Les dés sont désormais jetés. L’élection présidentielle aura bien lieu le 21 juin prochain. Le pouvoir n’ayant strictement rien concédé à une opposition qui n’en demandait pas tant. Résultat des courses : une élection tronquée, comme les législatives et municipales de l’année dernière. Sans opposition véritable, point de scrutin crédible, serait-on tenté de dire.
Le pauvre citoyen, à qui personne n’a demandé son avis, semble, lui, hors-jeu de ces chaises plus grinçantes que musicales. Sa vie est, désormais, non pas un long fleuve tranquille mais un parcours du combattant. Il observe, de loin, les querelles de chapelles et se dit qu’au vu des expériences passées et quel que soit celui qui héritera des commandes, son quotidien n’en sera que plus dur. Il avait écouté, religieusement, celui qui s’était baptisé « président des pauvres » et qui entend bien le rester, grâce aux prix de plus en plus inabordables. « Président, de plus en plus riche, des plus en plus pauvres » : ne s’est-il pas joliment orné, le titre de notre prince ? Comme ceux qui l’ont précédé et ceux qui le suivront, notre Raïs demeure fidèle à la même religion : le petit peuple ne mérite pas qu’on se tracasse pour son bonheur. Il est petit, que voulez-vous… Tel un mouton de Panurge, il vous suivra, tant que vous resterez en selle. Trotte donc, belle chamelle ! On aura toujours des matraques pour tabasser les ânes qui refuseraient d’avancer. Il y en a de plus en plus, d’ailleurs, de ces grandes oreilles qui n’entendent rien. C’est bien normal : l’Education n’éduque plus personne, depuis belle lurette.
Quant à la Santé, elle est à l’agonie. La Justice ? Totalement inféodée à l’Exécutif. La vie ? De plus en plus chère. L’ouguiya bat de l’aile. Mais qui se soucie de ces détails ? On a accroché le pays aux résultats d’un hypothétique dialogue qui n’a jamais rien donné. Il y reste suspendu, comme une corde de puits à un arbre mort. Les puisatiers, ceux qui étaient censés abreuver le peuple, ils n’ont, eux, plus qu’un souci en tête : le pouvoir ! Comment y accéder, comment s’y maintenir ? Et pendant que ceux-là se prennent la tête à ce vertige, le troupeau des ânes et des moutons grignote, comme il peut, en attendant une toujours plus illusoire soudure. Alors, une élection farceuse par-ci, une farce électorale par-là, ça l’occupe… Mais ça l’amuse de moins en moins. On en verra bien la fin, de ce néant. Un jour ou l’autre.
Ahmed Ould Cheikh
Source : Le Calame (Le 27 mai 2014)
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