Mamadou Moctar Sarr président du FONADH au Quotidien de Nouakchott :

(Crédit photo : Cridem)

« La question des cartes de séjour est très sensible, elle doit être minutieusement étudiée et bien menée … ».

Le président du FONADH, Mamadou Moctar Sarr nous a accordé une interview au cours de laquelle il a répondu à toute une série de questions d’actualité qui préoccupe le citoyen en ces temps de contestations tous azimuts.

 

Quotidien de Nouakchott : Les pouvoirs publics ont entrepris une opération d’identification des étrangers. Quel commentaire faites-vous de cette opération d’identification des étrangers et que préconisez-vous pour éviter de reproduire l’expérience de Nouadhibou pendant laquelle les défenseurs des droits de l’homme avaient dénoncé des manquements?

Permettez-moi tout d’abord de vous remercier pour l’occasion que vous m’offrez de répondre à vos questions pertinentes qui sont d’actualité. Je voudrai préciser que le FONADH, depuis sa création en 2000, s’est toujours engagé dans la lutte pour la promotion et la protection des droits humains dans notre pays, qui malheureusement a connu durant ces deux dernières décennies des violations graves et massives, des droits humains, exécutions extrajudiciaires, déportations, impunité en plus de l’esclavage qui est un phénomène récurent.
Récemment, les étrangers résidents en Mauritanie, ont fait l’objet de rafles policières sans aucune explication au préalable avant d’être libérés, sous prétexte qu’ils doivent se munir d’une carte de séjour. Parmi ces personnes figurent plusieurs travailleurs migrants, ces actes sont contraires aux accords d’établissement entre certains états de provenance de ces travailleurs d’une part, mais également à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, d’autre part. Ce comportement des autorités est inadmissible ne respectant pas la dignité de la personne, car des opérations de cette nature doivent être bien préparées et obéissent à des formalités administratives bien précises conformément à la réglementation en vigueur. Au demeurant, même si tout Etat souverain a le droit de réglementer le séjour des étrangers sur son sol, il y a lieu de respecter dans toute opération de cette nature les droits humains et la dignité des personnes concernées. A mon humble avis, il faut avant tout une vaste campagne de sensibilisation à l’endroit des étrangers et une information très large sur les procédures administratives que ces derniers ne maitrisent pas du tout. Il faut également donner un délai raisonnable pour permettre aux intéressés de se préparer et de réunir les moyens financiers qui sont élevés afin de permettre une meilleure préparation des personnes concernées. Cette question très sensible doit être minutieusement étudiée et bien menée par les autorités, car elle pourrait avoir des répercutions négatives sur nos citoyens qui séjournent dans les pays ouest africains si l’opération n’est pas bien engagée. Il faut éviter l’amalgame et la xénophobie. Enfin, il est nécessaire de donner le temps aux étrangers pour leur
permettre d’effectuer les formalités demandées sans précipitation ni surenchère.

 

La situation sociopolitique dans notre pays se dégrade dangereusement. Pouvoir et Opposition sont engagés dans un bras de fer aux lendemains incertains. La société civile dans son ensemble, paraît observer un silence pesant. Y a-t-il des initiatives pour désamorcer la tension politique du moment.

