Alors que la Coordination de l’opposition démocratique ( COD) va organiser un sit-in sur la place Ibn Abbass à Nouakchott mercredi prochain, le président mauritanien poursuit ses consultations avec les chefs religieux de la capitale.
Sous prétexte d’endiguer la mal gouvernance du gouvernement de Ould Laghdaf, l’opposition multiplie les manifestations pour faire tomber le régime de Ould Aziz qui bénéficie actuellement du soutien de la société civile de la classe politique toute tendance confondue,des chefs religieux et coutumiers suite à l’affaire Ould Abeid. Un bras de fer que l’opposition impose à Ould Aziz pour retrouver un nouveau souffle.Depuis l’incinération des ouvrages d’inspiration malékite par le président de l’IRA Ould Abeid la Mauritanie est entrée dans une zone de fortes turbulences. Les observateurs discernent dans ces remous un pays qui pourrait basculer dans l’intégrisme religieux et une opposition décidée à en découdre une bonne fois pour toute avec le régime en place. L’opposition serait prête à laver l’affront de la répression policière de la semaine dernière en organisant dès mercredi prochain un second sit-in sorte de bras de fer qu’elle va imposer désormais avec les forces de l’ordre. Depuis les accords de Dakar, les chefs des partis du RFD Ould Daddah de l’APP Ould Boulkheir de Tawassoul Ould Mansour et de l’UFP Ould Maouloud n’ont pas digéré la défaite aux présidentielles de 2009. Ils nourrissent toujours un projet politique qui vise à renverser le président mauritanien. Mais cette ambition suscite bien des interrogations parce que d’abord la COD à 10 partis au départ est devenue un G5 assez controversé. Cette scission découle de la sortie du charismatique leader de l’APP et président de l’assemblée nationale qui a saisi la balle au bond lancée par Ould Aziz pour concrétiser ainsi le dialogue politique resté longtemps pomme de discorde entre l’opposition et la majorité. Ould Boulkheir est accompagné dans cette démarche par un autre poids lourd de la scène nationale, l’opportuniste Ould Houmeid qui a créé son parti El Wiam regroupant beaucoup de mécontents de l’ancien régime Ould Taya. L’ancien baron du PRDS qui entend jouer sa partition pour contrecarrer toutes les initiatives du Groupe des 5 .Coup de poker réussi par Ould Aziz qui a finalement obtenu ce qu’il voulait c’est à dire la crédibilité sur sa gouvernance démocratique aux yeux de l’opinion nationale et internationale. Le dialogue politique a enfin accouché d’une révision partielle de la constitution adoptée récemment par le parlement sur la criminalisation des coups d’Etat et l’esclavage et aussi la reconnaissance officielle de la diversité mauritanienne. Certes c’est une victoire à la Pyrrhus mais aussi une porte de sortie pour le nouveau locataire du palais de Nouakchott. Aujourd’hui l’opposition continue de pêcher par orgueil notamment sur le dossier esclavage avec l’affaire de Ould Abeid où elle a manqué d’initiatives novatrices pour un vrai débat. C’est finalement un thélogien et érudit mauritanien qui est sorti de l’ombre pour réfuter toutes les thèses fournies jusqu’ici par les chefs religieux, la classe politique toute tendance confondue, la société civile sur la condamnation du geste du leader haratin. Cheikh El Hadi a balayé ainsi d’un revers de la main toute l’instrumentalisation de ce geste à des fins politico-religieuses. C’est encore une fois une opposition molle qui se veut forte qui s’apprête à donner des leçons de démocratie en réitérant son sit-in dans la capitale. Cependant cette manoeuvre a beaucoup de limites qui tiennent au fait que l’exigence de départ de Ould Aziz est obsolète et ne traduit pas forcément l’adhésion des populations encore moins certains partis de l’opposition qui entendent se démarquer du possible et de l’imaginaire et du manque de respect à la démocratie qui veut que tout se passe par les urnes. C’est sans compter sur la résistance du président mauritanien et sur la mobilisation de l’UPR, parti de la majorité qui a fait des visites du numéro un à l’intérieur du pays son principal cheval de bataille pour les législatives prochaines dont le calendrier sera bientôt fixé pour couper court aux gesticulations des opposants déjà en ordre dispersé. A défaut de nouvelles idées de ces derniers Ould Aziz sait aussi médiatiser les débordements violents des opposants et des étudiants de l’Université de Rouen et de l’ISERI( Institut Supérieur d’Etudes et de Recherches Islamiques) bastion du parti Tawassoul pour mobiliser davantage ses troupes en pointant du doigt la baguette de la manipulation. Mais c’est à la COD que revient la tâche difficile de faire des propositions sur les enjeux de ces élections dont le retard considérable est décrié par l’ensemble de l’opposition qui le qualifie de second coup d’Etat de Ould Aziz et par les parlementaires de l’Union Européenne de passage à Nouakchott. Et cette nouvelle situation de quasi vide juridique risque de coûter cher à son initiateur qui compte sur l’avancement de l’opération d’enrôlement des populations pour parachever l’une de ses réformes administratives la plus contestée par les populations mais la plus moderne et dont le manque de moyens matériels et humains pourrait encore retarder l’échéance. Bien qu’affaiblie l’opposition peut encore espérer gagner des sièges au prochain parlement mais à condition de ne pas boycotter les urnes qui serait synonyme de mort politique surtout pour les vieux rivaux chefs Ould Daddah et Ould Boulkheir.
Bakala Kane
(Contribution reçue à Kassataya le 08/05/2012)
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