Dimanche 27 mai, nous avons rencontré le maire de Rosso, Pr Fassa Yerim, dans son bureau. Il était en compagnie de quelques collaborateurs et conseillers municipaux.
Fassa Yerim est à la tête de la commune de Rosso depuis six ans. Il compte briguer un autre mandat. Qu’est ce qui a été fait pendant ces six ans, quelles sont les difficultés, les perspectives….QDN : Les voyageurs de passage à Rosso, en parcourant les rues de la ville, constatent que c’est très sale avec des tas d’ordures un peu partout. Qu’est ce que la commune a fait en matière d’assainissement et quels sont les obstacles ?
Dommage que vous n’êtes pas venus il y a trois mois au moment où Rosso était extrêmement sale. IL y a eu de nettes améliorations.
Effectivement, nous avons de gros problèmes de salubrité, de ramassage des ordures. Je pense que la Mairie, à elle seule, ne peut venir à bout des poubelles et de toutes les ordures. En matière de salubrité, je pense que l’on a mis la charrue avant les bœufs. Il fallait au préalable, une sensibilisation et une éducation. En matière d’assainissement, tout dépend de comment se comportent les populations. Nous avons fait des caniveaux destinés à l’évacuation des eaux de pluie. Dans ces caniveaux, on trouve non seulement des eaux usées, mais aussi des cadavres d’animaux et des détritus de toutes sortes. Les gens y mettent n’importe quoi. Comment voulez vous que la ville soit assainie quand des caniveaux destinés exclusivement a l’évacuation des eaux de pluie, servent de dépotoir a tout, quand des moutons sont dépecés dans ces caniveaux ? IL y a donc une éducation à faire a l’endroit des populations. Pour que ce genre de comportement cesse, il faut un changement des mentalités et ça ne se fait pas en un jour. Il faut parler, reparler, éduquer et, avec le temps, ca va s’améliorer.
L’État mauritanien alloue trois milliard d’ouguiyas à la ville de Nouakchott pour le ramassage des ordures. Une société étrangère spécialisée s’occupe de ce ramassage. Nous à Rosso, tout est à la charge de la commune. C’est difficile.
QDN : Il y a aussi le problème de la décharge des ordures située sur un espace qui appartiendrait à un homme politique de Rosso….
Nous avons eu un financement de l’Association internationale des maires francophones pour faire des dépôts de poubelle dans la ville et une décharge ou sont destinées les poubelles de ces dépôts. Tout a été fait légalement. Nous avons écrit au wali, au hakem, nous avons aussi saisi le directeur de travaux publics de l’époque, Monsieur Diagana. Nous lui avons expliqué que le financement ne peut être acquis que quand on aura un document attribuant à la mairie le site destiné à cette décharge d’ordures. Monsieur Diagana nous a fait comprendre que la zone ciblée était non viabilisé et sans aucun propriétaire. Par conséquent, on pouvait l’utiliser. Nous avons donc aménagé ce site et on a commencer a y décharger de ordures avec le système de l’enfouissement. Une année après, a ma grande surprise, nous recevons une lettre du Hakem selon laquelle ce site, ce terrain appartient au sénateur de Rosso, Monsieur Mohcen. Depuis lors en tout cas, nous continuons a y enfouir de ordures. On ne sait pas comment cette affaire va se terminer.
QDN : Où en êtes-vous avec le projet de centre de dépistage du cancer du col de l’utérus a Rosso ?
Quand j’ai été élu, des rossosois, des amis cadres, des rotariens se trouvant en Mauritanie et à l’étranger m’ont mis en contact avec le club Rotary International à Nouakchott. De là-bas j’ai été mis en contact avec le Rotary Club International de Stilimbergo de la région de aviano en Italie.
En tant que médecin, je sais que le cancer du col de l’utérus fait des ravages en Mauritanie. Je n’ai pas de statistiques devant moi, mais je sais qu’au niveau national ce cancer frappe des femmes très jeunes, je sais aussi que le dépistage est souvent très tardif. La maladie est souvent découverte au stade des métastases. J’ai vu des jeunes femmes évacuées au Maroc, en Tunisie et en France pour des cancers du col de l’utérus. Rotary Club International d’Italie a émis donc l’idée du financement d’un centre de dépistage a Rosso. Un centre a vocation régional qui accueille de patientes du Sénégal, du Mali…. Ce projet qui date de cinq ans est à sa dernière phase.
QDN : Est-ce un centre de dépistage seulement ou de traitement aussi ?
Au départ, c’était un projet de centre de prévention du cancer du col de l’uterus. Mais, ensuite, dans les discussions réunissant la commune de Rosso, nos partenaires de Rotary, les italiens, le centre d’oncologie de Nouakchott et le ministère de la santé, l’on s’est dit qu’il y a aussi le cancer du sein qui fait des ravages. Il a été donc décidé d’associer sa prévention au projet. Ensuite, le Pr Moustapha, directeur du centre d’oncologie de Nouakchott, a expliqué qu’il pourrait y avoir avec seulement le dépistage, un afflux de patientes à Nouakchott avec risque de surcharge au niveau du centre qu’il dirige. Il a proposé d’ajouter aux services du centre de Rosso, des traitements légers. Les italiens ont accepté d’inclure dans le projet le cancer du sein en plus de celui du col de l’uterus. Ils ont ensuite expliqué que pour offrir des traitements après dépistage, il faut une autre enveloppe évalué à 32 000 euros. Le ministère de la santé s’est engagé à prendre en charge cette enveloppe. Le ministère a également décidé de faire du futur centre de Rosso un projet pilote pouvant être étendue aux autres wilayas de la Mauritanie.