Il est important de rappeler que le FONADH, s’est toujours investit pour encourager le dialogue entre les différents acteurs politiques et cela avant le coup d’Etat du mois d’août 2008 perpétré par les forces armées et de sécurité sous la direction du Général Mohamed Ould Abdel Aziz contre le Président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi élu démocratiquement. Le FONADH, sentant les menaces de déstabilisation qui pèsent sur les institutions en place, s’est mobilisé rapidement pour rencontrer les différents acteurs afin de favoriser un dialogue entre eux, malheureusement, avant la fin des contacts, les militaires ont fait leur putsch que le FONADH a immédiatement condamné et demandé le retour à l’ordre constitutionnel. Mais le coup d’Etat était déjà consommé. Néanmoins, dans la même lancée, le FONADH, avec d’autres personnalités de la société civile, une fois encore, a entrepris des démarches pour un dialogue inclusif autour des problèmes que connaît le pays. Je peux confirmer que le FONADH s’est toujours investi pour encourager et favoriser le dialogue et continuera ses démarches.
Effectivement comme vous le dites, la situation sociopolitique dans notre pays se dégrade dangereusement chaque jour depuis l’élection du Président Abdel Aziz en 2009. Tous les clignotants sont au rouge : l’absence de dialogue entre les principaux acteurs politiques menace la cohésion nationale, les revendications de la société civile, l’insécurité alimentaire etc. Par rapport à cette situation préoccupante que vous évoquez, des initiatives sont prises présentement par certaines personnalités de la société civile pour aider à renouer le dialogue entre les différents acteurs politiques, même si ce n’est pas gagné d’avance de rapprocher les positions des différents protagonistes qui sont très éloignées pour le moment. Mais qui sait ? La société civile n’a jamais croisé les bras par rapport à la situation politique qui se dégrade dangereusement dans le pays, mais elle n’est pas toujours comprise et écoutée par certains leadeurs politiques malheureusement, en dépit des efforts qu’elle déploie. Il y a même un rejet de la part de certains politiciens, alors qu’aujourd’hui elle est incontournable à l’instar de toutes les sociétés civiles qui jouent de plus en plus, un rôle important pour l’édification d’un Etat de droit. J’espère que notre société civile occupera de plus en plus une place importante dans le pays et jouera pleinement son rôle de veille en dépit des problèmes qu’elle rencontre en matière de gouvernance interne.

les acteurs politiques Lede notre pays doivent renouer le dialogue pour désamorcer la tension politique du moment, afin de préserver la paix et la concorde nationale, car la Mauritanie est très fragile.
Quel est la réaction du Fonadh, à propos de l’autodafé perpétré par le leader de l’IRA ?

