Les secours continuent de fouiller les décombres du Westgate à Nairobi. Selon un bilan provisoire, au moins 67 personnes ont été tuées.
A la recherche de corps et d'éventuels explosifs, les secours fouillaient mercredi 25 septembre les décombres du Westgate de Nairobi, au premier jour du deuil national décrété après l'attaque terroriste du centre commercial. La fusillade meurtrière, revendiquée par les shebab, est un avertissement au Kenya, dont les troupes sont présentes depuis fin 2011 en Somalie, et aux Occidentaux qui le soutiennent, a déclaré mercredi soir le chef des insurgés islamistes somaliens, Ahmed Abdi Godane.
C'était "un message aux Occidentaux qui ont soutenu l'invasion kényane" en Somalie, a prévenu Ahmed Abdi Godane, avertissant le Kenya : "Retirez vos troupes des Etats islamiques ou préparez-vous à d'autres bains de sang". Plusieurs pays – Royaume-Uni, Etats-Unis, Israël, Allemagne et Canada – participent à l'enquête sur le Westgate, qui "durera au moins une semaine", selon le ministre de l'Intérieur, Joseph Ole Lenku.
Pendant le siège, Israël, les Etats-Unis et le Royaume-Uni avaient soutenu les forces kényanes sans intervenir directement. Selon une source sécuritaire, des Israéliens étaient présents dans le bâtiment. L'assaut lancé samedi a coûté la vie à au moins 61 civils, six membres des forces de sécurité kényanes et cinq assaillants. Environ 240 personnes ont également été blessées.
Un bilan toujours provisoire
Un deuil national de trois jours a été décrété à partir de mercredi, et les drapeaux ont été mis en berne. Il s'agit de l'attaque la plus meurtrière dans la capitale kényane depuis l'attentat-suicide d'Al-Qaïda en août 1998 contre l'ambassade des Etats-Unis, qui avait fait plus de 200 morts.
Le bilan devrait encore s'alourdir : le centre commercial s'est partiellement effondré mardi – une source sécuritaire et un pompier ont expliqué que la structure avait sans doute été fragilisée par un incendie lundi. Et 71 personnes sont toujours portées disparues. Sur place, secouristes et soldats, à la recherche d'autres corps, portent masques et foulards pour se protéger de l'odeur pestilentielle qui émane des décombres. Se voulant toutefois rassurant, le ministre de l'Intérieur a affirmé qu'il ne restait qu'un "nombre peu important de corps" ensevelis.
Sur Twitter, les shebab ont affirmé que "137 otages" détenus par les assaillants avaient péri, accusant les Kényans d'avoir utilisé "des gaz" pour mettre fin au siège. Et "pour couvrir ses crimes, le gouvernement kényan a provoqué l'effondrement du bâtiment, enfouissant les preuves et tous les otages sous les décombres", ont-il ajouté.
"Du sang partout"
Depuis l'aube mercredi, des experts en explosifs aidés de robots téléguidés s'affairaient dans le luxueux centre commercial dévasté par les balles, les explosions et les flammes, vérifiant qu'aucune bombe n'a été placée par les islamistes. Des chiens renifleurs recherchaient également bombes et cadavres.
Un soldat ayant pénétré mardi dans le bâtiment, aux dernières heures des affrontements, a raconté qu'il y avait alors "du sang partout". "Des corps étaient brûlés et d'autres en état de putréfaction". "Les corps qui sont encore à l'intérieur du centre commercial devront être identifiés à partir de photos", a confié une responsable de la Croix-Rouge.
Le président kényan Uhuru Kenyatta avait annoncé mardi soir la fin du siège, après presque 80 heures. Le commando, composé de 10 à 15 personnes, selon les autorités, avait pénétré samedi à la mi-journée dans le Westgate, lançant des grenades et tirant à l'arme automatique sur les employés et la foule de Kényans et d'expatriés – 16 d'entre eux au moins sont morts – avant de s'y barricader avec des otages. Ont suivi une série d'assauts pour les déloger.
Selon un membre des forces spéciales kényanes, les opérations ont tourné à la partie de "cache-cache" avec les islamistes, aidés par la configuration des lieux, constitués de magasins et de restaurants répartis sur quatre étages dans des galeries donnant sur un grand hall central ouvert. Outre les cinq islamistes abattus, d'autres sont peut-être ensevelis sous les débris avec des otages. On ignorait mercredi si certains avaient pu s'enfuir. Onze suspects ont par ailleurs été arrêtés, selon Uhuru Kenyatta, qui n'a donné aucune précision.
Des questions autour de la "veuve blanche"
Une citoyenne britannique, surnommée "la veuve blanche" et soupçonnée d'avoir pris part à l'attaque sanglante du centre commercial de Nairobi utilisait un passeport sud-africain pour obtenir des prêts bancaires et louer des maisons à Johannesburg, rapporte par ailleurs mercredi la presse sud-africaine.
Samantha Lewthwaite, 29 ans, utilisait le nom de Natalie Faye Webb pour louer au moins trois logements à Johannesburg. Elle avait sous ce nom des dettes équivalant à 6.400 euros selon la chaîne de télévision d'information eNCA. Les baux de location sont signés de sa main, mais rien n'indique clairement qu'elle ait jamais résidé dans ces maisons. Selon des documents bancaires consultés par eNCA, elle aurait cependant vécu pendant quatre ans dans le quartier de Mayfair à Johannesburg, un quartier majoritairement peuplé d'Asiatiques.
En 2011, des magasins de vêtements ont signalé des défauts de paiement d'environ 2.700 dollars. Puis en août 2012 un tribunal l'avait condamnée à remboursé 2.800 dollars de dettes à la South Africa's First Rand Bank.
Lundi soir, la ministre kényane des Affaires étrangères, Amina Mohamed, a affirmé qu'une Britannique avait participé à l'assaut sanglant du centre commercial de Westgate à Nairobi revendiqué par les islamistes somaliens shebab. Ses déclarations contredisaient cependant celles faites quelques heures plus tôt par son collègue de l'Intérieur, Joseph Ole Lenku, qui avait démenti la présence de femmes dans le commando de Westgate.
Mardi, la presse britannique évoquait la possible implication de Samantha Lewthwaite dans l'attaque de Nairobi. Convertie à l'islam à l'adolescence, elle est la veuve de Germaine Lindsay, l'un des kamikazes qui se sont fait exploser dans le métro de Londres en 2005. Elle était alors enceinte de sept mois de son deuxième enfant.
Un expert sud-africain des questions de terrorisme affirmait cette semaine qu'elle venait régulièrement en Afrique du Sud et qu'elle y résidait dans les quartiers indiens. Mais plusieurs voisins interrogés par l'AFP mercredi ont affirmé ne l'avoir jamais vue. L'adresse de Mayfair comportait deux maisons, qui ont été démolies l'année dernière.
Source : Le Nouvel Observateur avec AFP le 26/09/2013{jcomments on}
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