Après un long silence la CNDH Commission nationale des droits de l’Homme s’est fendue d’un surprenant communiqué qui à n’en pas douter constitue une immixtion flagrante d’une institution sensée apolitique en plein champs de la bataille politique que se livre les deux camps en Mauritanie.
Ayant un effet de pavé dans la mare, la CNDH a condamné les partis politiques qui appellent au boycott des élections : » « certains partis politiques, qui n’ont pas pris part à ces échéances électorales, s’évertuent à faire échouer le processus électoral au mépris de la loi et des principes fondamentaux de la Démocratie qui repose sur l’expression de la volonté des citoyens à travers le scrutin. » Selon la CNDH , « Cette action est contraire à l’article 11 de la Constitution du 20 juillet 1991 modifiée en 2006 et 2012 qui impose aux partis politiques une action positive à travers la contribution à la formation et à l’expression de la volonté des électeurs. » Il s’agit bien entendu d’une interprétation singulière et surprenante du texte fondamental de la troisième République mauritanienne et qui plus est, fait sortir complètement la CNDH de son rôle en lui faisant endosser un maillot aux couleurs d’un camp politique donné et de ce fait bat en brèche l’indépendance qui doit être sienne. La présidente de la CNDH devrait démissionner et se consacrer à a politique si tel est son vœu, mais elle ne doit pas être plus royaliste que le Roi.
En effet même le président Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Lemine n’a pu que « regretter le boycott des élections municipales et législatives du 23 novembre prochain par dix partis politiques regroupés au sein de la Coordination de l’opposition démocratique. » Si le boycott de des élection n’est pas légitime, comment la présidente de la CNDH va -t- elle se comporter avec les palestiniens de Jérusalem Est qui en réponse à un appel de L'Organisation de libération de la Palestine (OLP) ont massivement boycotté les élections municipales organisées par l’administration israélienne.
Sur 360.000 habitants palestiniens à Jérusalem, environ 160.000 d'entre eux sont des électeurs potentiels et lors de la dernière élection municipale en 2008, seuls 2.744 Arabes de Jérusalem-est ont voté, soit un taux de participation de 1,8%, contre 60% dans les quartiers juifs de la ville.
Dans la plus part des pays européens, des dizaines de mouvements politiques, certes peu importants, appellent ouvertement à boycotter les élections européennes de Mai 2014. Cela n’offusque personne et ne déclenche pas outre mesure un tir de barrage des institutions de défense des Droits de l’Homme. Le boycott peut être utilisé comme une forme de protestation politique où les électeurs estiment que la fraude électorale est probable, ou que le système électoral est biaisé, ou que l’Administration qui organise l’élection manque de légitimité. Dans les systèmes où le vote est obligatoire, un boycott peut constituer un acte de désobéissance civile, ou alternativement, les partisans du boycott peuvent être en mesure de voter blancs ou voter avec un bulletin nul. Un parti politique ou un candidat particulier peuvent refuser de se présenter aux élections et exhorter ses partisans à boycotter le vote.
Dans le cas d'un référendum, le boycott peut être utilisé comme une tactique de vote par les adversaires de la proposition. Si le référendum exige une participation minimale pour être valable, le boycott peut empêcher le quorum d’être atteint. Lors des élections générales, les individus et les partis vont souvent boycotter pour protester contre les politiques du parti au pouvoir avec l'espoir que lorsque les électeurs ne se présentent pas en nombre suffisant, les élections seront considérées comme illégitimes par des observateurs extérieurs. Cette tactique peut toutefois s'avérer désastreuse pour les parties boycottistes dans la mesure ou la faiblesse du taux de participation annule rarement les résultats des élections qui s’en trouvent déformées et susceptible de faire élire des candidats qui ne le seraient pas autrement.
La Commission Nationale des droits de l’Homme, doit restée cantonnée dans sa mission première qui est la défense et la promotion des droits de l’Homme et libertés, conformément aux principes de Paris régissant les institutions nationales des droits de l’Homme.
On attend de notre CNDH qu’il veille à l’observation, à la surveillance et au suivi de la situation des droits de l’Homme au niveau national, qu’il mette en place un monitoring efficace pour les cas de violations et mener les investigations et enquêtes nécessaires
Intervenir par anticipation et urgence chaque fois qu’il s’agit d’un cas de tension qui pourrait aboutir à une violation individuelle ou collective des droits de l’Homme ; Contribuer à la mise en œuvre des mécanismes prévus par les conventions internationales relatives aux droits de l’Homme auxquelles la Mauritanie a adhéré et qui restent lettres mortes; Effectuer des visites aux lieux de détention et aux établissements pénitentiaires, les centres de protection de l’enfance et de la réinsertion, aux lieux de rétention des étrangers en situation irrégulière et intervenir chaque fois que cela est nécessaire ; Travailler pour l’harmonisation des textes législatifs et réglementaires en vigueur avec les conventions internationales des droits de l’homme et au droit international humanitaire. Il ya là de quoi occuper amplement notre CNDH et lui éviter ces incursions sur le champ de bataille politique qui ne font d’éroder d’avantage sa crédibilité.
Pourquoi la CNDH reste-t-elle silencieuse, devant la multiplication des viols et des violences contre les femmes et les enfants ? Pourquoi la CNDH ne se prononce pas lorsque la police intervient violemment pour disperser des manifestants qui ne font qu’exprimer pacifiquement leur point de vue ? Pourquoi la CNDH n’intervient pas pour exiger des enquêtes sur toutes les atteintes graves aux droits de l’homme qui ont émaillé l’histoire de notre pays ?
Assurément la présidente de la CNDH n’a pas été inspirée en s’en prenant ainsi à certains partis politiques mais au vu de la composition de celle-ci pouvait-on raisonnablement s’attendre à autre chose ?
Source : Mauriweb.info