« L’esclavage existe bien en Mauritanie. Nous devons le reconnaître et éviter de le nier parce que cela nuirait à son éradication qui doit être l’oeuvre de tous »,a déclaré cette semaine Ould Boulkheir, leader de l’APP au cours d’une conférence de presse dans le cadre de la Convention pour l’Alternance Pacifique,
une nouvelle structure politique de l’opposition mauritanienne créée récemment et qui regroupe outre l’APP, El Wiam et Sawab.Pour les observateurs ce revirement de Messaoud OuldBoulkheir marque un début d’une métamorphose politique grâce à la nouvelle mouvance pacifique qui s’inscrit dans le cadre d’un réalignement pour l’alternance en Mauritanie. Cette reconnaissance de l’esclavage bien que tardive intervient une semaine après que le leader de l’APP ait mis en garde la COD contre toute dérive qui mettrait en danger la paix sociale en Mauritanie à l’ouverture de la session parlementaire . Le président de l’assemblée nationale faisant ainsi allusion aux multiples manifestations des chefs des partis de la COD depuis plus d’un mois dans la capitale mauritanienne. Deux sorties médiatiques qui relancent les ambitions du candidat malheureux des présidentielles de 2009 considéré depuis sa participation au dialogue politique en octobre 2011 comme étant proche du pouvoir. Certains médias le qualifiant même de connivence avec le régime de Ould Aziz. Cette utilisation d’une image écornée d’un des chefs de file de l’opposition mauritanienne les plus charismatiques et le plus courageux de tous les temps semble avoir altéré ses propres convictions et sa capacité de jugement. Le temps de réflexion est venu pour lui d’être quitte avec sa conscience en tant que l’un des fondateurs célèbres du mouvement de libération et d’émancipation des Haratins « El Hor ou l’homme libre » des années 80 .Et l’idée pourquoi pas de reprendre le flambeau aux militants actuels de l’IRA dont les cerveaux sont actuellement en prison suite à l’autodafé de livres de rite malékite par le président Ould Abeid. L’épineux dossier de l’esclavage que la CAP remet sur la table devient une patate chaude encore une fois pour les autorités de Nouakchott qui n’hésiteront pas à s’en débarrasser le plus rapidement en continuant de jeter l’anathème sur les militants anti-esclavagistes et tous ceux qui pourraient douter de la bonne foi de Ould Aziz, un des grands héritiers de l’esclavage qui persiste et signe que ce fléau n’existe que dans l’imaginaire de ceux qui y croient. On peut tout reprocher à Ould Boulkheir sauf son côté non violent, un cheval de bataille qu’il a toujours mis en avant depuis qu’il était jeune militant du mouvement El Hor. Même dans ses moments les plus chauds en tant que chef de file de l’opposition il a une fois prôné la désobéissance civile pour forcer Ould Aziz à coopérer pour le dialogue politique. C’est vrai qu’il partage aujourd’hui cette démarche pacifique avec les chefs des partis El Wiam et Sawab mais c’est lui qui se montre plus tranchant par rapport à l’esclavage contrairement à Ould Houmeid l’ancien baron du PRDS qui continue de fermer les yeux sur les nombreux cas présumés de jeunes filles esclaves à Nouakchott et à l’intérieur du pays dénoncés par les militants de l’IRA. Les épreuves ne font que commencer pour la CAP. Par exemple sur l’affaire de Ould Abeid, la résurgence de l’intégrisme religieux avec la poussée des salafistes du parti Tawassoul, elle est loin d’accorder ses violons. Ould Houmeid va jusqu’à regretter la reconnaissance du parti islamique. Il se place dès maintenant dans la course des députés en attendant tranquillement son heure .Les législatives prochaines pourraient servir de tremplin pour redorer le blason et prendre sa revanche sur ceux qui ont voulu l’enterrer trop vite y compris tous les autres nostalgiques de l’ancien régime de Ould Taya. La déclaration à la presse et à l’assemblée nationale de Ould Boulkheir s’avère productive dans le débat national. Elle pourrait avoir un effet au moins d’un coup politique et médiatique à la fois de la CAP offrant par la même occasion au leader de l’APP de réagir alors que le président de l’IRA avec une dizaine de ses militants attendent un procès qui tarde à venir. Connu pour ses prises de positions fermes, le président de l’assemblée nationale n’a pas fini d étonner la classe politique. Jusqu’où ira-t-il ?Peut-être est-il entrain de lancer un début de signal de fumée ?
Bakala Kane
(Contribution reçue à Kassataya le 23/05/2012)
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