Megd’! Je ne comprends pas comment j’ai fait pour devenir aussi moisi avant même que le mois ne passe à deux chiffres! J’ai fait et refait l’historique de mes dépenses, mais je n’y comprends absolument rien. C’est comme si mon gombo s’était évaporé comme du paracétamol effervescent. La comparaison m’est venue justement à la tête parce que l’achat de ce foutu médicament m’a laissé un souvenir amer l’année dernière. Un vieux pote infirmier me l’avait conseillé contre les maux de tête. Mais lorsque je me suis rendu compte qu’il me coûte de la quinine, j’ai préféré encore prendre une Guigui et souffrir de migraine que de me soigner pour mourir pauvre.
Megd’! En fait, quand je fais plus posément les calculs, je constate que mon maigre salaire est loin de s’être évaporé. Il a été effectivement dépensé. Il suffit d’un week-end arrosé pour que les quelques billets qui étaient encore miens se dissolvent dans mes besoins incompressibles. Puisque ma bécane et moi, nous ne fonctionnons pas à l’eau, alors nous avons besoin de nous approvisionner aussi régulièrement que cela est possible. 1 000 balles de carburant, c’est à peine deux petites Guigui. Or, si moi, je devais me contenter d’une seule bibine par jour, c’est évident que j’arriverais à la fin du prochain mois. Megd’!
Il en est de même pour ma P50. Il faut l’amener au moins une fois par semaine à la station pour le plein. Vous imaginez bien qu’à cette allure, je ne peux pas tenir les autres dépenses. Soit je feinte le bailleur et je suis obligé de me coucher et de me réveiller tard tout au long du mois, soit j’essaie d’être réglo et je dors plus souvent la gorge sèche et le ventre vide. Megd’!
Dès fois, j’ai envie d’abandonner la bécane pour un vélo. Ça fait écolo et écono. Mais je n’ai simplement plus le courage de pédaler à 50° à l’ombre. Le climat de ce foutu pays n’encourage même pas à faire des économies. Et comme mon patron n’est pas prêt à augmenter mon salaire de galère, alors je continuerai à vivre de découvert et d’espoir d’une vie meilleure.
Journal du Jeudi N°1182 du 15 au 21 mai 2014
Source : Journal du Jeudi (Burkina Faso)
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