Mot «Gazra » : Un jargon devenu populaire

(Crédit photo : anonyme)

Comme beaucoup de mauritanismes, le mot «Gazra » est à la mode.

 Il désigne premièrement une « occupation illégale du domaine public » selon le Français en Mauritanie de Bah Ould Zein et Ambroise Queffélec.Depuis des années une « vague de déménagements intempestifs et d’occupations illégales du domaine public a déferlé à Nouakchott » et à Nouadhibou.D’origine hassaniya, le terme signifie aussi « quartier périphérique constitué pêle-mêle de certains terrains construits ou non, occupés illégalement, avec des maisons ne satisfaisant pas souvent aux normes les plus élémentaires de sécurité en matière d’habitat.

Dans ces foyers, pour la plupart en bois ou en taules (baraques), il n’existe pas de service public d’alimentation en eau potable et de réseau électrique, sinon des branchements frauduleux et dangereux, parfois informels dont les factures sont reversées à des propriétaires de niches, bénéficiant de la couverture d’agents influents de la Somelec ou de la Snde pour permettre aux familles de s’éclairer et de disposer de sources énergétiques. L’eau est revendue dans ces espaces par des charretiers ou par des citernes d’eau installées provisoirement. On y trouve des baraquements touffus, des familles entassées et des routes et rues engorgées…

Erigé en vertu cardinale en Mauritanie, le mot s’est glissé dans le jargon politique et journalistique pour indiquer péjorativement- dans le dico du duo Ould Zein /Queffélec- l’ « anarchie » ou le « désordre » qui règne au sein de tous les compartiments de l’Etat. Ainsi on parle de la « culture de la gazra » pour indexer la « corruption généralisée, le népotisme institutionnalisé, l’interventionnisme, l’absentéisme, le détournement de deniers publics et la fraude banalisée »…
L’ « esprit de gazra aidant », on « se l’approprie » au point de former « gazreur » qui désigne non seulement un habitant d’une gazra mais aussi une personne qui n’a ni conviction ni aucune idéologie politique, déambule d’un parti à un autre à la poursuite des crypto-intérêts ou à la distribution de postes où l’on peut « manger » à son gré .On emploie aussi le mot comme partisan du désordre. Celui qui ne respecte pas son rang dans les files est qualifié de « gazar ». L’expression s’est tellement répandue pour désigner au figuré tous les cas irréguliers d’acquisition d’un diplôme ou de privilèges n’observant pas les règles de transparence. Au niveau des hautes sphères de l’Etat, le terme est usité pour désigner parfois les coups d’Etat qui délogent des élus. « Gazra », devenu un mot populaire ne se limite pas à ces seuls exemples, puisqu’il s’étend aussi dans les milieux sociaux et économiques. Enfin, pouvez-vous étaler à votre tour votre savoir sur ce terme sans être tenté par la « gazramania » ?

Sow Aliou

Source  :  Le Rénovateur le 04/04/2012

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