Nouvelles d’ailleurs: Portraits…

(Crédit photo : Nathalie Duvarry)

Il semblerait que le tragique incident dont notre sultan a été victime booste notre économie : selon un journal de la place, la vente de portraits de notre Raïs connaîtrait un boom sans précédent; à croire que chacun veut avoir, absolument, la photo de notre chef.

Je suppose que tous ces portraits vont fleurir qui les murs du salon, qui les murs du bureau, qui les murs de la boutique, qui les pare-brises de la voiture, qui la porte d’entrée, etc…. Certains en sont sûrement à se demander comment coller ledit portrait sur leurs habits. Là je peux aider et donner des idées : avec un peu de colle, on peut aussi se coller le portrait sur le front; ok faut faire des trous pour les yeux, sinon ça sent le « gamellage » en règle mais, pas de panique, choisissez un endroit neutre pour faire les trous. Pas de trous à la place du nez, par exemple, ça sentirait le crime de lèse majesté. Pas de trous non plus à la place de la bouche : vous vous approcheriez dangereusement de la cour martiale. Peut-être des trous sur le ventre, option symbolique des blessures présidentielles. Le choix de cet endroit peut permettre à vos avocats de vous sortir de la m… en cas de plainte (si vous prenez un bon avocat).
En tous cas, si l’info « économique » de la semaine s’avère juste, nous ne pouvons qu’admirer l’embellie économique….
Au moins des commerçants heureux, que ces vendeurs de portraits présidentiels! D’ailleurs j’ai découvert à cette occasion, qu’il y a des vendeurs de portraits de notre président. Ce n’est pas parce que je n’ai jamais vu des boutiques « Ould Abdel Aziz / Portrait en tous genres/ noir et blanc ou couleurs/ en uniforme ou en civil / à pied ou cheval/ prix attractifs/ soldes d’hivernage » que ces boutiques là n’existent pas.
Des portraits j’en ai vu plein : chez le coiffeur où imagination et raccourcis entre têtes « scalpées et tondues » riment avec humour; chez mon boutiquier qui, lui, a une préférence pour une célèbre marque de soda et de café (avec, quand même, un portrait de La Mecque); dans les rues de notre belle capitale où de joyeux citoyens à l’air béat d’un contentement quasi suspect, semblent heureux d’avoir le portable vissé à l’oreille et nous expliquent que cette semaine c’est la semaine du crédit téléphone à prix bradé, 2 H pour le prix d’une et que, en plus, si vous avez assez d’argent pour aller voyager dans les pays voisins, grâce à votre portable mauritano mauritanien, pas de panique, vous pouvez appeler maman en cas de tourista, sans payer plus cher. Il y a des portraits aussi dans nos maisons : entre la sempiternelle image du Pèlerinage, la nature morte, le tapis accroché au mur, il y a la photo des êtres chers de la maison qui nous regardent d’un oeil inquisiteur de là haut sur les murs, nous faisant nous sentir tout petits petits…. Dans certaines maisons, il y a déjà le portrait de notre Roi : ce dernier vous accueille d’un air martial dès que vous entrez et que vous posez vos babouches de façon réglementaire à l’entrée du salon; où que vous soyez dans la pièce il vous regarde, ne vous lâche pas du regard, genre « attention à ce que tu dis, analphabète bourricot! JE vois tout! ». Dans les locaux du Calame il y a le portrait d’un journaliste africain emprisonné. Cette affiche est là depuis tant de temps que j’en suis toujours à me demander si le pauvre monsieur est toujours en prison, ce qui ferait de lui le plus vieux prisonnier du continent africain! (faudra que je pense à leur proposer de mettre mon aimable figure à la place).
On nous dit que le portrait se négocie autour des 15 000 UM! Houlala! Ca fait cher la présidentielle figure! Pour les bourses maigres et même vides y a-t-il des portraits taille « timbre poste », prix minimum style 100 UM? Y aurait il une loi qui dirait que la ferveur ne peut se mesurer qu’à la taille et au prix du portrait?
Bref….. Montre moi ton portrait je te dirais qui tu es… Je ne crois pas qu’il en attendait autant notre président, lui qui doit bien rire et dont on connait le mépris légendaire qu’il a envers tous les flagorneurs qui viennent lui lécher les pieds depuis sa prise de pouvoir.
Mais il faut donc avouer que d’un malheur sort un bien : notre président gravement blessé et, hop, embellie économique. De là à suggérer à notre président de rester alité très longtemps histoire que l’économie aille de mieux en mieux, il n’y a qu’un pas….
On nous dit (« ON » est un c… disent les militaires, mais sans ce « ON » là pas d’infos et pas d’articles de presse) que notre Guide va rentrer un peu avant la fête; mauvaise idée chef! Il vous faut rester un peu plus de temps à Percy, laisser vos concitoyens razzier tous les portraits existants, puis, alors, au moment où la lassitude poindrait, vous rentreriez chez nous. Lors de votre retour vous seriez accueillis par des milliers de portraits brandis par vos admirateurs éplorés, une mer de portraits à l’aéroport…..
Et puis, histoire de booster un autre pan de notre économie, vous pourriez alors organiser des séances de dédicace de vos portraits : ainsi on assisterait à une embellie dans le secteur des stylos….
Puis, grâce à vous, après les portraits, les stylos, viendrait le temps du recyclage des portraits devenus défraîchis. Sans compter le boom des imprimeurs qui imprimeront des banderoles de compassion…..
Puis le boom des ateliers de teinture qui verront leurs commandes concernant votre image sur les vêtements, etc…..
De là à ce que l’industrie laitière s’y mette….
Comme quoi, chez nous, entre courtisans, laudateurs, simples citoyens et accident présidentiel, les chemins se croisent et profitent mutuellement du malheur qui vous a touché….
Nous sommes vraiment indécrottables, hein Monsieur le Président?!
Salut

Mariem mint DERWICH

Source  :  Le Calame le 25/10/2012{jcomments on}

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