Mauritanie, les islamistes instrumentalisés par le pouvoir

Décidément le chef d'Etat mauritanien, actuel président de l'Union Africaine, Mohamed Ould Abdel Aziz, ne recule devant rien pour éliminer toute forme de concurrence à son pouvoir absolu. A quelques mois d'élections présidentielles qui semblent jouées d'avance, il utilise un incident -dont on ne sait pas s'il a vraiment eu lieu ni dans quelles conditions-, la profanation d'un Coran, et les manifestations qui se sont propagées partout dans le pays en signe de protestation, pour se débarrasser du seul parti d'opposition encore représenté significativement au Parlement : Tawassoul, succursale mauritanienne du mouvement des Frères Musulmans.

 

 

C'est à n'y rien comprendre. Lundi et mardi des manifestations violentes (un mort officiellement) ont eu lieu à Nouakchott, ainsi que dans d'autres villes mauritaniennes, suite au témoignage d'un adolescent qui aurait vu 4 hommes descendre d'un 4*4 pour pénétrer dans une mosquée de Nouakchott, dans le quartier Teyarett, et y jeter le Coran dans les toilettes. Dès mercredi cette version n'apparaissait plus à personne comme crédible, et on n'a retrouvé sur place aucun témoin, même si quelques pages du Saint Livre de l'Islam traînaient sur le sol de la Mosquée. En attendant, le pouvoir, comme lors des précédents événements qui ont indigné les foules -notamment en janvier lorsqu'un jeune forgeron a publié un texte jugé blasphématoire sur internet-, a officiellement cherché à apaiser les manifestants tout en proclamant haut et fort la primauté de la religion. Rien que de très normal dans une république islamique qui applique une charia plutôt light depuis une trentaine d'années.

Oui, sauf que depuis, de nouvelles informations sont tombées. C'est d'abord un des leaders du RFD, le principal parti d'opposition qui a boycotté les dernières élections, qui a été arrêté pour avoir mis à disposition de manifestants réunis en sit-in, une citerne d'eau potable. Et surtout, l'imam Mohameden Ould Dah, responsable de la mosquée où aurait eu lieu ce qui semble apparaître aujourd'hui comme un canular de très mauvais goût, ni plus ni moins, a été arrêté. Les sites d'information mauritaniens proches du pouvoir annoncent maintenant qu'il serait lié à Tawassoul, la succursale mauritanienne du mouvement des frères musulmans. La presse en ligne du pays a annoncé plus tôt dans la journée qu’il n’aurait pas fait preuve du meilleur esprit de collaboration à l’enquête pendant son interrogatoire. Rien d’étonnant quand le régime s’emploie à décrédibiliser le parti islamiste « modéré », seule force politique concurrente encore représentée sur le plan institutionnel. Simple opportunisme ou situation de crise montée de toutes pièces ? Impossible de le savoir, mais le clan au pouvoir ne supporte aucun opposant, ni aucune force contradictoire… Il règne sans partage sur l’économie du pays et confisque les fruits de la croissance à son seul profit en éliminant toute concurrence, et ne s’embarrasse même plus d’une façade démocratique quand il s’agit de mettre en coupe réglée la vie politique du pays.

 

 

Source : Mondafrique

 

 

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