Je ne souscrits pas à l’autodafé perpétré par le leader de l’IRA, qui est un acte maladroit, néanmoins, le contexte de banalisation du crime d’esclavage, malgré la multiplication des cas de plaintes en justice, presque toutes classées sans suite ou sabotées en cours d’instruction est révoltant. Le véritable problème c’est l’existence de l’esclavage dans notre pays, qui nécessite une éradication définitive sans aucune hypocrisie de la part des gouvernants, tout le reste constitue une véritable diversion, une fuite en avant. Par contre, je ne comprends pas la mobilisation de tant de foules hystériques, spontanément, contre la mise à feu de livres de droit et qui demandent une sanction exemplaire contre les leaders de IRA et qui sont restées indifférentes et même complices au racisme, à l’exclusion et aux nombreux cas d’esclavage qui persistent encore malheureusement dans le pays dans une totale impunité des esclavagistes avec la complicité manifeste des autorités.
En effet, en adoptant une nouvelle loi sur l’esclavage en septembre 2007, la Mauritanie a, pour la première fois, levé un pan du tabou sur l’esclavage, même s’il a fallu plusieurs décennies de lutte pour qu’une loi incriminant l’esclavage puisse être adoptée. Cependant, l’esclavage continue d’être pratiqué en Mauritanie du fait de l’absence des mesures d’accompagnement efficaces pour lutter contre ce phénomène, mais aussi de la non application de la loi, qui fait désormais de l’esclavage un crime. Les cas d’esclavage traités depuis l’adoption de loi 2007-048 démontrent que les pratiques esclavagistes demeurent récurrentes en Mauritanie. Mais au vu de ce qui précède, il n’est pas étonnant que les autorités contribuent à perpétuer ces pratiques d’un autre âge par le silence et la collusion, la banalisation des faits qui consiste à réduire des pratiques esclavage en une simple affaire d’exploitation domestique. C’est pourquoi Birame et ses amis de captivité qui sont des détenus politiques doivent être libérés immédiatement, étant donné que le délai de garde de vue est largement dépassé, où bien de leur garantir, dans les meilleurs délais, un procès équitable et juste selon les standards internationaux.
En 2011, à cause des insuffisances dénoncées par les populations sur l’enrôlement, le ministre de l’intérieur avait promis au Fonadh de rectifier le tir. Depuis lors, avez-vous reçu des plaintes des populations et quelle est la situation actuelle dans les centres d’accueil.
Depuis mai 2011, le gouvernement mauritanien a procédé à l’enrôlement des citoyens mauritaniens. Cette opération a connu un caractère discriminatoire à l’endroit des populations négro mauritaniennes. En effet, dans un Pays qui a été marqué, dans un passé récent par une politique d’exclusion et de discrimination, dont la manifestation criminelle suprême, fut la déportation de dizaines de milliers de citoyens, dans la violence et l’humiliation, au seul prétexte qu’ils ne sont pas arabo-berbères donc pas Mauritaniens, le FONADH avait attiré l’attention des autorités sur les conditions déplorables dans lesquelles se déroulent les opérations d’enrôlement des populations sur le Registre d’Etat Civil dans les Moughataa du District de Nouakchott. Nous avions, à l’époque, lors du démarrage de cette opération et à travers une pétition et des canaux divers, souligné notre préoccupation quant aux conditions opaques dans lesquelles s’effectue le recensement. Notre inquiétude était grande car la composition des membres des Centres d’Accueil des Citoyens (CAC) ne reflétait pas la Mauritanie plurielle. Il nous parait important de rappeler à l’attention des pouvoirs publics que pour entamer avec des chances de succès notre nécessaire réconciliation, pour l’émergence d’une Nation mauritanienne riche de nos diversités, tous les espaces de vie et de travail doivent être partagés. A cela s’ajoute l’absence de textes clairs et précis expliquant et réglementant le processus de cet enrôlement.
Malheureusement, le démarrage laborieux de cette opération à Nouakchott a confirmé toutes nos craintes. De toutes parts, des plaintes des populations qui expriment leurs ressentiments et inquiétudes sont signalées quant à : l’attitude peu responsable des personnes chargées de cet enrôlement, le caractère provocateur des questions posées est notoire, le refus de recenser les personnes (surtout) les femmes mariées à des Mauritaniens depuis plus de vingt ans et qui ont acquis la nationalité selon les textes qui étaient en vigueur, le fait de lier l’enrôlement des personnes adultes (plus de 45 ans) à l’enrôlement de leurs parents (père) ou la délivrance, le cas échéant, d’un certificat de décès etc.
