Approbation du Budget 2013 : Une Mauritanie des Riches sur les cendres du populisme désuet

(Crédit photo : anonyme)

Le Budget 2013 reflète, selon Mohamed Vall, un citoyen lambda rencontré devant le portail de la Présidence, « le vrai visage de la Mauritanie d’aujourd’hui « . Une Mauritanie des riches, dira-t-il en substance, « que le discours politique populiste cherche depuis ces dernières années à noyer sous le faux sceau d’une « Mauritanie des pauvres ».

La preuve la plus illustrative de cet état de fait selon lui, est ce Fonds d’appui de 2 Milliards d’UM destiné aux éleveurs. « Et qui sont ces éleveurs ?  » demandera-t-il, avant de répondre, « ce sont tous ces anciens et actuels officiers supérieurs de l’armée ainsi que les nantis de la République qui possèdent les trois quart du cheptel national ». A la tête d’une petite armée de mécontents, Mohamed Vall, la soixantaine, fait le pied de grue depuis quelques jours devant le portail de la Présidence de la République. Il s’insurge contre l’iniquité de l’Agence de développement urbain (ADU) et des services du ministère de l’Habitat. Ces deux instances chargées de la restructuration des quartiers précaires de Nouakchott depuis plus de deux ans, seraient en train de spolier selon lui, les veuves sans défense, les orphelins sans tuteurs et les manants sans ressources au profit de quelques nantis qui n’ont jamais passé une nuit blanche en temps d’intempérie dans une baraque.

Les députés de l’Assemblée Nationale ont approuvé jeudi 27 décembre dernier, la Loi de Finances pour l’année 2013 qui s’équilibre en recettes et en dépenses à 512 Milliards 539 Millions 210 Miles Ouguiyas. Les débats ont été houleux dans une assemblée dominée par les partisans du pouvoir, lesquels ont repoussé tous les amendements introduits par leurs homologues de l’opposition. Ainsi, ni l’augmentation du budget alloué à l’Institut supérieur des études et recherches islamiques (ISERI), ni celle destinée aux malades indigents, ou encore moins celle réclamée en faveur des artisans ou de la presse, avancées par l’opposition, n’ont été acceptées.

Le point le plus controversé du Budget 2013, et autour duquel s’est engagée une houleuse bataille entre députés de la majorité et députés de l’opposition, serait le Fonds d’appui aux éleveurs arrêté à 2 Milliards d’UM. La majorité a défendu avec becs et ongles cette proposition de budget, refusant d’écouter toute voix concordante venant du côté droit, celle où siègent les députés de l’opposition. Selon ces derniers, le Budget 2013 sent à plein nez la gabegie et ne reflète nul souci du gouvernement par rapport aux préoccupations des populations. La preuve, selon certains députés de l’opposition, les éleveurs, objets de tant d’attention par le présent projet de budget sont constitués en réalité des fortunés de la République, notamment tous ces officiers supérieurs de l’armée et les nantis du pays, dont l’élevage constitue un fonds de refuge idéal pour leur patrimoine financier.

Ce point de vue est par coïncidence partagé par un citoyen lambda du nom de Mohamed Vall, à quelques encablures de l’Assemblée nationale, devant les portails de la présidence de la République. En effet, alors que les protagonistes de la majorité et de l’opposition se crêpaient le chignon autour de la cagnotte nationale, une foule de gueux s’attroupait devant ce mur de lamentation qu’est devenu la façade ouest du Sénat. Les échos de l’Assemblée leur parvenaient par le truchement d’antiques postes radios que certains vétérans tenaient collés à l’oreille, écoutant entre deux émissions populaires, quelques bribes de l’actualité nationale. Mohamed Vall, la soixantaine bien sonnée, ne cessait de fulminer, rageant contre ce qu’il qualifie de « théâtre national ». Selon lui, « Mohamed Ould Abdel Aziz s’était érigé comme le président des Pauvres et nous lui avons accordé nos voix, mais aujourd’hui les pauvres déchantent ». Porte-parole d’une vingtaine de personnes venue des quartiers précaires de Toujounine, Mohamed Vall estime que le programme de redistribution des terres a été lourdement dévoyé par les agents de l’ADU et du ministère de l’Habitat. Des familles pauvres et démunies, sans défense et sans appui, sont ainsi spoliées selon lui, au profit de quelques riches qui se sont abattus sur les « gazras » comme des rapaces.

Retour à l’Assemblée Nationale, où les débats se poursuivaient avec des séquences dignes du « Guiness des Insolites ». C’est le cas de ce vote général par OUI des députés de la majorité et ceux de l’opposition en faveur de « l’augmentation du budget de l’ISERI » contre laquelle pourtant le ministre des Finances, Thiam Diombar s’était opposé. Se rendant compte de leur bêtise, les députés de la majorité demanderont à ce que le vote soit repris de nouveau.

Explication, certains députés de la majorité qui avaient voté « OUI » n’avaient pas compris l’intervention du ministre qui s’exprimait en français. L’absence de toute traduction des débats avait contribué à ce quiproquo. Revoté, l’augmentation du budget de l’ISERI a été rejetée cette fois par l’écrasante majorité des députés du pouvoir.

Plus rocambolesque, la député de la majorité Mintata Mint Hedeid, prise à partie par ses camarades du même bord politique qui l’ont accusé d’avoir chercher à diviser leur rang. Ce dont elle se défendra énergiquement. Il lui a été reproché d’avoir appuyé une proposition de mise en place d’un fonds destiné au développement du secteur animalier. Elle se défendra du haut de la tribune, arguant que ce n’est pas de sa faute s’il y a manque de coordination au sein de la majorité, affirmant qu’en tant que présidente de la commission finance à l’Assemblée Nationale, elle a plusieurs fois convoqué les députés pour assister aux débats en commissions. En vain. Reviendra en filigrane, les évènements du 14 octobre relatifs à la blessure accidentelle du président de la République et le cafouillis qui s’en était suivi au sein même de la majorité, dont un pan selon elle avait sérieusement envisagé l’après-Aziz. Selon elle, le PRDR (parti républicain démocratique pour le renouveau) qu’elle préside est l’un des rares fidèles du régime à ne pas avoir été ébranlé par les rumeurs de l’époque.

Passé ces duels qui fusaient dans un désordre indescriptible, allant de la gauche vers la droite et à l’intérieur même de la droite, le ministre des Finances a tenu à préciser que le programme économique de l’Etat en 2013 tourne autour de quatre axes : la maîtrise de l’inflation, l’augmentation du PIB brut, la réalisation d’un surplus budgétaire et l’augmentation du niveau des réserves en devises.

Il faut noter que les ressources du Budget 2013 proviennent des ressources internes, des rentrée sur les comptes spéciaux du Trésor public, de la réduction de la dette extérieure, de ressources externes (plus de 124 Milliards UM) et de ressources nationales autres que les ressources de l’Etat. Le Budget d’Investissement s’élève à 234,59 Milliards d’UM, dont plus de 124 Milliards UM sous forme de financement extérieur.

Cheikh Aïdara

Source  :  L’Authentique le 02/01/2013{jcomments on}

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