« Aziz dégage ! » : La COD joue la carte de l’affluence populaire

(Crédit photo : Al Akhbar)

La marche du 23 juin a finalement eu lieu, sans que le pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz ne vacille.

D’ailleurs, la majorité compte riposter aujourd’hui pour démontrer que l’opposition ne détient nullement le monopole des affluences populaires. En contre-fonds, le sentiment diffus que les révolutions ne sont pas une panacée. Nombreux sont en effet les citoyens interrogés au lendemain de la sortie de l’opposition, qui pensent que cette dernière doit changer de fusil d’épaule en s’inspirant de l’exemple sénégalais et non de la copie tunisienne.

Samedi 23 juin 2012. Une foule de plus en plus dense et de plus en plus bruyante se bouscule dans le carré compris entre l’ancienne maison des jeunes de Nouakchott et le stade Cheikha Ould Boidiya de la Capitale. Beaucoup de banderoles et d’enthousiasme dans cette masse bigarrée et bon enfant qui sera rejointe plus tard, à hauteur de l’ex-hôtel Marhaba par les leaders de l’opposition démocratique. Serrés en lignes difformes, ils se laisseront emporter par la vague humaine qui scandait à tue-tête « Aziz dégage ! » avec cette naïveté déconcertante du pot de terre allant à l’assaut du pot de fer. Nulle présence policière cependant. Seule une marée de têtes, surplombées par des nuages de banderoles. A la place Tahrir ou plutôt la Place Ibn Abass, les discours se succéderont aux harangues des animateurs qui secouaient les foules à demi endormies par la canicule. Au menu, une véritable flopée de critiques acerbes sur les échecs du régime en place et ses politiques dévoyées. Tout y est passée, le caractère gabegiste et corrompu du pouvoir ainsi que sa nature répressive, la paupérisation galopante des populations mauritaniennes, la sècheresse, la misère, la hausse vertigineuse des prix, le chômage endémique des jeunes, la détérioration de l’enseignement et des services santé, la dilapidation et le bradage des richesses nationales, l’insécurité et la guerre par procuration au Nord du Mali. Tous les leaders ou presque ont défilé devant le micro, du Leader de l’opposition démocratique Ahmed Ould Daddah à l’ancien Chef de l’Etat Ely Ould Mohamed Vall, en passant par le président en exercice de la Coordination de l’opposition démocratique (COD) Moulaye El Arbi Ould Moulaye MHamed, le vice président de l’UFP Mohamed Moustapha Ould Bedredine, le président du parti islamiste Tawassoul Mohamed Jemil Mansour, le président de la jeunesse COD Mohamed Vadel Ould Mokhtar, , le président du parti Hatem Saleh Ould Hanena, le leader de la cellule de crise de APP Mohamed Ould Borboss, le Secrétaire général du parti UNAD, Sidi Ould El Kory, Moussa Fall, l’ex-colonel chef d’état-major des armées Abderrahmane Ould Boubacar.

Clou de la soirée, un téléfilm jusque-là considéré comme la surprise de la journée. Des images retraçant ce que l’opposition considère être les échecs lamentables de Mohamed Ould Abdel Aziz et de son régime sur le plan social, économique et politique, avec des images d’enfants se nourrissant de décharges, des bidonvilles vaporeux, des déguerpis installés dans des zones non viabilisées, des animaux en décomposition frappés par la sècheresse dans les badiyas de l’intérieur du pays, des scènes de violences policières contre des manifestations pacifiques…Puis extinction des feux et dispersion. En attendant une énième autre sortie qui sera suivie par d’autres, jusqu’à ce que le régime plie ses bagages, dans l’entendement de l’opposition.

Il faut dire qu’à la même heure, la COD au niveau de Nouadhibou avait également organisé une marche qui s’est ébranlée du 5ème Robinet vers le 2ème Robinet. Là également, c’était la même ampleur et les mêmes slogans appelant au « Départ de Aziz ! « 

Pour la majorité favorable à Mohamed Ould Abdel Aziz, tout ce cirque de la COD ne fait que démontrer le climat de démocratie et de tolérance qui règne en Mauritanie sous le pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz. D’ailleurs, une marche aussi populaire et grandiose est au programme des alliés du pouvoir qui comptent démontrer à leurs adversaires politiques qu’ils ne sont pas les seuls capables de mobiliser la rue. Une concurrence sous fond de surenchère politicienne dont les populations serviront de chair à canon. Pendant ce temps, le régime se dit nullement inquiété par tant d’agitation, fort de son pouvoir régalien et du soutien encore solide d’un pan important de la population mauritanienne, susurre un inconditionnel du parti-Etat UPR qui a préféré garder l’anonymat.

Le lendemain de la manifestation de la COD, les discussions ne roulaient que sur l’opportunité ou non de prendre le pouvoir par la rue en Mauritanie. Nombreux sont en effet ceux qui pensent que l’opposition n’a pas les moyens de sa politique révolutionnaire. « Que cela soit en Tunisie, en Libye, en Egypte, au Yémen ou en Syrie, les révolutions ont crée le chaos et n’ont rien produit de bon » analyse un jeune étudiant de l’Université de Nouakchott. Une remarque qui semble avoir fait l’unanimité parmi les désœuvrés de l’Immeuble BMCI qui passent toute leur journée à refaire le monde. Un autre renchérit « si réellement le peuple mauritanien ne veut plus de Aziz, il n’a qu’à le faire dégager comme les Sénégalais l’ont fait avec Wade, ou les Français avec Sarkozy. Sinon, ici en Mauritanie, les révolutions ne marcheront pas ; le pays est trop fragile et ne supporte pas la violence et le chaos »

Cheikh Aïdara

Source  :  L’Authentique le 27/06/2012

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