Cette situation est d’autant plus grave qu’elle vise plus particulièrement, la composante négro-mauritanienne. Il a fallu des dénonciations et manifestations publiques de la société civile pour que les pouvoirs publics se rendent compte des insuffisances qui ont été dénoncées très tôt dans la mise en œuvre du processus. Même si présentement les plaintes ont beaucoup diminué par rapport au démarrage, des difficultés subsistent néanmoins. Il y a lieu de multiplier le nombre des bureaux d’enrôlement dans l’ensemble du pays pour permettre à tous les citoyens de se recenser dans des bonnes conditions. Par ailleurs plusieurs citoyens ne disposent pas des pièces d’état civil, ces personnes n’arrivent pas à s’enrôler. Il faut quand même noter une amélioration dans les centres d’accueil concernant les opérations d’enrôlement aussi bien à Nouakchott qu’à l’intérieur du pays. Mais il faudra la vigilance et suivre de plus prêt les opérations de l’enrôlement au niveau de tout le pays.
La résolution du Passif humanitaire traîne en longueur encore. Peut-on savoir où en est ce dossier et pourquoi jusqu’à présent depuis les opérations de recensement des fonctionnaires victimes des évènements de 89 en janvier 2010, rien de concret n’est fait pour que les victimes recouvrent leurs droits ?
Notre pays a connu ces dernières décennies des violations graves et massives des droits humains, exécutions extrajudiciaires, déportations massives des citoyens négro-mauritaniens au Sénégal et d’autres craignant pour leur vie se sont réfugiés au Mali, ces personnes ont été dépouillées de tous leurs biens et dépossédées de leurs pièces d’état civil. En dépit de ces violations, les organisations des droits humains membres de notre Réseau ont toujours demandé le dialogue autour de cette situation afin de trouver une solution consensuelle et définitive face à ce drame ; malheureusement nous n’avons jamais été associés au traitement de ce dossier. A ce jour, force est de constater qu’aucune enquête indépendante n’a été menée, aucun auteur n’a été traduit en justice.
Face à ce problème aussi important, qui a divisé notre pays pluriel et multiculturel pendant plusieurs années, les autorités ont réuni quelques représentants des victimes, des Imams et des Oulémas dans une totale opacité, pour signer un protocole d’accord dont personne ne connait le contenu hormis les signataires. Les victimes et ayants droit des événements de 1990-1991 vivent aujourd’hui les âpres de l’impunité. Ils côtoient tous les jours ceux qui ont tué, massacré leurs proches, libres de leurs mouvements et non inquiétés des crimes odieux qu’ils ont commis. En juin 2011 le gouvernement a déclaré sa volonté d’identifier les tombes des disparus afin que leurs familles puissent prier sur leurs sépultures. Cela, sans avoir besoin de recourir à une enquête. Le Président de la République, lors d’un meeting à Nouadhibou a déclaré qu’il connaît les auteurs des crimes.
Ce qui signifie de façon implicite que l’armée connait qui sont les auteurs des crimes, mais les protègent. Malgré tout, cette décision est restée lettre morte. Le refus d’abroger la loi d’amnistie, votée en 1993 par l’assemblée nationale, qui empêche toute poursuite judiciaire en Mauritanie contre les tortionnaires est l’une des manifestations de cette impunité dans ce pays. Aucun auteur des crimes qui ont été commis n’a été traduit en justice. En effet, les tribunaux mauritaniens se sont déclarés incompétents à cause de la loi d’amnistie de juin 1993. Il faut aussi noter les promotions accordées aux tortionnaires, pour des emplois de choix, ainsi que l’occupation de postes de responsabilité au niveau de la sécurité nationale. L’impunité reste un problème majeur en Mauritanie. Le règlement juste et définitif du passif humanitaire constitue sans nul doute un facteur incontournable pour le renforcement de l’unité nationale, la stabilité et la paix civile. Pour ce faire, il est nécessaire d’instaurer une plus large concertation avec tous les acteurs concernés en vue de trouver une solution juste consensuelle et concertée qui prend en compte les droits de toutes les victimes civiles et militaires, la mise en place d’un cadre formel afin de trouver des mécanismes appropriés et transparents qui respectent tous les droits et la dignité des personnes.

