Des incidents ont éclaté dans la nuit de samedi 1er à dimanche 2 juin à Ankara et à Istanbul, où des manifestants ont tenté de rejoindre les bureaux du premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, dans ces deux villes.
Confronté à l’un des plus importants mouvements de défi depuis l’arrivée de son parti islamo-conservateur au pouvoir en 2002, M. Erdogan a lâché du lest samedi en ordonnant à la police de se retirer de la place Taksim, à Istanbul, d’où est partie la révolte. Il a toutefois assuré qu’il ne reviendrait pas sur le projet d’aménagement urbain contesté à l’origine des manifestations.
Dans la capitale, Ankara, la police a dispersé par des jets de grenades lacrymogènes et des canons à eau une foule de plusieurs milliers de personnes qui marchait en direction de la primature en chantant des slogans hostiles au chef du gouvernement. Les manifestants ont riposté en lançant des pavés, avant de détruire des panneaux d’affichage et des feux tricolores ou encore en brisant les vitres des commerces environnants. Deux véhicules ont également été incendiés, ainsi qu’un kiosque à journaux. Selon l’agence de presse Anatolie, ces échauffourées ont fait 56 blessés parmi les forces de l’ordre. Plusieurs manifestants ont été interpellés.
Des incidents similaires ont opposé dans la nuit forces de l’ordre et manifestants à Istanbul, autour des bureaux du premier ministre dans le quartier de Besiktas. Des barricades ont été dressées dans les rues et la police a dispersé la foule à jets de grenades lacrymogènes. Le calme était revenu dimanche matin. La place Taksim et le petit parc Gezi, dont le projet de suppression a déclenché le mouvement de protestation antigouvernemental vendredi, ont été occupés toute la nuit par des centaines de manifestants qui ont célébré le recul du premier ministre. Des nombreuses barricades restaient dressées dimanche matin dans plusieurs rues qui mènent à la place.
Plusieurs organisations de défense des droits de l’homme ont dénoncé les violences de la police ces derniers jours. Les pays alliés occidentaux, les Etats-Unis et le Royaume Uni ont appelé le gouvernement à la retenue, et des centaines de personnes ont manifesté samedi soir à New York pour exprimer leur soutien aux protestaires en Turquie.
L’ATTITUDE DE LA POLICE DIVISE
Au sein même du pouvoir, plusieurs voix se sont élevées samedi pour dénoncer la réaction disproportionnée de la police. Peu avant le repli de la police, le président Abdullah Gül lui-même a lancé samedi un appel au « bon sens » et au « calme », jugeant le niveau de la protestation « inquiétant ».
Avant le président, le vice-premier ministre, Bülent Arinç, avait présenté ses « excuses » pour les événements d’Istanbul. « Plutôt que de lancer du gaz sur des gens qui disent ‘nous ne voulons pas de centre commercial ici’ (…) les autorités auraient dû les convaincre et leur dire que leurs inquiétudes étaient partagées. » Face à ces réactions, le premier ministre lui-même a concédé que la police avait agi dans certains cas de façon « extrême » et qu’une enquête avait été ordonnée par le ministère de l’intérieur.
La police a interpellé 939 manifestants au cours de plus de 90 manifestations survenues dans 48 villes, a précisé le ministère de l’intérieur.
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