaire de régime mauritanien ), puis ce projet certainement trop vaste et trop coûteux fut abandonné pour faire un film avec une héroïne hartania : « le cinéaste mauritanien exilé ( sic ! ) en France nous avait fait part de son intention de tourner un film sur la présence chinoise en Afrique, sujet plus que jamais d’actualité (…)  Le projet semble repoussé puisque Sissako prépare actuellement Mettou, coécrit avec le romancier Mbarek Ould Beyrouk (…). Pour l’homme formé au VGIK à Moscou dans ses années de jeunesse, faire du cinéma demeure avant tout un acte politique…  »

http://quebec.synergiescanada.org/culture/images1058019/images0893/70353ac.html?vue=resume&mode=restriction

Ainsi à force d’ennui et de recherche, on finit par tout trouver. Ce n’est pas un secret d’Etat car déjà en 2011, Jeune Afrique en parlait. Abderrahmane Sissako et son acolyte Beyrouk allaient faire le film avec l’héroïne Hartania Mettou, écrit ensemble en collaboration avec Arte France. Projet largement avancé défendu partout jusqu'à Abu Dhabi…

http://www.abudhabifilmfestival.ae/en/sanad-fund/projects/2011/development-narrative/mettou

quand soudain il fut nommé conseiller à la présidence et depuis, ce film sur Mettou la hartania a été mis dans les oubliettes du jour au lendemain. Il serait intéressant de rencontrer le producteur Denis Freyd  coproducteur de « Bamako » pour savoir ce qu’il en pense car il semble intéressé par les films d’auteurs et non les films de propagande d’Etat… D'ailleurs sur Timbuktu, il est absent…

« SYNOPSIS 
Mettou est une belle et jeune nomade du désert mauritanien Après avoir enterré son mari, elle retourne avec son fils au campement de ses parents. Le pays de Mettou a officiellement aboli l’esclavage en 1981 et pourtant sa famille n’est pas libre. La tradition oblige une veuve à se présenter à ses propriétaires. Mettou rompt alors toute relation avec son père, incapable d’aller à l’encontre de traditions qui ne lui permettent même pas de désirer sa liberté. Elle s’enfuit à la capitale où elle erre dans les rues à la recherche d’un amour idéalisé. Elle y découvre un monde urbain, hostile, où elle parvient à survivre grâce à la pureté qu’elle dégage et qui la protège. »

Une autre version  :

« Mettou est une jeune fille "Haratine", terme qui désigne un esclave affranchi. elle vit dans le désert avec Cheikh, son maître, qui l'a prise pour concubine quand elle avait quatorze ans. Pour le père de Mettou, c'était l'occasion d'être davantage "anoblis". N'ayant pas le choix, Mettou a accepté le mariage alors qu'elle était amoureuse de Mabrouk, un garçon de vingt ans.
Trois ans plus tard, quand Cheikh meurt, elle se retrouve veuve avec un petit garçon. Elle doit enterrer seule son mari au pied d'un arbre dans le désert, personne n'étant là pour l'aider. 
Mettou décide alors de confier son fils à sa mère et de partir à Nouakchott dans l'espoir de retrouver Mabrouk.

A son arrivée, du haut d'une dune qui surplombe un terrain vague, elle découvre, fascinée, un ballet de voitures dans lesquelles des femmes apprennent à conduire. Elle y voit un symbole de liberté et demande à apprendre. Mettou fait ainsi la connaissance d'un homme qui l'aide à découvrir cette ville où elle n'est jamais allée.

Obsédée par l'idée de retrouver Mabrouk, elle fait son portrait aux gens qu'elle croise, "vingt ans, vingt-et-un peut-être, grand mais pas trop, qui porte une amulette au bras droit." Elle l'imagine riche et instruit…

Le projet "Mettou" a reçu le soutien du Fonds francophone de production audiovisuelle du Sud (2012) »

http://www.africultures.com/php/index.php?nav=film&no=16381

Jeune Afrique écrit alors un article avec un titre éloquent : « Sissako : l’homme du président… »

« Le cinéaste Abderrahmane Sissako a été nommé, le 16 juin, conseiller chargé de la culture auprès du président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz. Né de père malien et de mère mauritanienne, le réalisateur maintes fois primé a appris sa nomination à Nouakchott, où il prépare son prochain film, dont le tournage débutera en octobre. Mettou, c’est son titre provisoire, évoque le thème du mariage précoce en Afrique. Il a été coécrit avec le romancier Mbarek Ould Beyrouk et sera produit par Arte France. »

http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2632p008-009.xml11/

Pourquoi avoir laissé tomber un sujet d’actualité mauritanienne si brûlant pour aller plonger dans Timbuktu. C’est désormais clair… Par pur poker du marketing. Il ne pouvait pas traiter honnêtement, en étant engagé comme sur Bamako, un sujet pareil en étant conseiller d’un régime pareil qui a aux trousses le classement numéro 1 des pays esclavagistes, avec sur le dos Birame et son IRA,  prix ONU des droits de l’homme. Du coup, il a pensé que traiter Timbuktu ferait l’affaire pour Cannes à tout point de vue avec l’Etat mauritanien dans le bon rôle sécuritaire autour du projet. 

Il a réussi car le film a eu un écho mondial et il sera vu inchallah car tout travail mérite salaire mais il n’a pas eu le moindre prix à Cannes, ce qui n’était pas prévu pour un homme si coopté et ce, peut-être parce que justement le scandale de l’alliance d’un artiste si sensible avec un régime militaire même civilisé allait éclater tôt ou tard mais aussi parce que le jury ne fit pas dans la charité comme s’il fallait forcément donner une palme d’or au cinéma africain car cela eût fait le buzz…

De retour quasiment Bredouille, Sissako va devoir réfléchir sérieusement  à l’avenir : engagé ou S.G, il faut choisir… Quoiqu’il pourrait toujours traiter les sujets en collaboration avec le Makhzen, ce qui serait toujours mieux que ne s’impliquer en rien depuis 2 ans qu’il est nommé conseiller du général civilisé.

En parlant de « Timbuktu », qui sait qu’il y a un autre Timbuktu un film de 1959 de Jacques Tourneur, aurait-il inspiré le titre original du chagrin des oiseaux ?

 

« 1940, au début de la Seconde Guerre mondiale à Tombouctou, le colonel Dufort, accompagné de son épouse Natalie, vient prendre le commandement de la garnison française. Le pays est sous tension, un chef religieux, le seul capable de maintenir le calme parmi les tribus, est retenu prisonnier par un émir. Le colonel, aidé par le trafiquant d'armes américain Mike Conway, va tenter de le libérer. »

http://fr.wikipedia.org/wiki/Tombouctou_(film,_1959)

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N.B : vu le nombre de remarques ordurières, insultant ma bonne foi, que je reçois sous prétexte que j'affine l'icône sacrée du brave, je tiens à rappeler que je ne fais que mon travail de journaliste-blogueur engagé, pour apporter à l'occasion des éclairages sur des affaires ou  des personnages publics qui, autrement, eussent été inconnus de l’opinion publique. Je n'ai absolument rien contre ce monsieur sauf qu'on découvre qu'apparemment en échange d'être nommé conseiller à la présidence d'un régime militaire civilisé, il a dû installer son âme dans un affreux silence diplomatique quand il aurait pu mettre son talent et sa notoriété au service de causes douloureuses de chez nous qui ne sont pas politiquement correctes. C'est tout.

 

 

 

 

 

 

Vlane A.O.S.A.

 

Source : Chez Vlane (le 29 mai 2014)

 

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