S’agissant des fonctionnaires et agents de l’Etat victimes des événements de 1989, le Conseil des Ministres a, dans sa réunion du 15 octobre 2009, crée une Commission nationale chargée du recensement de toutes les victimes concernées, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, dont les objectifs sont : le recensement des fonctionnaires et agents de l’Etat victimes des événements 1989, la proposition de solution pour le règlement du problème. A la fin de l’opération, 1159 travailleurs ont été identifiés, anciens fonctionnaires, agents de l’Etat, fonctionnaires de police et certains agents relevant des établissements publics. Après cette opération, la Commission a fait les recommandations suivantes : la réintégration et la reconstruction de la carrière de toutes les victimes. L’indemnisation pour les préjudices subis. Le dossier a été déposé depuis plusieurs mois auprès du ministre en charge de la fonction publique, depuis lors aucune information n’a été donnée quant au traitement de ce dossier en dépit de toutes les démarches entreprises par les victimes.
Les agents relevant des établissements publics qui ne sont pas concernés par ce recensement devront bénéficier des mêmes dispositions auprès de leurs institutions d’origine. Cette mesure aura l’avantage de parachever la solution au problème de l’ensemble des employés victimes des événements de 1989. Les travailleurs du secteur privé ne sont pas pris en compte dans ce recensement, en conséquence, le gouvernement doit se pencher sur la situation de cette catégorie d’une part et diligenter le traitement du dossier déposé entre les mains du Ministre de la fonction publique d’autre part. Par ailleurs, le sort de plusieurs catégories des victimes des événements1989 qui ont tout perdu (éleveurs, agriculteurs etc.) est ignoré, les autorités doivent se préoccuper de la situation de ces personnes comme toutes les autres victimes, si les autorités veulent vraiment clôturer définitivement ce passif douloureux afin de permettre une véritable réconciliation nationale.
L’opération retour des réfugiés établis au Sénégal a été récemment clôturée à Rosso en présence du haut responsable de l’ONU pour les réfugiés. Y a t-il encore des possibilités de retour pour les mauritaniens encore réticents au retour et que pouvez-vous dire de ceux qui sont au Mali et que le gouvernement mauritanien ne reconnaît pas ?
Dans le cadre de l’Accord Tripartite, signé entre la République Islamique de Mauritanie, la République du Sénégal et le Haut Commissariat aux Réfugiés le 29 novembre 2007, l’opération de rapatriement volontaire des déportés au Sénégal, a été effectuée du 29 janvier 2008 au 25 avril 2012, permettant le rapatriement de 24 273 personnes. La cérémonie de clôture du dossier de rapatriement volontaire des déportés mauritaniens au Sénégal a été organisée le 25 mars 2012 à Rosso, en présence du Haut Commissaire des Nations Unies pour les Réfugiés. Donc cette décision met fin définitivement à tout rapatriement organisé. S’il est vrai que des efforts non négligeables ont été consentis par l’Etat mauritanien, en partenariat avec le gouvernement sénégalais et le HCR, pour le retour organisé dans la dignité des milliers de personnes en exil forcé au Sénégal, il reste aujourd’hui que l’opération reste inachevée.
En effet, plus de 10 000 réfugiés mauritaniens vivent encore au Mali dans des conditions précaires et qui souhaitent rentrer dans leur pays à l’instar de leurs compatriotes déportés au Sénégal qui sont rentrés dans le cadre d’un accord tripartite. En effet, l’opinion publique nationale et internationale est aujourd’hui en possession d’éléments d’information clairs et précis sur la réalité des réfugiés mauritaniens au Mali. Depuis 1989, une partie de la population peule des Moughataa de Kankossa, Ould Yengé et Sélibaby a été contrainte de se réfugier dans la région de Kayes, au Mali. Ces réfugiés, comme ceux vivant au Sénégal, ont pour la plupart été chassés de leur pays, par des éléments des forces de sécurité et/ou de leurs supplétifs, durant la période1989 – 1990.
Par ailleurs, plusieurs missions dont celle conduite par le Ministre de l’Intérieur, d’institutions humanitaires, ont fait état de l’existence de communautés de réfugiés mauritaniens au Mali. La mention « réfugiés mauritaniens au Mali » existe dans tous les documents officiels qui ont préparé les rapatriements des réfugiés mauritaniens notamment: Décret du 02 janvier 2008 portant création d’un établissement public à caractère administratif dénommé « Agence Nationale d’Appui et d’Insertion des Réfugiés », Décret N° 004-2008 du 08 janvier 2008 portant création d’un Comité Interministériel chargé du retour des Réfugiés Mauritaniens, arrêté N° 1035/PM du 02 avril 2008 portant création de la Commission Nationale d’Orientation et de Concertation pour le retour des réfugiés mauritaniens, Circulaire N° 003 du 04 mai 2009 du Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation adressée aux walis.
C’est pourquoi, le FONADH exige du gouvernement mauritanien la signature, dans les meilleurs délais, d’un Accord tripartite (Gouvernement du Mali – Gouvernement de la Mauritanie – HCR), en vue de l’organisation des opérations de rapatriement des réfugiés mauritaniens au Mali, surtout quand on connaît la situation qui prévaut dans ce pays.

