Mauritanie : la carte de séjour des étrangers pointée du doigt

(Crédit photo : anonyme)

Plus de 200 étrangers seraient expulsés cette semaine par les autorités de Nouakchott. Il s’agit d’une application pure et simple des mesures en vigueur contre les étrangers qui ne sont pas en règle depuis le 19 février dernier. Ce sont les ressortissants sénégalais qui en paient les frais avec plus de 100 personnes refoulées.

Des chiffres qui suscitent des interrogations sur la politique d’immigration africaine de Nouakchott pointée par les associations et les mouvements citoyens.

Chaque jour un peu plus, l’instauration de la carte de séjour obligatoire à tous les étrangers en Mauritanie depuis le 19 février dernier s’éloigne des citoyens qui voient dans cette mesure une injustice par rapport aux étrangers issus du Maghreb et du monde arabe. Les 200 expulsions cette semaine ne concernent que des ressortissants de l’Afrique noire. Cette politique d’immigration africaine est pointée du doigt par les associations, les ONG et les mouvements citoyens qui y voient deux poids deux mesures et divise l’opinion publique. Il suffit de jeter un coup d’oeil sur les carences de préparation et d’application de cette mesure au départ malgré sa souveraineté, l’insuffisance notoire d’information aux ambassades des pays africains concernés qui frisent un manque de considération aux relations plus que séculaires avec le Sénégal, le Mali, la Guinée et la Gambie pour ne citer que ceux-là. Nouakchott assume ce recentrage politique et son impact dans les pays frères et amis. Pas étonnant que Bamako ait emboîté le pas en appliquant la réciprocité. Dakar est sur le starting- block. Ce sont donc les règles de bon voisinage qui prennent un coup sérieux et au de-là c’est l’intégration sous régionale qui est menacée. En instrumentalisant depuis le début la carte de séjour des étrangers, l’Etat mauritanien met en évidence des fractures avec le peuple mauritanien et se met hors jeu des ambitions géopolitiques locales. Et dès lors cette vision fausse complètement les liens qui existent entre une réforme de l’Etat civil nécessaire pour le pays et un recensement biométrique traduisant la modernisation de l’administration. Au plan pratique de cette manoeuvre l’autorité publique ne consiste pas à renvoyer tous les sans papiers aveuglément surtout dans une période d’expérimentation mais de faire de la prévention en donnant du temps aux étrangers et aux différentes ambassades de prendre leurs dispositions. La réalité de faibles ressources des concernés et conditions de séjour difficiles dans les quartiers populaires de Nouakchott ou à l’intérieur du pays impose de la patience. Associations, ONG et mouvements citoyens sont sur la même ligne et ne cautionnent pas les expulsions des étrangers considérées comme une atteinte aux droits de l’homme. Derrière ces sans papiers se cachent des personnes qui font vivre pourtant l’économie informelle mauritanienne tout en soulageant les couches les plus défavorisées. Ce nouvel épisode de course aux chiffres s’avère difficile à accepter dans cette période de crise où les étrangers constituent un important réservoir de main d’œuvre à bon marché. C’est le pragmatisme qui doit plutôt l’emporter.

Bakala Kane{jcomments on}

(Reçu à Kassataya le 10/03/2013)

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