Pour la formation, un médecin mauritanien a passé neuf mois en Italie. A son retour, il a formé des sages femmes, des infirmières pour faire des prélèvements. Deux médecins ont également été formés pour la télémédecine.
QDN : Le centre va être ouvert quand a Rosso ?
Le matériel est déjà au port de Nouakchott. La plateforme est réalisée. Pour des raisons techniques, l’installation se fera dans le nouvel hôpital de Rosso. Une équipe technique composée d’italiens sera ici à Rosso pour faire les montages et des essais. Ensuite nous procéderons à l’inauguration officielle.
Il y a deux mois, j’ai été reçu par le Président de la République. Il m’a dit qu’il sera en visite à Rosso en juin comme promis. Je lui ai dit qu’une fois à Rosso, il inaugurera un centre de cancérologie. Le président m’a dit : « qui vous a financé ça, ce n’est pas l’État ? » je lui ai dit que ce sont des italiens. Vive la coopération décentralisée. Je lui ai cependant expliqué que le centre ne traitera que des cancers du col de l’uterus et du sein. Le président de la République a promis, qu’après Nouakchott, c’est Rosso qui sera doté d’un centre de cancérologie. C’est donc une perspective importante.
QDN : Les moyens de la commune proviennent du fonds régional de développement, FRD, et de taxes qui vous prélevez. Est-ce suffisant, est ce que le taux de recouvrement est satisfaisant…
S’il n’y avait comme moyens que le FRD et les taxes, la mairie serait fermée depuis longtemps. Il y a une coopération décentralisée et des bailleurs de fonds qui nous appuient. Ce que nous avons investi est nettement supérieur au budget que nous devons avoir. Un exemple : le syndicat des eaux de la région Îles de France nous a financé une station de pompage qui fait Breun, Teukeus Koumba et Dieuk à hauteur de 100 millions d’ouguiyas, sans aucune participation de l’État. L’UNICEF a participé et la Mairie aussi a participé à hauteur de 10%. L’association internationale des maires francophones va nous financer a hauteur de 400 mille d’euros un projet d’adduction d’eau potable du PK7 jusqu’au PK24. Pour ce projet également, l’UNICEF participera.
Le FRD, il faut le dire, nous permet de participer à hauteur de 10 ou 15% aux projets financés par nos bailleurs et partenaires.
Autre projet, des latrines sont en cours de construction grâce à un projet de 50 000 euros financé par le programme solidarité eau…
QDN : Vous envisagez aussi l’aménagement du bord du fleuve pour que ce fleuve cesse d’être seulement un point de passage…
Monsieur, peut être que dans trois mois, je ne serai plus la. A mon remplaçant, pendant la passation de service, je dirai : « Faites tout pour que Rosso cesse de tourner le dos au fleuve. » Je veux en effet que le bord de ce fleuve soit aménagé.
La beauté de Rosso, c’est quoi ? C’est le fleuve. La beauté de Rosso, c’est de pouvoir prendre cette bretelle en longeant le fleuve, sortir vers Tounguen…Ainsi, Rosso ne tournera plus le dos au fleuve mais regardera le fleuve. J’ai des bailleurs de fonds. J’ai un ami rossosois, Abbas Bouguerbal qui est entrain de faire une étude sur l’aménagement du bord du fleuve. On peut obtenir le financement avec des bailleurs. L’argent existe, tout peut se financer, mais il faut taper à la bonne porte.
Au forum mondial de l’eau qui s’est tenu récemment, nous avons obtenu un financement de 600 mille euros car j’y ai présenté un plan communal eau potable et assainissement. J’ai eu, sur place, ces 600 000 euros pour compléter un financement. Ainsi, en 2014-2015, toute la commune de Rosso aura de l’eau potable. Nous sommes donc bien partis pour atteindre un des OMD du PNUD fixés à l’horizon 2015. Pour l’assainissement, nous somme à 41% grâce a l’appui de l’UNICEF. Nous aurons bientôt de l’eau potable et des latrines partout à Rosso ; Des bailleurs de fond viendront ici en octobre pour faire le diagnostic de ce projet. Nous avons des bailleurs de fond satisfaits de notre travail. Il s’agit du syndicat des eaux de l’Iles de France, de l’AIMF, de PSEAU…
Nous envisageons la mobilisation de tous ces bailleurs et partenaires dont l’Union Européenne pour aménager cette belle corniche au bord du fleuve, une corniche avec restaurants, terrains de jeu et autre infrastructures. Rosso sera ainsi une ville moderne. Il y a aussi le pont qui se fera un jour….
QDN : Vous aviez dit que peut être vous ne serez pas ici dans trois mois, êtes vous candidat a un deuxième mandat à la tête de la commune de Rosso ?
Je suis candidat pour un deuxième mandat. Mon parti, l’UPR peut proposer un autre candidat mais mois je suis partant pour l’investiture. Je l’ai fait savoir. En cinq ans, il y a eu des réalisations. Si j’ai un deuxième mandat, je pourrai mener à bout plusieurs projets. La commune de Rosso est la capitale agricole, il est possible d’y faire mieux, beaucoup mieux pour qu’il n’y ait plus de chômeurs ici. Je pense que c’est possible.
Propos recueillis par Khalilou Diagana
Source : Le Quotidien de Nouakchott le 29/05/2012
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