La France a-t-elle son propre PRISM pour espionner le Maroc ?

Selon Reflets.info, la société française Amesys a vendu le système d’espionnage des télécommunications Eagle au Maroc pendant les révolutions arabes. La puissance de ce système peut très bien être utilisé par la France pour espionner, en retour, le Maroc.

 

« La Cnil a saisi le Premier ministre, ainsi que les ministres de l'Intérieur et de la Défense, d'une demande de précisions sur l'éventuelle existence d'un programme français similaire au programme Prism, qui serait ainsi réalisé en dehors du cadre juridique prévu par le législateur », a indiqué hier, vendredi 25 octobre, la Cnil, dans un communiqué officiel. Probable, répond Antoine Champagne, co-fondateur de reflets.info [site censuré par Maroc Telecom, depuis près d’une semaine, suite à l’affaire Lakome.com], alias Tekitoa. « Si les services de renseignements français sont un peu malins, ils auront gardé une porte d’entrée dérobée sur le système Eagle vendu par Amesys au Maroc pendant le printemps arabe et à beaucoup d’autres régimes pas toujours recommandables », explique-t-il.

Reflets.info avait révélé, il y a près d’un an, que le système d’espionnage généralisé des télécommunications nommé « Eagle » avait été vendu par Amesys à la Libye de Khadafi. Ces révélations ont entraîné l’ouverture d’une instruction judiciaire contre Amesys qui se poursuit encore aujourd’hui malgré les réticences du parquet. Le même site a révélé également, dans la foulée, l’achat, par l’Etat marocain, du même système « Eagle » pendant les révolutions arabes. Surnommé le projet PopCorn, l’achat des « disques durs nécessaires au stockage des informations collectées par les services d’espionnage sur les réseaux télécom aurait coûté, selon Antoine Champagne, 2 millions de dollars ».

Ecouter les communications d'un ministre marocain

Ce système si coûteux pour le Maroc est probablement réversible. Les télécommunications que l’Etat marocain peut écouter, l’Etat français peut probablement également les écouter, comme « par exemple, les communications d’un ministre marocain », estime le co-fondateur de Reflets qui précise ne présenter là qu’une hypothèse -crédible- à défaut d’en avoir la preuve définitive. En achetant Eagle, les dirigeants marocains avaient-ils conscience de prendre le risque d’être écoutés à leur tour par les Français ? « Probablement, estime Antoine Champagne, mais ils ont dû accepter ce risque comme un inconvénient inhérent au système pour tous les avantages qu’il leur offrait par ailleurs. »

Eagle, vendu par Amesys, est un système de sondes, appliquées sur les câbles (architecture du système internet mondial) et les routeurs de suivis, qui duplique le trafic et peu le catégoriser et le ranger dans une base de données. « Il est aisé ensuite, avec une interface d’interroger cette base de données avec un moteur de recherche pour faire ressortir, par exemple, toutes les télécommunications qui utilisent un certain mot, le nom de quelqu’un par exemple », détaille Antoine Champagne.

Constituer des arbres de connaissances

A partir de là, il est aisé de reconstituer tout le trafic d’une personne (ses mails, ses recherches Google …), et puis d’établir un arbre de connaissance. « Il s’agit de déterminer avec qui cette personne est en contact, pour quel type de relations … », précise Tekitoa. En plus de l’activité d’un individu sur internet, il est possible d’enregistrer les communications qui passent par la téléphonie sur IP. Ce système peut avoir des utilisations sans danger lorsqu’il s’agit de faire passer, par exemple, des données en priorité sur d’autres, au sein d’un même trafic, mais, vendu à un Etat les risques deviennent majeurs pour les libertés individuelles. Or une fois Eagle installé sur les câbles et les routeurs, il devient très compliqué d’y échapper.

A faire l’hypothèse que la France a conservé une possibilité d’accès au système Eagle vendu au Maroc, elle ouvre aux services de renseignements français un avantage considérable : « la vente d’Eagle permet d’établir un système d’espionnage du type de PRISM à moindre frais puisque ce sont les Etats comme le Maroc qui déboursent des millions pour l’installer. La France pourrait non seulement avoir accès au réseau marocain mais aussi au réseau d’autres pays à partir du Maroc et donc espionner qui elle veut hors du système légal français », explique Antoine Champagne.

 

Julie Chaudier

Source : http://www.yabiladi.com/

 

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