La France peut-elle être inquiétée par son passé esclavagiste ?

(Crédit photo : Macaire Dagry)Il y a quelques jours de cela, une plainte a été déposée par une descendante d’esclave contre l’État français, pour crime contre l’humanité. Elle s’est appuyée pour cela, sur la loi Taubira du 21 mai 2001 sur l’esclavage, pour formuler sa plainte et demander des réparations pour les préjudices subis.

En effet, l’article premier de la loi Taubira stipule que : « La République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l’océan Indien d’une part, et l’esclavage d’autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l’océan Indien et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l’humanité » . Cette loi qui s’inspire elle-même du « statut de Rome » qui définit les règles de la Cour pénale internationale (CPI) et adoptée le 17 juillet 1998 par la France, précise que la « réduction en esclavage » est un des cas de « crime contre l’humanité ». C’est donc juridiquement, une violation délibérée des droits fondamentaux d’un individu ou d’un groupe d’individus, animée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux, religieux. Que va donc faire l’État français, dont la ministre de la justice, Christiane Taubira, est à l’origine de cette loi votée, en période de cohabitation avec le député François Hollande, aujourd’hui chef de l’État ?

Il semble évident que, cette loi votée dans la douleur en 2001, après de rudes batailles au Parlement et parmi les historiens qui étaient divisés, représente une véritable opportunité aujourd’hui pour les descendants d’esclaves. Quoi de plus normal pour eux, de choisir ce moment, douze ans après ce vote historique, pour demander réparations à ceux qui se sont battus pour la faire voter et promulguer. Le Président Hollande et sa ministre de la Justice, dont la loi porte le nom, sont ainsi confrontés à une situation politique à très haut risque. Ils savent que cette loi est moralement approuvée par la population, mais sensible politiquement, surtout dans son volet « réparation des dommages subis ». Voilà donc une opportunité que l’opposition de droite qui était fermement opposée à son adoption en 2001, lorsqu’elle était au pouvoir (Présidence et Sénat), mais avec une Assemblée Nationale et un gouvernement de Gauche (période de cohabitation), ne va pas manquer d’exploiter pour mettre le gouvernement en difficulté. En se conformant à l’adoption de cette loi, sous la pression des communautés noires françaises et de la Gauche, la droite a tout fait pour éviter jusqu’à présent d’être confrontée à cette situation inconfortable dans laquelle est aujourd’hui l’exécutif français. Sur quelle base calculer aujourd’hui ses réparations ? Comment les évaluer ? A qui et comment les attribuer ? Sous quelles formes ? Pendant combien de temps ? Etc., ce sont autant de questions auxquelles doivent répondre les initiateurs de cette loi, qui semble aujourd’hui les encombrer.

Cette question de réparations des dommages subis il y a plusieurs siècles, au nom de la continuité de l’État dans le droit français, peut-être certes légitime, mais semble difficile dans son application pour deux raisons. La première est qu’elle est politiquement sensible, parce qu’elle peut ouvrir des droits qui feront jurisprudence et peuvent de fait créer une zone d’incertitude juridique et financière dans laquelle l’État français peut s’embourber. Financièrement, elle représente également une grande inconnue, qui en période de crise peut se retourner contre les initiateurs de cette loi. Deuxièmement, cette loi est aussi combattue par certains historiens, parce qu’ils considèrent qu’elle est sélective, politique et démagogique. Pour eux, elle n’est pas complète parce qu’elle ne tient pas compte de la traite négrière entre africains eux-mêmes, et la traite des Noirs par les Arabes qui fut aussi importante que celle faite par les blancs d’Europe ou d’Amérique. Cela fragilise de fait l’article 2 de cette loi, qui impose « l'insertion de ces faits historiques dans les programmes scolaires et le développement des recherches scientifiques s'y rapportant ». L’article 3 souffre également des mêmes critiques. Elle prévoit, « un projet de requête en reconnaissance de ce crime contre l'humanité auprès du Conseil de l'Europe, des organisations internationales et de l'Organisation des Nations unies », sans mentionner, la traite négrière entre africains eux-mêmes, et la traite des Noirs par les Arabes qui fut très violente.

Macaire Dagry,

Chroniqueur politique à Fraternité Matin{jcomments on}

Artcle en date du 26 Décembre 2013

(Contribution reçu à Kassataya le 28/01/2013)

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