La commission de suivi de la sécurité alimentaire s’était fortement impliquée dans le dossier des terres de la vallée du fleuve que l’Etat voulait récupérer pour les mettre en valeur par le biais d’investisseurs étrangers. Où en est ce dossier à nos jours ?

Depuis quelques années, les terres de cultures de la vallée du fleuve Sénégal, sont l’objet de conflits entre les autochtones et des hommes d’affaires, récemment attirés par l’acquisition des terres. Les différents régimes qui se sont succédé, ont laissé des administrateurs peu scrupuleux procéder à des attributions arbitraires des terres ancestrales de paysans sans défense. C’est contre cet accaparement des terres que les populations des zones concernées se mobilisent et luttent pour la préservation de leurs patrimoines. En septembre 2010, le hakem de la Moughataa de Boghé publie un avis public qui annonce la décision de l’Etat d’attribuer 50.500 hectares de terres, à la Société saoudienne Tabouk Eziraiya Errajihii dans les communes de Boghé, Dar El Barka, Dar El Avia et Ould Birom. Les populations de ces communes se mobilisent et saisissent les autorités locales et nationales pour leur signifier leurs inquiétudes et leur refus d’adhérer à cette décision arbitraire.
C’est pour accompagner ces populations dans leurs luttes que le Comité de Suivi de la Sécurité Alimentaire (CSSA), dont la création remonte en 2009, a entrepris un certain nombre d’activités en collaboration avec les populations des communes menacées par l’expropriation de leurs terres de cultures au profit des investisseurs étrangers. Une vaste campagne de sensibilisation a été menée par le CSSA pour dénoncer l’accaparement de ces terres en violation de toute la réglementation relative à la question foncière. Depuis lors, le processus d’affectation des terres des communes concernées à savoir : Boghé, Ould Birom et Dar El Avia semble être suspendue, mais le CSSA reste vigilant, parce que nous ne savons pas ce que le pouvoir est entrain de comploter sur le dos des populations de la vallée du fleuve Sénégal. Le CSSA poursuivra le plaidoyer auprès de tous les acteurs contre l’accaparement des terres qui est problème mondial et qui menace les populations du sud, notamment le sahel. En effet, le foncier constitue aujourd’hui un enjeu incontestable dans le processus de développement.
L’eurodéputé écologiste français Pascal Canfin a été nommé ministre délégué au Développement. Un spécialiste de la finance, qui ne connait pas particulièrement l’Afrique. Toutefois, il a manifesté sa volonté de travailler désormais en étroite collaboration avec la société civile africaine. Qu’en dîtes-vous en tant que président du Forum National des Droits de l’Homme (FONADH) ?
Avec l’arrivée au pouvoir en France de la gauche, les espoirs sont permis pour divorcer avec la politique de la droite française, mais attendons de voir, car les promesses lors d’une campagne présidentielle ne sont pas toujours respectées. Le fait de créer un département chargé du développement à la place de la coopération est certainement une nouvelle approche par rapport à la politique française en Afrique. Vous savez même si ce ministre comme vous le dites ne connaît pas particulièrement l’Afrique, ce n’est pas nécessairement un handicap majeur, si la volonté politique existe de la part des nouvelles autorités françaises de divorcer avec les anciennes pratiques, mais considérer l’Afrique comme un partenaire à part entière sans préjugés. C’est en ce moment seulement que partenariat pourra être fructueux entre la France et l’Afrique.
Nous ne pouvons donc que nous féliciter de la volonté du Ministre français de travailler désormais avec la société civile africaine. Il faudra à l’avenir instaurer un partenariat gagnant-gagnant, c’est dans ce cadre que la société civile africaine doit prendre ses responsabilités afin de faire face aux multiples défis que connaît le continent. La société civile, en effet, doit de plus en plus occuper une place importante. En ce qui nous concerne, nous n’épargnerons aucun effort pour concrétiser cette volonté du Ministre français en charge du développement dans le cadre d’un véritable partenariat débarrassé de tout paternalisme. Je pense que les prochains mois nous édifieront sur les véritables intentions du Ministre par rapport à ses déclarations.

Interview réalisée par Moussa et Dialtabé Diop

Source  :  Le Quotidien de Nouakchott le 30/05/2012

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