Après deux mois de silence, imposé par les « conditions de guerre », le mouvement touareg « Ansar Eddine a refait surface pour expliquer, dans un long communiqué, ses projets et ses alliances.
Tout en menaçant la France, les armées africaines et ses rivaux du MNLA, le mouvement maintient ses alliances avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et le MUJAO (Mouvement pour le Jihad en Afrique de l’Ouest), malgré des « divergences de détail ».
Le Mouvement Ansar Eddine, qui avait pris le contrôle du nord du Mali, avec l’appui Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et le MUJAO (Mouvement pour le Jihad en Afrique de l’Ouest), avant d’être pourchassé par l’armée française, a de nouveau menacé « la France et ses laquais », promettant de « poursuivre le combat contre l’occupant ». Dans un long communiqué en 13 points, diffusé par des sites islamistes, Ansar Eddine tente, « après une longue absence dictée par les conditions de guerre », définit sa nouvelle stratégie et ses alliances, et justifie ses initiatives jusqu’à l’intervention de l’armée française.
Pour Ansar Eddine, « cette croisade » de l’armée française « n’avait pas pour but la guerre contre le terrorisme ni la protection des droits de l’Homme », mais elle avait deux objectifs principaux : d’une part, « empêcher l’émergence de toute entité qui veut libérer la Oumma de l’esclavage des régimes laïcs » et offrir au peuple de « vivre librement sous un la charia » ; et d’autre part, « maintenir au pouvoir des régimes qui préservent l’hégémonie coloniale ». Ansar Eddine considère que cette « croisade confirme la haine de la France envers l’islam », et accuse Paris de vouloir provoquer « une guerre « civile», en poussant à « la confrontation entre Arabe et Africains, entre Noirs et Blancs, afin qu’on s’entretue » au Mali.
Le communiqué d’Anasr Eddine s’en prend également, sans le citer, au MNLA, qu’il accuse de pactiser avec l’occupant. Il s’en prend ainsi à « ceux qui se prétendent jaloux de notre peuple, et s’empressent de se jeter dans les bras de l’occupant, et veulent être les fers de lance de l’agression contre leurs propres frères ». Pour Ansar Eddine, le MNLA « parlait hier de nationalisme et de libération, et joue aujourd’hui le vigile au profit de l’occupant ».
Le communiqué affirme que la direction d’Ansar Eddine n’a pas souffert de l’offensive française. La direction « se porte bien », et le leader du mouvement, Aboul Fadhl Iyad Ag Ghali, dirige lui-même les opérations militaires ». Il aurait notamment participé à des opérations importantes les 19 et 22 février dans les monts de Tighergher, durant lesquelles les forces françaises et les « mercenaires tchadiens » auraient « connu le goût amer » de la défaite. L’armée tchadienne a perdu un trentaine d’hommes dans ces batailles, rappelle-t-on.
Menaces contre le MNLA
Parlant de membres d’AQMI et du MUJAO, Ansar Eddine rend hommage aux « frères moudjahidine qui résistent à Gao et Tombouctou », ce qui, selon le communiqué, « prouve que les divergences sur des questions secondaires, et les désaccords sur des points de vues concernant des sujets mineurs n’entravent le devoir de solidarité » entre groupes islamistes. Il les appelle à « concentrer leurs frappes contre les Français et leurs laquais africains », ainsi que contre « les milices qui leurs sont alliées ». Se faisant menaçant, le mouvement prévient, dans une allusion à peine voilée au MNLA, qu’il « n’est pas possible de faire preuve de magnanimité avec ceux qui ont recours à la trahison et à la complicité pour parvenir leurs fins ».
Dans un langage assez complexe, Ansar Eddine s’adresse aussi aux militants Touareg, les invitant au dialogue et leur demandant de ne pas s’allier avec l’armée française. « Les canaux du dialogue restent ouverts, selon nos conditions connues », indique le communiqué, qui affirme « comprendre » ceux qui, « par faiblesse », ne rejoignent pas le jihad. Il affirme même comprendre ceux qui ont choisi de faire la paix avec l’ennemi, ou qui se sont mis sous sa protection, et leur demande seulement de « ne pas faire preuve d’animosité envers nous ».
Ansar Eddine dément, par ailleurs, les « bilans imaginaires » publiés par l’armée française au sujet des victimes des attaques françaises « dans les rangs des moudjahidine ». Il s’en prend aussi aux « organisations humanitaires croisées », qui « excellent » dans l’exploitation de ce type de situation. Il appelle « les élites et associations humanitaires islamiques à se préoccuper du drame » des populations maliennes ». Au sujet de la situation dans les villes sous contrôle de l’armée malienne, avec l’appui d’unités françaises te africaines, Ansar Eddine fait état d’arrestations « arbitraires » à Bamako et dans d’autres villes, sur la « base de l’appartenance religieuse ».
La bibliothèque de Tombouctou a été protégée
Le mouvement dément fermement les informations selon lesquelles les manuscrits du centre Ahmed Baba, à Tombouctou, auraient été brûlés. « Comment pouvons-nous commettre un tel acte, alors que nous connaissons la valeur de cette bibliothèque, qui constitue un des trésors de la nation et un héritage que nous jalousent les autres civilisations ? » Selon le communiqué, le mouvement a même « renforcé la protection de la bibliothèque », pour éviter toute provocation.
En revanche, Ansar Eddine défend l’application de la charia dans les villes qu’il a contrôlées avec AQMI et le MUJAO. Il fait l’éloge des « juges » installés dans les villes sous contrôle, et appelle les populations de ces régions à continuer à s’adresser à eux, pour qu’ils « jugent selon ce que Dieu a prescrit ».
En revanche, le communique d’Ansar Eddine n’évoque, à aucun moment, l’Algérie. Il ne parle pas non plus du sort des otages détenus par ses anciens alliés d’AQMI et du MUJAO.
Abed Charef
Source : Maghreb Emergent le 27/03/2013{jcomments on}
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